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Le schéma de Jalloul Ayed pour financer la Tunisie nouvelle
14/04/2011 |
min
Le schéma de Jalloul Ayed pour financer la Tunisie nouvelle
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La Tunisie postrévolutionnaire ne se trouve pas, selon les différents avis nationaux et internationaux, dans une position confortable dans le sens où la stabilité socio-économique peine à être retrouvée. Comment faire pour redémarrer la dynamique économique ? Comment faire pour avoir le rythme nécessaire d’investissements et de création de projets qui sont de nature à faire redémarrer la croissance ? Quelle réforme faut-il pour le système financier et bancaire en Tunisie ?
Autant de questions et bien d’autres auxquelles le ministre des Finances de l’actuel gouvernement transitoire, Jalloul Ayed, a essayé de répondre de la manière la plus simplifiée et la plus transparente dans une interview accordée à Business News.

Bien qu’il s’agissait d’un jour férié (samedi 9 avril 2011) et de son agenda trop chargé (il revenait de la cérémonie au Carré des Martyrs et devait partir en voyage aux Etats-Unis d’Amérique), Jalloul Ayed nous a reçus à son Bureau dans un cadre très simple, sans grand faste, mais très chaleureux avec un café turc et une bouteille d’eau minérale.
Très à l’aise et maîtrisant parfaitement son sujet, Jalloul Ayed confirme sa réputation : une haute compétence internationale ayant fait ses preuves en Europe, plus particulièrement en Grande Bretagne, et au Maroc où il est réputé d’y avoir largement contribué à la mise en œuvre du système financier et bancaire.
Il a commencé par affirmer que tous les Tunisiens sont appelés à assumer ces difficultés, car elles représentent peu par rapport aux martyrs de la révolution qui ont sacrifié leur vie pour la liberté.
La mobilisation de tous est, néanmoins, nécessaire pour y faire face. Dans le cas contraire, la situation deviendrait dramatique pour des centaines de milliers de salariés et constituerait un obstacle sérieux à la transition démocratique.

En l’absence de richesses naturelles, ajoute t-il, l’économie tunisienne est fondée, presqu’entièrement sur la compétence et l’intelligence des ressources humaines du pays sans oublier les relations de confiance qu’il faut, impérativement, établir avec les entreprises et partenaires internationaux qui travaillent et investissent en Tunisie.
Concernant le développement des marchés des capitaux, le ministre estime qu’il faut trouver des financements à moyen et à long termes et exploiter les opportunités pour le lancement des grands projets qui exigent, toutefois, un système financier capable de les accompagner.
Mais le plus sûr demeure le développement des marchés primaires et secondaires grâce à des adjudications hebdomadaires et à une action efficace du côté de l’offre et de la demande. Et à la longue, on peut aboutir à une stabilisation avec une émission régulière sur lesdits marchés des capitaux, ce qui pourrait faire le jeu des banques qui verraient d’un bon œil la promotion d’une telle dynamique.

A propos de la participation de l’Etat dans les projets d’investissement, Jalloul Ayed est convaincu qu’il doit passer du budgétaire au dynamique et de distinguer entre le social et l’économique. Pour ce, deux grands véhicules d’investissement émergent.
Tout d’abord, il faut lancer la Caisse de dépôts et de consignations qui servira pour le développement des grands projets, notamment les réseaux de chemins de fer, les autoroutes, les ports et aéroports, les zones industrielles, les centrales…
Pour les privés, M. Ayed préconise la création d’un fonds de développement « extrêmement puissant pour la création d’emploi ». Il s’agit de la « mise initiale », plus communément connue dans le milieu des affaires anglo-saxon, par le « Seed money » qui sera mis en place avec justement une mise de base de 2,5 milliards de dinars. Ce fonds aura pour ambition de renforcer les possibilités d’investissement en Tunisie.
Plus optimiste encore, le ministre des Finances estime que cette mise peut être doublée pour atteindre cinq milliards de dinars, si l’on parvient à convaincre les instances financières internationales d’y adhérer.

Ce « Seed money » est, pour Jalloul Ayed, la manne de l’avenir qui va métamorphoser l’économie tunisienne et booster le marché de l’emploi.
En effet, par un jeu schématique très simple, le ministre nous a fait une démonstration qui laisse rêveur. Un privé peut obtenir un crédit de ce fonds de 5, 10, 20 ou même 50 millions de dinars, selon la nature de son projet en matière d’infrastructure, de High Tech ou de quelconque autre PME.
Disposant ainsi d’une partie de crédit, le promoteur est tenu de compléter le financement de son projet par une partie capital provenant soit de ses fonds propres, soit des banques, soit des marchés de capitaux pour doubler le montant du crédit obtenu auprès de ce fonds.
Et pour M. Ayed, si le projet est minutieusement élaboré avec un business plan solide et des mécanismes de suivi rigoureux, il peut, à partir d’un capital crédit de 50 MDT, parvenir à un capital total de 300 millions de dinars, ce qui lui permet d’offrir un minimum de quatre mille emplois directs et 12 mille autres indirects.

Ainsi, si 50 MDT, puisés dans le « Seed money », drainent 16 mille emplois, faites le compte avec la mise de 5 milliards de dinars s’exclame triomphalement le ministre !
Encore plus optimiste, M. Ayed est persuadé que la Tunisie peut devenir un grand centre off-shore pour accueillir les fonds d’investissement de tous genres dont notamment la finance islamique, la gestion des actifs, la réassurance, les microfinances, etc.
Pour ce, il faut, absolument, éliminer les obstacles et assurer les conditions de réussite dont notamment ceux à caractère juridique.
Et quand il parle de ce volet, le ministre devient très enthousiaste : « On a tout pour réussir. A titre d’exemple, Singapour, avec ses quelque 690 km², jongle avec 224 milliards de dollars. Il n’y a pas de raison que la Tunisie n’en fasse pas autant et même davantage en doublant ce montant ».
Géographiquement, stratégiquement et humainement, la Tunisie est la mieux placée parmi les pays de la région pour réussir ce pari. L’argent vient dès qu’il y a une plateforme solide et fiable pour l’accueillir.
Et là, Jalloul Ayed revient à l’idée de faire de la Tunisie un centre de la finance islamique. « Il y a un argent fou à puiser dans les banques islamiques, plus précisément la Banque islamique de développement » assure t-il avant d’ajouter que si la Tunisie parvient à lever, par exemple, rien que 0,001% de l’argent qui circule dans les milieux de la finance islamique, des sommes de rêve renfloueraient les caisses et les projets ».

Redescendant un peu sur terre, le ministre des Finances estime que tout cela est bien beau à condition de réunir les conditions adéquates de réussite à savoir, notamment l’instauration du concept du professionnalisme, le changement des mentalités, le suivi rigoureux dans l’exécution des projets et le recours à des contrôleurs réputés et hautement compétents, quitte à les payer au prix fort.
14/04/2011 |
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