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Tunisie – Quand M. Jebali multiplie les contradictions…

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Tous les Tunisiens attendaient avec impatience et avec curiosité l’allocution, transformée en mini-conférence de presse, de Hamadi Jebali, chef du gouvernement, une allocution annoncée à cor et à cri et entourée d’un grand halo, transmise en direct sur Al Wataniya 1 juste avant le match de la Tunisie contre la Côte d’Ivoire en Coupe d’Afrique des Nations.
Cette allocution, faute de présentation de la nouvelle équipe gouvernementale, devait éclairer la lanterne de l’opinion publique sur le point de la situation et la tendance prévalant après les pourparlers marathoniens entre M. Jebali et les dirigeants des différents partis politiques sur la place, en plus, bien entendu, des tractations au sein de la Troïka.
Faute de ladite présentation, on s’attendait, au moins, à avoir une idée assez précise sur les tendances et les orientations de la prochaine étape de cette deuxième phase transitoire qui s’éternise, même si le chef du gouvernement affirme que son vœu le plus cher est de la raccourcir au maximum afin d’aboutir à l’objectif principal et final commun à tous les Tunisiens, en l’occurrence l’organisation de nouvelles élections démocratiques et transparentes pour doter le pays d’institutions définitives et de pouvoir légitime capable de mener la Tunisie à bon port.
M. Jebali s’est contenté de nous gaver de généralités et de données déjà connues. De belles paroles, certes, mais qui demeurent au stade de la théorie et de ce qui devrait être fait, chose lointaine de ce qui existe dans les faits.
Reconnaissant, pour la première fois, la formule de répartition selon les appartenances partisanes, tout en refusant d’appeler cela un gâteau, Hamadi Jebali oublie ou semble oublier que les élections du 23 octobre 2011 – et on ne le répètera jamais assez – n’étaient pas ce qu’on peut appeler des « législatives classiques » en temps ordinaire, mais il s’agissait d’un scrutin particulier pour l’émergence d’une Assemblée constituante chargée d’élaborer, dans une seconde étape transitoire, une Constitution et de faire asseoir les fondements d’institutions pour la phase définitive.
Le gouvernement de cette seconde phase transitoire, limitée au départ à un an, devait assurer la gestion des affaires courantes et non pas d’élaborer des stratégies de longue haleine allant jusqu’à dix, voire vingt ans.
Ce qu’il fallait à la Tunisie, c’était un gouvernement restreint de compétences dont les membres devaient s’engager à ne pas se présenter aux élections comme ce fut le cas pour l’équipe gouvernementale de Béji Caïd Essebsi.
Maintenant que le mal est fait, il faut penser à y remédier et sauver les meubles. On attendait des annonces dans ce sens de la part de M. Jebali, mais il n’en fut rien. Tout le monde est conscient que le remaniement va être de façade, à savoir éventuellement, des permutations et une entrée d’un nombre réduit de certaines personnes avides de pouvoir. Car, logiquement, on n’entre pas dans un gouvernement qui a fait ses limites et qui n’a pas de nouvelles orientations décisives.
Pour revenir au contenu de ce discours de Hamadi Jebali, on notera trop de belles paroles et autres intentions : établissement de dialogue national sans exclusion, neutralité dans l’administration et dans les nominations, le raccourcissement du délai des élections, l’accélération de la mise en place des trois Instances (élections, magistrature et information), etc.
Comme on le constate, il s’agit là de revendications communes, théoriquement, à toutes les tendances politiques et aux composantes de la société civile. Mais voyons de plus près ce qu’il en est en réalité.
La nécessité d’un dialogue national fait l’unanimité, mais ce sont les deux principales composantes de la Troïka au pouvoir qui exigent la mise à l’écart de certaines parties, une mise à l’écart collective et en bloc de tous les Destouriens, plus particulièrement tous les adhérents à Nidaa Tounès. Et d’un !
Concernant la neutralité de l’administration, parlons-en. Toutes les nouvelles nominations ont été effectuées selon les appartenances et non selon le critère de la compétence. Un tour d’horizon des nouveaux gouverneurs, délégués, chefs des délégations spéciales municipales, présidents directeurs généraux, directeurs dans les administrations, etc.
Et à chaque fois qu’on creuse un peu dans les CV de ces nouveaux parvenus, on constate qu’ils appartiennent à plus de 80 pour cent à Ennahdha. La dernière nomination en date d’un PDG d’une grande société nationale à Bizerte est l’un des cas les plus flagrants puisqu’il est – ni plus ni moins – le mari d’une élue nahdhaouie à l’Assemblée nationale constituante. Et de deux !
Venons-en aux prochaines élections. Comment peut-on en rapprocher la date, à savoir avant l’été, alors que tout est fait pour retarder la création de l’Instance indépendante des élections ?!. Et tout le monde sait qu’il faudrait un minimum de huit mois après sa mise en place, pour organiser le scrutin. Autrement dit pas avant fin septembre 2013 si cette Instance était déjà fonctionnelle. Et de trois !
Pour ce qui est de la création des trois Instances indépendantes des élections, de la magistrature et de l’audiovisuel, on constate, là aussi, des clivages qui semblent insurmontables. Pourtant sans ces trois mécanismes, il ne peut y avoir de processus démocratique viable et fiable.
Rien que pour l’Instance de la magistrature, les membres du bloc d’Ennahdha refusent qu’elle bénéficie de l’indépendance, ce qui dépasse tout entendement. C’est à croire que le pouvoir exécutif en place se plait dans cette situation qu’il voudrait faire durer au maximum. Et de quatre !
Et comme on peut le constater, nous ne sommes plus là dans la pratique du double langage, mais carrément dans la contradiction flagrante entre ce qui est dit et ce qui est fait. D’ailleurs, la majorité des membres d’Ennahdha nous débitent, lors de leur passage sur les plateaux radiotélévisés des discours, théoriquement rassurants alors que dans la réalité, ils procèdent par des actes tout à fait différents.
Autre exemple frappant de ces contradictions. Les Nahdhaouis crient haut et fort qu’ils sont contre les violences d’où qu’elles viennent. Mais ils n’ont jamais condamné, d’une manière claire, les agissements de banditisme de ce qu’on appelle Ligues de protection de la révolution (LPR). Pire encore, ils n’arrêtent pas, aidés en cela par le CPR, de défendre leur existence au moment où tous les autres partis et toute la société civile rejettent ces LPR tout en réclamant, purement et simplement, leur dissolution.
Une autre contradiction relevée dans l’allocution de M. Jebali quand il se défend de toute imbrication entre Ennahdha et le gouvernement. Pourtant tout le monde sait qu’à titre d’exemple, Ahmed Néjib Chebbi a été approché par Rached Ghannouchi, chef du parti islamiste, avec qui il a eu une rencontre le 3 janvier 2013, afin de le convaincre de faire partie du gouvernement allant jusqu’à lui proposer, selon certaines versions, de choisir, lui et Maya Jribi, entre plusieurs portefeuilles ministériels.
En tout état de cause, l’allocution de M. Jebali et son annonce qu’il va s’en remettre avec sa proposition de remaniement à l’ANC, prouvent, si besoin est, que la Troïka se retrouve empêtrée dans de sérieuses difficultés, dues selon, les analystes, à cette manie d’Ennahdha et de son leader, Rached Ghannouchi de vouloir avoir la mainmise sur le pouvoir et, surtout, de vouloir le garder indéfiniment.
Cette allocution, faute de présentation de la nouvelle équipe gouvernementale, devait éclairer la lanterne de l’opinion publique sur le point de la situation et la tendance prévalant après les pourparlers marathoniens entre M. Jebali et les dirigeants des différents partis politiques sur la place, en plus, bien entendu, des tractations au sein de la Troïka.
Faute de ladite présentation, on s’attendait, au moins, à avoir une idée assez précise sur les tendances et les orientations de la prochaine étape de cette deuxième phase transitoire qui s’éternise, même si le chef du gouvernement affirme que son vœu le plus cher est de la raccourcir au maximum afin d’aboutir à l’objectif principal et final commun à tous les Tunisiens, en l’occurrence l’organisation de nouvelles élections démocratiques et transparentes pour doter le pays d’institutions définitives et de pouvoir légitime capable de mener la Tunisie à bon port.
M. Jebali s’est contenté de nous gaver de généralités et de données déjà connues. De belles paroles, certes, mais qui demeurent au stade de la théorie et de ce qui devrait être fait, chose lointaine de ce qui existe dans les faits.
Reconnaissant, pour la première fois, la formule de répartition selon les appartenances partisanes, tout en refusant d’appeler cela un gâteau, Hamadi Jebali oublie ou semble oublier que les élections du 23 octobre 2011 – et on ne le répètera jamais assez – n’étaient pas ce qu’on peut appeler des « législatives classiques » en temps ordinaire, mais il s’agissait d’un scrutin particulier pour l’émergence d’une Assemblée constituante chargée d’élaborer, dans une seconde étape transitoire, une Constitution et de faire asseoir les fondements d’institutions pour la phase définitive.
Le gouvernement de cette seconde phase transitoire, limitée au départ à un an, devait assurer la gestion des affaires courantes et non pas d’élaborer des stratégies de longue haleine allant jusqu’à dix, voire vingt ans.
Ce qu’il fallait à la Tunisie, c’était un gouvernement restreint de compétences dont les membres devaient s’engager à ne pas se présenter aux élections comme ce fut le cas pour l’équipe gouvernementale de Béji Caïd Essebsi.
Maintenant que le mal est fait, il faut penser à y remédier et sauver les meubles. On attendait des annonces dans ce sens de la part de M. Jebali, mais il n’en fut rien. Tout le monde est conscient que le remaniement va être de façade, à savoir éventuellement, des permutations et une entrée d’un nombre réduit de certaines personnes avides de pouvoir. Car, logiquement, on n’entre pas dans un gouvernement qui a fait ses limites et qui n’a pas de nouvelles orientations décisives.
Pour revenir au contenu de ce discours de Hamadi Jebali, on notera trop de belles paroles et autres intentions : établissement de dialogue national sans exclusion, neutralité dans l’administration et dans les nominations, le raccourcissement du délai des élections, l’accélération de la mise en place des trois Instances (élections, magistrature et information), etc.
Comme on le constate, il s’agit là de revendications communes, théoriquement, à toutes les tendances politiques et aux composantes de la société civile. Mais voyons de plus près ce qu’il en est en réalité.
La nécessité d’un dialogue national fait l’unanimité, mais ce sont les deux principales composantes de la Troïka au pouvoir qui exigent la mise à l’écart de certaines parties, une mise à l’écart collective et en bloc de tous les Destouriens, plus particulièrement tous les adhérents à Nidaa Tounès. Et d’un !
Concernant la neutralité de l’administration, parlons-en. Toutes les nouvelles nominations ont été effectuées selon les appartenances et non selon le critère de la compétence. Un tour d’horizon des nouveaux gouverneurs, délégués, chefs des délégations spéciales municipales, présidents directeurs généraux, directeurs dans les administrations, etc.
Et à chaque fois qu’on creuse un peu dans les CV de ces nouveaux parvenus, on constate qu’ils appartiennent à plus de 80 pour cent à Ennahdha. La dernière nomination en date d’un PDG d’une grande société nationale à Bizerte est l’un des cas les plus flagrants puisqu’il est – ni plus ni moins – le mari d’une élue nahdhaouie à l’Assemblée nationale constituante. Et de deux !
Venons-en aux prochaines élections. Comment peut-on en rapprocher la date, à savoir avant l’été, alors que tout est fait pour retarder la création de l’Instance indépendante des élections ?!. Et tout le monde sait qu’il faudrait un minimum de huit mois après sa mise en place, pour organiser le scrutin. Autrement dit pas avant fin septembre 2013 si cette Instance était déjà fonctionnelle. Et de trois !
Pour ce qui est de la création des trois Instances indépendantes des élections, de la magistrature et de l’audiovisuel, on constate, là aussi, des clivages qui semblent insurmontables. Pourtant sans ces trois mécanismes, il ne peut y avoir de processus démocratique viable et fiable.
Rien que pour l’Instance de la magistrature, les membres du bloc d’Ennahdha refusent qu’elle bénéficie de l’indépendance, ce qui dépasse tout entendement. C’est à croire que le pouvoir exécutif en place se plait dans cette situation qu’il voudrait faire durer au maximum. Et de quatre !
Et comme on peut le constater, nous ne sommes plus là dans la pratique du double langage, mais carrément dans la contradiction flagrante entre ce qui est dit et ce qui est fait. D’ailleurs, la majorité des membres d’Ennahdha nous débitent, lors de leur passage sur les plateaux radiotélévisés des discours, théoriquement rassurants alors que dans la réalité, ils procèdent par des actes tout à fait différents.
Autre exemple frappant de ces contradictions. Les Nahdhaouis crient haut et fort qu’ils sont contre les violences d’où qu’elles viennent. Mais ils n’ont jamais condamné, d’une manière claire, les agissements de banditisme de ce qu’on appelle Ligues de protection de la révolution (LPR). Pire encore, ils n’arrêtent pas, aidés en cela par le CPR, de défendre leur existence au moment où tous les autres partis et toute la société civile rejettent ces LPR tout en réclamant, purement et simplement, leur dissolution.
Une autre contradiction relevée dans l’allocution de M. Jebali quand il se défend de toute imbrication entre Ennahdha et le gouvernement. Pourtant tout le monde sait qu’à titre d’exemple, Ahmed Néjib Chebbi a été approché par Rached Ghannouchi, chef du parti islamiste, avec qui il a eu une rencontre le 3 janvier 2013, afin de le convaincre de faire partie du gouvernement allant jusqu’à lui proposer, selon certaines versions, de choisir, lui et Maya Jribi, entre plusieurs portefeuilles ministériels.
En tout état de cause, l’allocution de M. Jebali et son annonce qu’il va s’en remettre avec sa proposition de remaniement à l’ANC, prouvent, si besoin est, que la Troïka se retrouve empêtrée dans de sérieuses difficultés, dues selon, les analystes, à cette manie d’Ennahdha et de son leader, Rached Ghannouchi de vouloir avoir la mainmise sur le pouvoir et, surtout, de vouloir le garder indéfiniment.
Noureddine HLAOUI
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