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Interview de Radhouane Ben Salah : Le Tunisien aime être traité comme un V.I.P
21/08/2015 | 19:58
8 min
Interview de Radhouane Ben Salah : Le Tunisien aime être traité comme un V.I.P

 

Radhouane Ben Saleh, président de la fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH), nous a accordé vendredi 21 août 2015 une interview dans laquelle il a expliqué en détail et avec beaucoup de clarté les problèmes de l’industrie hôtelière. Il a également avancé les solutions qu’il faudrait mettre en œuvre pour sauver le secteur et assurer une relance rapide. Interview.

 

Vous avez prédit la fermeture des hôtels à partir du mois de Septembre. Sur quoi vous basez-vous pour avancer cela ?

La situation actuelle, en ce mois d’août, est quelque peu trompeuse. L’occupation en ce moment est assurée à 95% par le tourisme intérieur et le tourisme algérien. Le marché européen est quasiment inexistant. Le problème c’est que ces deux marchés, tunisien et algérien, vont cesser d’occuper les hôtels tunisiens à partir de fin août. Du coup, on va se retrouver avec une série d’hôtel avec un taux d’occupation nul ou très faible qui ne permet pas à ces établissements de continuer à fonctionner.

 

Des solutions doivent alors être trouvées pour que l’atmosphère sociale ne se dégrade pas davantage et pour préserver également les intérêts du personnel hôtelier. Nous avons déjà commencé à avoir quelques réunions avec le ministère du Tourisme et le ministère des Affaires sociales pour trouver des solutions en cas de chômage technique partiel ou total. Le but c’est de permettre au personnel de recevoir, pendant une période de 6 à 9 mois, une rente convenable et continuer à vivre de manière décente.

 

Malheureusement, aucune des mesures prises par le gouvernement n’a été à ce jour appliquée. Celles-ci avaient pour objectif de garantir le maintien de la main d’œuvre autant que possible et de payer les salaires en cas de chômage technique.

 

En matière de politique touristique, quels reproches avez-vous à faire au gouvernement ?

L’évaluation de l’action du gouvernement peut être faite en deux volets. Le premier volet est le volet conjoncturel et immédiat. C’est-à-dire, les mesures immédiates à prendre pour sauver la saison. La ministre du Tourisme a fait tout son possible pour transmettre les problèmes et les solutions que nous avons envisagés pour aider à apaiser quelque peu l’atmosphère générale et faire de telle sorte que les hôtels puissent survivre et avoir la liquidité nécessaire au payement du personnel et l’achat de la matière première indispensable pour leur fonctionnement. Les solutions que nous avons proposées et qui ont été retenues par le gouvernement auraient pu nous aider davantage si elles étaient prises à temps. Nous sommes presque à la fin du mois d’août et aucune de ces mesures n’a été mise en application.

 

Le deuxième volet concerne le travail à moyen et à long terme. Il y a des problèmes structurels qui sont anciens et qui se sont amplifiés après la révolution. Ces problèmes-là doivent être traités et résolus de manière radicale afin d’assurer un développement pérenne du tourisme tunisien. Le premier, à mon sens, est celui de l’endettement. Pourquoi ce problème est-il si important? Tout simplement, parce qu’il conditionne la qualité de la prestation, de la maintenance, de la rénovation ainsi que celle du personnel et de la matière première. Ce problème de l’endettement jugule donc l’action de l’hôtelier et le contraint à fournir des prestations minimales.

 

Vous avez dit qu’aucune des mesures décidées par le gouvernement n’a été concrétisée. Pourquoi selon vous ?

J’expliquerais cela par les lenteurs administratives et la mauvaise communication des directives. Je suis incapable d’en dire plus parce que je n’arrive pas à comprendre qu’un gouvernement n’applique pas des mesures que lui-même a décidé de prendre, d’autant plus qu’elles sont conjoncturelles et qu’elles doivent être appliquées immédiatement.

 

Revenons à la question de l’endettement. Où on en est par rapport au projet de la société de gestion d’actifs ?

Il y a eu des essais pour créer une société de gestion d’actifs. Un projet de loi a été proposé dans ce sens. Mais les éléments qui y ont été mis n’ont pas été satisfaisants pour nous. Nous avons fait de telle sorte qu’on sursoit à ce projet et qu’on puisse discuter ensemble de solutions qui arrangent aussi bien les banques que les hôteliers. Au départ, il était question de solutionner les problèmes des banques au détriment de l’hôtellerie. Cela ne pouvait pas être acceptable. Actuellement, il y a plusieurs solutions possibles dont celle de la société de gestion d’actifs qui serait essentiellement axée sur les dettes carbonisées. Cette société prendrait en charge les unités ayant des dettes carbonisées auprès des banques pour changer leur vocation ou les restructurer ou encore vendre le terrain. La deuxième solution est destinée aux hôteliers qui ont toujours essayé de payer leurs dettes, mais qui, à cause notamment des conditions de remboursement difficiles, ils n’ont pas pu honorer l’intégralité de la dette. Pour cette catégorie-là, il y a lieu d’étudier la possibilité de les exonérer des intérêts et des pénalités de retard et même de réduire les intérêts classiques. Une fois ces réductions et exonérations faites, il faut donner des crédits à long terme avec des taux de crédits supportables.

 

La troisième solution concerne les hôteliers qui se sont endettés après 2011. Pour ceux-là la solution est beaucoup plus facile. Il faut juste réétudier un peu les intérêts de retard et les pénalités et voir s’il y a moyen de reconduire le crédit sur une période plus longue. Dans tous les pays touristiques, les crédits hôteliers s’étalent sur 20 à 25 ans. En Tunisie, le remboursement se fait sur 12 ou 13 ans, ce qui est insupportable pour un secteur aussi capitalistique que l’hôtellerie.

Mais je crois qu’on va dans le bon sens pour la question de l’endettement. Cependant, il faut aller un peu plus vite.

 

Depuis quelques temps, les hôteliers sont en train de subir une campagne hostile sur les réseaux sociaux. Que répondez-vous à cela ?

La campagne de dénigrement est de deux sortes. La première et la moins dangereuse est celle du client tunisien qui peut nous faire des critiques justifiées en précisant la défaillance qu’il a constatée. Cette situation est plus facile parce qu’elle est rectifiable et nous permet de réagir rapidement. Mais ce qui me gêne un peu c’est l’absence de critique précise, comme dire par exemple qu’il y a un mauvais accueil sans donner d’explication.

 

Cette année nous avons eu une clientèle tunisienne très importante dans l’hôtellerie. Le souci c’est que nous, hôteliers, nous ne sommes pas habitués à traiter la clientèle tunisienne comme un marché en plein sens du terme. Le Tunisien souhaite que l’accueil soit personnalisé. Il aime être traité, dès son arrivée, comme un V.I.P même quand il s’agit de passer une seule nuit à l’hôtel. Cela ne nous gêne évidemment pas. Au contraire, nous pensons que l’accueil doit être différent de l’accueil de groupe. La deuxième chose dont il faut aussi tenir compte, c’est qu’il faut adapter les horaires de certains services. Le Tunisien n’aime pas prendre son petit déjeuner entre 6h et 9h du matin, car il se lève généralement tard en été. Il préfère donc déjeuner le matin jusqu’à 11h ou jusqu’à midi. Même chose pour le dîner. Le client tunisien est très exigent et nous permet, par ses critiques et remarques, d’améliorer les services de façon rapide et palpable.

 

Il y a malheureusement une incompréhension entre le client et l’hôtel qu’il faut dissiper. Le client pense qu’il n’est pas le bienvenu. L’hôtelier pense de son côté que le client va le critiquer quelle que soit la qualité de ses prestations et chacun donc reste sur ses gardes. Je pense que l’hôtellerie tunisienne est consciente de l’importance du marché intérieur, et ce, depuis quelques années. L’évolution de ce marché prouve d’ailleurs que les hôteliers traitent de plus en plus ce marché comme un marché classique et comme un marché important. La différence entre cette année et les années précédentes c’est que le Tunisien est presque l’unique client de l’hôtel et tout doit être aménagé et adapté à sa demande. J’aimerais aussi indiquer que 700 mille dinars ont été alloués par le ministère du Tourisme avec la collaboration de la profession pour faire une campagne de promotion en deux phases. Une phase avant la saison et une autre qui commence bientôt pour la fin de l’année. Il y a eu aussi des accords avec les agences de voyage tunisiennes pour que les prix faits aux Tunisiens soient similaires à ceux accordés aux tour-opérateurs étrangers. Cette année, nous avons également fait de telle manière que les prix soient les plus bas possible.

 

A partir de quel mois ou de quelle période, on pourra espérer voir le tourisme tunisien retrouver son dynamisme ?

La reprise est conditionnée par un élément important, à savoir la sécurité. Je pense que la reprise sera possible à partir d’avril 2016. Mais, il faudrait qu’il n’y ait pas de nouveau attentat d’ici la fin de l’année. Il faudrait aussi que notre système de sécurité soit suffisamment crédible pour que les pays étrangers lèvent les restrictions envers la Tunisie. Et quand on parle de sécurité c’est aussi bien à l’intérieur des hôtels qu’à l’extérieur. La sécurité sera bientôt une obligation dans nos conditions de fonctionnement. Elle figurera, autrement, dans les conditions à remplir sur les futurs contrats que nous allons signer avec les tour-opérateurs. Ainsi, la responsabilité de l’hôtel sera engagée. Cela nous amènera, en tant que hôteliers, à obtenir des certifications en matière de sécurité, car cela nous aidera à reprendre sérieusement la collaboration avec les marchés étrangers. Il faut même penser à intégrer ce critère dans le système de classement des hôtels.

 

Entretien conduit par Elyes ZAMMIT

 

 

21/08/2015 | 19:58
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Commentaires (30)

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R.T.
| 24-08-2015 07:02
Non seulement les attentats ont provoqué une grande crise dans le secteur touristique, mais aussi certain intrus dans le domaine, sans aucun notion sur la signification de ce que veut dire le mot tourisme (?),sont entrain d'opérer comme au souk à la crier! Toute sorte d'animation est accompagnée par une hard sono avec volume très très fort exposée à l'extérieur en face des chambres d'hébergement ,comme dans les grandes places pendant au moi de ramadan . Des "chansons" choisies sans aucun goût ni harmonie genre mezoued, rape, zora tabal ,fazani etc..sont actives du matin au soir tard sans cesse et ce croyant offrir le repos complet et le plaisir au vacancier ! Alors que si le repos réel et l'animation adéquate n'existent pas le touriste ne résiste pas de passer plus qu'une ou deux nuits et ne revient plus pour des longs séjours de repos et de loisir.Ce genre d'animation n'existait que dans des endroits destines à une clientèle bien définie et bien réserver pour ce genre de loisir.La majorité des touristes vont en vacances pour se reposer et non pas pour se stresser. Le calme et la détente sont les buts d'aller en vacances.Si on fait initier aux clients qui n'avaient pas dans leurs habitudes d'aller passer ses vacances dans les hôtels cette tradition là;le résultat serait meilleur pour tous. N'oublions pas que notre infrastructure hôtelière et notre climat répondent bien pour offrir des séjours agréables sans fatigue inutile .Notre réputation d'un pays touristique est en jeu et risque de se perdre d'avantage et disparaître un jour si on ne se corrige pas et vite !!!!

Gardien
| 23-08-2015 18:05
@Sliman
On doit être faire!
Moi,je me suis une femme et vient de 1972 à la Tunisie et toujours je suis sans Compagnie d'un homme.
Maintenant je vient pour la 29 ième fois à la Tunisie, et moi je marche seule à Hammamet ou Nabeul et je ne peux pas dire que dans tout le temps je suis traitée sans respect parce que je suis une femme, même si cela est plus étonnant pour les hommes tunisiens
parce que leur culture ne le connaît pas!
Mais ce que les femmes de l'EU et surtout les femmes des pays de l'est ne comprennent et acceptent pas, c'est que le comportement dans un pays musulman est plus différent.
Les hôteliers et aussi les Citoyens sont tres tolérent contre les coutumes
des touristes mais on faut accepter quelques règles quand on ne veut pas être regardé comme une putaine et provoquer devenir traîter comme elle.
Il ne va pas qu'on va à la plage et à la piscine aux seins nus le Bikini suffit.Quand on veut les seins broncés
on peut aller au balcon.
Et quand on marche vers les villes on peut réspecter ce qu'on est dans un pays musulman!
Ca devrait être naturel parce qu'on est hôte dans ce pays.
On ne doit pas porter des vêtements trop décolleté.

ally
| 23-08-2015 17:23
Le secteur privé doit laisser le gouvernement tranquille et s'occuper de ses problèmes comme un grand et responsable. Vous voulez tous pour vous ou quoi ?

R.T.
| 23-08-2015 17:19
Comment peut-on en être traité en VIP quand chaque client veut être traité à sa guise et refuse de respecter le règlement intérieur de l'unité et qui peut ne pas être le même dans tous les hôtels. Chaque hôtelier a sa propre politique commerciale et un cachet particulier.Quand on est hôte on doit s'adapter et non pas exiger du sur mesure.

Gardien
| 23-08-2015 15:47
De chaque hôtelier chacun Client doit être traité comme un V.I.P.parce qu'il apporte la richesse pour le hôtelier.
C'est pourquoi les Clients peuvent attendre des Serviteurs bien,instruit, les chambres , les salles de bains, les bars, les terrasses et les autres pièces ainsi comme la plage propre et bien entretenu peu Importe de nombre des étoiles.
Aucun client aime se sentir traité comme un mal nécessaire qui faut accepter tous!
Ce que les hôteliers doivent comprendre c'est que les touristes s'informent de leurs hôtels souvent
dans l'internet et si les critiques sont mal on vait choisir un autre, si on ne connaît pas déjà cet hôtel personel.c
Ce qu'on attend des clients on doit faire aussi soi-même !
Le comportement des clients dans un hôtel bien entretenu et propre sera trop différent come dans un hôtel mal entretenu et pas propre.
Dans la Tunisie, moi j'ai fait la connaissance de tout les deux !!!

Sliman
| 23-08-2015 13:58
1. Le contexte actuel et le manque de sécurité. C'est une réalité.

2. Mais aussi et surtout un manque de civisme.

Presque tous mes amis européens ont été choqués par le manque de respect dont font preuve les tunisiens à l'égard des occidentaux. Surtout vis à vis de leurs femmes.

Ces 2 problèmes doivent être regles, avant la reprise du tourisme.

Jsjaban
| 23-08-2015 13:53
Il a parfaitement résumé la situation.

Espérons que le gouvernement mettra tous les moyens nécessaires pour assurer notre sécurité et celles de nos touristes.

R.T.
| 23-08-2015 12:40
Avec la crise le désordre dans les services augmente du jour en jour de la part des agents. le bon comportement avec les clients est devenu à la tête de celui qui donne le plus de pour boire.Ce phénomène n'était pas aussi flagrant avant le 14 janvier 2011.Le chômage qui guette ces employés à partir du 1er sept prochain a provoqué de la panique et de la déprime chez eux. Ca c'est mauvais pour l'avenir du tourisme en Tunisie.On n'entend plus que " mriguel" "oumourek mrigla" avec des tenues sales et une audace curieuse.Faites un sondage Ex:les agents du port de plaisance d'elkantaoui dont ses agents sont sensés porter des tenues correctes et surveiller les yachts des plaisanciers et non pas assis dans les cafés avec les clients ! c'est de la pagaille! u

Bouglagem
| 23-08-2015 09:37
Vous avez oublié de poser les questions
qui fachent à Mr B.Salah
Pourquoi tant d'hôtels pour le balnéaire qui dure grosso-modo 3 mois?
Pourquoi avez-vous pratiquer un ostracisme honteux pendant des années envers les Tunisiens?
Pourquoi aucune démarche écologique de la part des hôteliers exp tri des ordures ?
Pourquoi aucun affichage à l'entée des hôtels et laisser les gardiens sans formation refouler les clients locaux sous prétextes bidons ?
Pourquoi planter les parasols en bord de mer alors que la loi exige une distance minimale?
Etc etc
Mr B.salah vous le savez le tourisme
seul n'est vraiment pas la solution
Le T.O se sucre au départ et ne laisse que des miéttes pour l'hôtelier qui
paye ses employés à coup de lance-pierre

R.T.
| 23-08-2015 07:38
Si FTH pense a réunir tous les patrons des unités hôtelières avec tous les professionnels du secteurs pour constituer genre d'association ou fondation ayant pour but unifier les actions commerciales avec echanger entre eux leurs visions puis agir ensemble avec une seul langue pour les principes de base de la profession.Ceci créera une confiance auprès de leurs partenaires et évite l'embarras de choix sur le basique qui touche les tarifs et les services rendus en contre partie.Il faut que ces pros ne comptent plus sur l'état et renforcent leurs efforts pour garder des relations bien fondées et durables avec les T.O. Après tous c'est leur intérêt commercial qui les intéresse tous et qui se calcule en priorité.