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Tunisie – Les préoccupations du citoyen, dernier souci du politicien ?
02/06/2011 |
min
Tunisie – Les préoccupations du citoyen, dernier souci du politicien ?
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Les partis politiques, dont le nombre dépasse aujourd’hui les quatre-vingts, sont très actifs ces dernières semaines, ce qui est fort compréhensible eu égard aux échéances électorales qui les attendent.
Mais autant nos partis sont actifs sur le plan politique et multiplient les initiatives, les déclarations et les manœuvres avec un doigté évident, autant ils brillent par un mutisme flagrant et affligeant quand il s’agit de prendre position sur des questions qui sortent des sentiers battus de la politique politicienne pour intéresser le quotidien des citoyens, quotidien qui est surchargé de préoccupations à caractère économique et social, et dans lequel les questions strictement politiques, malgré leur importance, ne sont pas naturellement prioritaires.


Cette approche réductrice de la politique a eu pour conséquence la montée du mécontentement au sein de l’opinion publique qui sent la faille s’élargir entre la rue et les partis politiques qui étaient censés coller à ses préoccupations et lui apporter des réponses claires, capables de dissiper ses craintes et ses angoisses. Si rien n’est entrepris pour être mieux à l’écoute de la rue, les partis politiques risquent de payer très cher le désamour des Tunisiens.
Ceci, bien entendu, n’hôte rien au rôle que jouent et que doivent continuer à jouer les partis politiques dans la Tunisie nouvelle. Il doit être clair, en effet, que la construction démocratique et la gestion politique du pays ne pourra se faire en dehors des partis politiques. Ceux qui minimisent le rôle et l’apport des organisations politiques, et font l’apologie des indépendants et des franc-tireurs ne font que le diagnostic d’une situation particulière et douloureuse antérieure sans réussir à se projeter dans l’avenir. De leur côté, les partis politiques doivent aussi se projeter dans le futur de ce pays, un futur dans lequel ils sont appelés à apporter des réponses raisonnables et ponctuelles à des sujets et des questions précis, loin des discours vagues et des slogans pompeux qui peuvent mobiliser les foules pour un moment mais qui finissent inéluctablement par lasser.

Lors d’une conférence de presse tenue mardi pour annoncer la création d’un nouveau pôle démocratique moderniste regroupant une douzaine de partis politiques et des indépendants, toutes les questions politiques et les principes de la démocratie, de l’alternance, de la modernité, de la liberté, de la république et autres ont été étayés. Mais à aucun moment, les questions économiques ou sociales n’ont été abordées. Cela ne veut pas dire que la création de ce pôle n’est pas une bonne initiative. Cela veut surtout dire que cette nouvelle alliance se noue, encore une fois, entre férus de la politique, en dehors des préoccupations du Tunisien de base.
Depuis lundi, le Parti d’Ennahdha crie au scandale et boycotte les travaux de la Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique pour contester le report des élections de l’Assemblée constituante. Mais aucun dirigeant de ce mouvement politique, réputé proche des classes populaires, n’a fait de déclaration sur des questions plus terre-à-terre, touchant au chômage, à la pauvreté, au développement régional ou autres, d’une manière pratique et concrète.

D’ailleurs, les formations politiques tunisiennes ont bizarrement passé sous silence la participation de la Tunisie, mais surtout les résultats de cette participation, à la dernière session du G8. C’est comme si la dette, le développement et la relance économique étaient des dossiers du seul ressort du gouvernement, fut-il provisoire. Seul le parti Ettahrir a publié un communiqué à ce propos. Mais là aussi, le discours était franchement politique, anachronique, sans rapport avec l’économie ni avec toute forme de rationalité d’ailleurs.
Nos partis se sont aussi inscrits aux abonnés absents quand la menace a plané sérieusement sur la récolte céréalière. De même, il a fallu que l’Union des agriculteurs s’allie aux syndicalistes des unions régionales du travail de l’UGTT pour suppléer les forces de la sécurité intérieure mobilisées sur les frontières libyennes, organiser la surveillance des champs de céréales et assurer le bon déroulement de la récolte.

On pourrait dire la même chose s’agissant des examens nationaux, notamment l’épreuve du baccalauréat qui se profile à l’horizon. Le ministère de l’Education a fait appel aux parents d’élèves, aux comités de sauvegarde de la révolution à l’échelle locale pour prévoir la surveillance des alentours des lycées et des centres d’examens et prévenir les dépassements éventuels. Là encore, les examens qui sont la hantise des familles tunisiennes, ne semblent pas préoccuper les partis politiques.

Le danger d’une telle attitude des partis politiques ne réside pas uniquement dans le désamour qui pourrait s’installer dans les rapports entre la société civile et la société politique. Le risque majeur de cette désaffection des partis politiques par les citoyens pourrait s’exprimer par une nonchalance et une passivité méprisante. A moyen terme et dans des cas extrêmes, ce risque pourrait se traduire par des mouvements de groupe violents et saccageurs, parce que mal encadrés et mal canalisés par ceux qui ont la charge de le faire.
02/06/2011 |
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