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Tunisie – Ennahdha renonce à la Chariâa dans la Constitution, mais…
26/03/2012 | 1
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Tunisie – Ennahdha renonce à la Chariâa dans la Constitution, mais…
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Au moment où la polémique bat son plein partout, dans la rue, au sein de l’Assemblée nationale constituante, sur les plateaux des différentes chaînes de télévision et à travers les autres médias de la presse écrite et électronique, sur la question de la Chariâa, le parti Ennahdha au pouvoir vient de trancher sur ce point précis.
Des déclarations par-ci, d’autres par-là, laissant entendre que le parti islamiste a, enfin, pris une position claire et définitive sur le concept de la Chariâa et son éventuelle inscription dans les textes de la nouvelle Constitution à rédiger par les Constituants. Et c’est-ce qu’a tenu à expliciter et clarifier Rached Ghannouchi lors de la conférence de presse organisée, lundi après-midi, 26 mars 2012, au siège central d’Ennahdha.

Devant une assistance nombreuse de représentants de la presse, nationale et étrangère, Cheikh Rached, entouré de Fethi Ayadi, président de l’Instance constitutive du Parti, et de Sahbi Atig, chef du groupe parlementaire d’Ennahdha à la Constituante, a annoncé, d’entrée, que l’Instance constitutive s’est réunie et a rendu public un communiqué définissant la position officielle d’Ennahdha sur la controverse à propos de la Chariâa.

«Au vu de l’ampleur des divergences constatées autour de cette question et afin de barrer la route à ceux qui tentent de diviser le peuple tunisien entre partisans et opposants à la Chariâa, nous avons opté pour cette formule stipulant que le Parti d’Ennahdha se contente de l’inscription de l’article Premier à savoir : «La Tunisie est un pays libre, indépendant, souverain, ayant pour religion l’Islam, pour langue l’arabe et pour système, la République».
Il s’agit d’un point qui fait le consensus de tous les Tunisiens, et comme nous avons été adeptes et partisans du principe de consensus, nous ne pouvons qu’approuver cette approche consistant à nous contenter de l’article Premier de la Constitution de 1959, poursuit le leader du Mouvement islamiste.
Il faut cesser, ajoute M. Ghannouchi, de parler de terme « Chariâa », car pour nous la Chariâa, c’est l’Islam. En plus, il faut souligner que, suite à la connotation, parfois négative, collée au mot Chariâa à cause de ceux sui l’ont mal appliquée dans certains pays comme en Afghanistan, la faisant confondre avec «extrémisme » et « terrorisme », il est préférable de ne pas trop s’attacher à ce terme.
Et au fond, conclut Rached Ghannouchi, la Chariâa, c’est l’Islam. Et comme la Constitution est entamée avec cette notion mettant l’accent sur l’identité islamique et arabe de la Tunisie, cela est largement suffisant pour nous à Ennahdha qui avons voté cette décision après un long débat et un vote donnant lieu à 52 voix pour, une douzaine contre et entre 7 et 8 abstentions.

Le leader d’Ennahdha estime, également, qu’en tout état de cause, tout ce qui sera mentionné dans la Constitution, ne peut, logiquement, être contradictoire avec l’article Premier, c’est-à-dire le respect de l’identité et des valeurs islamiques.
D’où la nécessité de trouver les mécanismes adéquats et les garanties suffisantes pour préserver l’application de la Constitution, et la Cour constitutionnelle pourrait représenter un des principaux mécanismes en question.
Et puis, s’écrie M. Ghannouchi, tout le monde est d’accord que près de 90% de nos lois et autres textes législatifs sont tirés ou ont pour source la Chariâa. Et aussi, nous ne voulons pas que la Chariâa soit imposée aux Tunisiens d’en haut. Au contraire, il faut que ce soit les citoyens qui la réclament.

Une question significative est venue de la journaliste de l’hebdomadaire d’El Fejr, organe d’Ennahdha. Elle a commencé, d’abord, par dévoiler l’existence d’un mécontentement chez une bonne frange de la base du parti islamiste, surprise par la décision du Parti et qui aurait préféré que le principe soit bien mentionné dans le texte de la Constitution, avant d’ajouter qu’avec le seul article Premier, cela n’a pas empêché le pouvoir, par le passé, de réprimer les femmes voilées et les prieurs dans les mosquées.
En réponse à des questions concernant les pratiques des Salafistes et les appels à tuer les Juifs et à tuer Béji Caïd Essebsi, Rached Ghannouchi a tenu à préciser que les Juifs n’ont jamais été aussi bien protégés que sous les régimes islamistes, tout en expliquant que les manifestations et les rassemblements et la liberté d’expression sont autorisés et garantis tans qu’il n’y a pas de recours à la violence, de diffamations ou d’insultes ou encore des appels à la haine ou aux violences.
Dans le même ordre d’idées, M. Ghannouchi a indiqué qu’il n’écarte pas la possibilité d’existence de parties qui veulent créer la discorde et diviser les Tunisiens en deux.

Après cette conférence de presse, on en sort avec un certain nombre de remarques. Devant la vigilance de la société civile et de la classe des intellectuels, on ressent clairement la volonté d’Ennahdha de calmer le jeu et d’adopter, en apparence, un profil bas alors que si on lit entre les lignes, on s’aperçoit que les membres d’Ennahdha ont plus d’un tour dans leur sac.
En effet, Rached Ghannouchi dit clairement et en substance que « la Constitution va être fondée, d’abord, sur l’Islam et ensuite, sur les autres valeurs dont la démocratie et la liberté ».
D’ailleurs en lisant attentivement le communiqué de l’Instance constitutive d’Ennahdha, on constate que tout en acceptant l’article Premier, des réserves d’usage ont été prise pour laisser la porte ouverte, le moment venu, à toutes les interprétations.

Sinon, comment explique l’existence de certaine phrases dans le communiqué comme : « L’Islam est la religion de l’Etat avec tout ce que cela a et entraîne comme implications ».
Les portes restent donc ouvertes et toutes les évolutions sont possibles dans un climat empreint de tensions, de suspicions et d’incertitudes, au moment où la Constituante se penche sur la rédaction du texte de la constitution, un moment crucial et qui engage l’avenir de la Tunisie dans un sens comme dans l’autre.

Noureddine HLAOUI
26/03/2012 | 1
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