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Europe - Tunisie, je t'aime moi non plus
27/04/2014 | 1
min
Europe - Tunisie, je t'aime moi non plus
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La 17ème édition du forum Réalités a été l'occasion pour plusieurs conférenciers de deviser concernant les relations euro-méditerranéennes, particulièrement avec la Tunisie. Tous les intervenants ont appuyé l'importance de ces relations et leur caractère stratégique. Pourtant, mis à part des initiatives diplomatiques, rien de concret n'a été réalisé.

Des personnalités de premier ordre ont participé au forum Réalités. Ministres, anciens ambassadeurs, diplomates. Les relations entre les deux rives de la Méditerranée ont été au centre des débats, le thème du forum étant "La Tunisie dans le contexte euro-méditerranéen en mutation". Plusieurs éléments de rapprochement et d'intégration ont été soulignés par les intervenants.

Plusieurs conférenciers se sont accordés à dire que la promulgation de la Constitution tunisienne était un événement crucial qui influera directement la qualité des relations entre la Tunisie et l'Europe. En effet, l'accès de la Tunisie à un début de démocratie illustré par la promulgation d'une Constitution consensuelle fait que le pays accède à des standards politiques proches de ceux de l'Europe. Ceci participe grandement à réduire la distance culturelle qui sépare la Tunisie de l'Europe. Au niveau politique, il existe un certain optimisme quant à l'avenir de la coopération avec l'Union européenne.

Mais les intervenants n'ont pas manqué de pointer les menaces qui pèsent sur la transition démocratique tunisienne. La première menace vient du secteur économique. Sachant que tous les voyants de l'économie tunisienne sont au rouge, un certain embrasement de la situation au niveau économique pourrait rompre la dynamique démocratique tunisienne. C'est dans ce contexte que Hakim Ben Hammouda, ministre de l'Economie et des Finances, a déclaré que c'est dans le secteur économique que la Tunisie a le plus besoin de son partenaire européen. Pour Hervé Morin, ancien ministre français de la Défense, les dirigeants tunisiens doivent exiger du FMI de lui laisser le temps de rétablir les équilibres économiques internes avant de se soumettre aux conditions de prêt de l'institution de Bretton Woods. En effet, l'ancien ministre français a soutenu que la pression économique est susceptible de rompre un équilibre social fragile et donc mettre en péril la transition démocratique tunisienne.

Il est également important de noter que les révolutions arabes se sont faites simultanément avec une crise économique d'envergure en Europe. Par delà, le soutien économique espéré par la Tunisie a été défaillant même si, parallèlement, le soutien politique a été prépondérant.

Les problématiques sécuritaires au niveau méditerranéen ont également été longuement abordés. Hervé Morin n'a pas manqué d'appuyer la nécessité de sécuriser l'espace euro-méditerranéen en tant que prélude à l'instauration de relations égalitaires entre les deux rives de la Méditerranée. Les conférenciers ont mis en exergue la corrélation qui existe entre une économie prospère et de bonnes conditions de vie au Sud, et la menace sécuritaire et terroriste au Nord. Le développement de relations profondes de coopération et de collaboration entre les deux rives de la Méditerranée est un gage de stabilité et de paix. Ceci rend nécessaire aux Européens et aux Maghrébins de s'engager dans une stratégie commune de sécurité. L'Europe s'est longtemps acoquinée avec les dictatures nord-africaines principalement pour des raisons sécuritaires. Les régimes autoritaires qui étaient en place servaient de premier front de combat contre les flux migratoires qui se dirigent de l'Afrique subsaharienne vers l'Europe.

La révolution tunisienne, que certains intervenants ont préféré qualifier de "simples événements", aura tout de même permis, selon les conférenciers, de montrer que l'Islam n'est pas incompatible avec la démocratie et la modernité. Cette thématique a été largement abordée durant le forum. Certains ont soutenu que les révolutions arabes, particulièrement au sud de la Méditerranée, ont servi de moteur d'intégration. Les aspirations exprimées par des populations en colère concernant le travail, la dignité ou la lutte contre la corruption rejoignent de manière directe les revendications et les aspirations des peuples du nord de la Méditerranée. C'est ainsi que les révoltes arabes ont participé à la démystification de la religion islamique auprès des populations européennes.

Le déséquilibre entre l'Europe et la rive Sud de la Méditerranée a également été évoqué par les participants. Ce déséquilibre s'illustre sur deux principaux aspects. Le premier concerne le volume des échanges commerciaux. En effet, plus de 75% des échanges tunisiens et marocains se font avec l'Europe. Ce taux est loin d'être similaire dans l'autre sens, ce qui crée un certain déséquilibre dans les échanges Nord-Sud. D'un autre côté, le déséquilibre entre l'Europe et l'Afrique du Nord se trouve dans le dialogue en lui-même. En effet, l'Europe se présente comme une entité homogène qui négocie en tant qu'ensemble. En face, il y a cinq pays qui négocient de manière unilatérale. Pire, ces mêmes cinq pays sont incapables de s'accorder ou de représenter une entité compacte, la preuve est l'échec de l'UMA (Union du Maghreb Arabe). Plusieurs intervenants ont pointé le fait que les deux locomotives de l'Afrique du Nord - le Maroc et l'Algérie - sont incapables de s'entendre. Tant que ces dissensions existeront, l'Afrique du Nord ne pourra pas se comporter et agir envers l'Europe en tant qu'entité homogène.

Les relations entre la Tunisie et l'Europe ont changé depuis la révolution. Au lendemain du 14 janvier, il y a eu un rapprochement de nature politique et culturelle entre la Tunisie et la rive Nord de la méditerranée. Toutefois, la révolution s'est accompagnée d'une dégringolade économique qui nécessite un soutien européen conséquent et immédiat. Cette situation nous permettra, en tant que Tunisiens, de faire la différence entre "nos copains et nos amis", comme l'a dit l'ancien ministre tunisien de l'Education, Hatem Ben Salem.


Marouen Achouri
27/04/2014 | 1
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