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Les promesses non tenues d'Accor en Tunisie

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Le groupe hôtelier français Accor quitte la Tunisie, confirmant ainsi les signes avant coureurs qui étaient apparus ces derniers temps.
Le 31 mars 2010, Accor rétrocèdera à leur société propriétaire les deux derniers hôtels qu’il exploitait encore en gestion pour compte : le Sofitel Palm Beach Tozeur et le Sofitel Palm Beach Djerba, après avoir déjà rétrocédé le 1er janvier dernier le Sofitel Saphir Palace à Yasmine Hammamet. Ce retrait intervient également après l’abandon progressif ces dernières années de l’exploitation des hôtels sous la marque Coralia à Hammamet, Sousse, Monastir et Djerba et ceux du CTKD, l’année dernière, gérés sous l’enseigne Mercure, Gammarth, El Mechtel, Diar El Andalous et Sfax..
Jusqu’en 2008, le groupe Accor comptait encore une dizaine d’hôtels en Tunisie (2447 chambres exactement) et avait annoncé, plusieurs fois et en grandes pompes, des investissements de taille : la reprise du Sahara Palace à Nefta pour en faire un Sofitel de 106 lits, l’édification d’un Sofitel Thalassa de 264 lits avec un centre de thalassothérapie à Djerba (projet Lella Hadhria) et deux hôtels sur l’avenue Mohamed V à Tunis (un Ibis de 125 chambres et un Novotel de 127 chambres) dotés d’une académie de formation professionnelle.
On passera outre les monts et merveilles promis début 2001 qui portaient sur l’édification d’un hôtel face à l’aéroport Tunis-Carthage et de toute une série d’Ibis et de Novotel sur le littoral tunisien. De même, Accor s’était engagé à bâtir un palais des congrès à Tunis supposé être le plus grand d’Afrique en termes de capacité et conçu à l’image des projets similaires du groupe à Sydney (Darling Harbour) ou encore Casablanca.
Accor avait même annoncé sa volonté d’investir à Tabarka et à Bizerte. «Projets annulés suite à la crise consécutive au 11 Septembre 2001 », s’était plus tard justifié le groupe.
Plus récemment avec le CTKD (Consortium tuniso-koweïtien de développement), l’échec du partenariat a été retentissant en ce sens qu’Accor avait été sommé, en avril 2009, de quitter les ex-Abou Nawas qu’il exploitait sous le label Mercure (le Mechtel à Tunis, le Diar El Andalous à Sousse et l’ex Abou Nawas à Sfax). De même que le projet d’ouverture d’un établissement sous l’enseigne M. Gallery sur le site de l’ancien Abou Nawas Gammarth est complètement tombé à l’eau (projet repris aujourd’hui par la chaîne Mövenpick).
Idem pour le projet annoncé de faire du Saphir Palace à Yasmine Hammamet un hôtel Pullman, la marque haut de gamme d’Accor positionnée sur le segment MICE et qui ne s’est jamais concrétisé.
La Tunisie touristique n’a pas la mémoire courte : le 20 avril 2001, Gérard Pélisson, cofondateur du groupe, avait déclaré à la presse tunisienne : « notre développement est (…) d’intégrer toutes les forces commerciales de notre groupe pour développer mais également revaloriser le patrimoine touristique tunisien ».
Lors de son voyage en Tunisie, il était accompagné d’un certain Vladimir Evtushenkov, président de Sistema, présenté comme l’un des plus importants groupes russes et intéressé –paraît-il- par des investissements en Tunisie à travers sa filiale Intourist, à l’époque premier tour-opérateur en Russie. La montagne a accouché d’une souris !
Mais Accor n’en est pas à son coup d’essai. Le tourisme tunisien n’a également pas oublié qu’à la fin des années 80, Accor avait déjà provoqué un tollé en rachetant pour une bouchée de pain les ex-hôtels Tanit de la SHTT (à l’époque de sa privatisation) pour ensuite spéculer sur leur valeur immobilière et les revendre, empochant au passage de belles marges bénéficiaires. Dix ans après, on avait jugé bon de savoir tourner la page et faire table rase du passé.
Qu’il y ait eu des divergences entre les différents intervenants et les différents participants au tour de table (THR et STI ainsi que plusieurs banques locales) passe encore, car dans le milieu des affaires, cela relève du business traditionnel.
Mais que tous les projets aient capoté sans exception, cela relève de l’incroyable ! Lors d’une conférence de presse, tenue à Tunis il y a quelques années, Thierry De Jaham, directeur général du groupe Accor pour l’Egypte, l’Algérie et la Tunisie avait annoncé 60 MD d’investissements en Tunisie, malgré des pertes de 20 millions d’euros sur le marché !
En tout état de cause, la Tunisie touristique était en droit d’attendre d’Accor de la valeur ajoutée, que le groupe fasse bénéficier la destination de son know-how.
L’Etat tunisien, qui octroie des avantages très attractifs aux investisseurs étrangers, attendait –légitimement- qu’Accor participe à la création d’emplois, fasse profiter la destination de son réseau commercial et surtout respecte les investissements promis : 35 millions de dinars pour le complexe de l’avenue Mohamed V à Tunis, 16 MDT pour la rénovation du Sahara Palace à Nefta et 31 MDT pour le Sofitel Thalassa de Djerba.
Or, d’investisseur, Accor s’est transformé en simple gestionnaire d’hôtels. Comble du comble, il a même misé sur un tour-opérateur tunisien installé à Paris (1001 Soleils, pour ne pas le citer) pour remplir une partie de ses hôtels balnéaires en Tunisie !
La question qui se pose donc aujourd’hui est la suivante : pourquoi un groupe de l’envergure d’Accor qui gère 4000 hôtels et 500.000 chambres dans 90 pays n’a-t-il pas réussi en Tunisie ? Rentabilité insuffisante ? RBE pas assez élevé ?
Chez certains anciens d’Accor, on considère que l’échec du groupe hôtelier français est consécutif à de mauvaises négociations de base avec ses partenaires hôteliers tunisiens. D’autres observateurs estiment, au contraire, que le groupe est venu en Tunisie la fleur au fusil, s’attendant à ce que le privé et l’administration leur ouvrent grands les bras et leur concèdent tous leurs caprices, comme cela s’est passé sous d’autres cieux !
Or, c’était méconnaître la Tunisie qui a, certes, une tradition d’accueil et d’ouverture mais qui ne tolère en aucune manière que l’on empiète sur ses principes économiques.
Au jour d’aujourd’hui, le projet des deux hôtels sur l’avenue Mohamed V est en train de prendre forme, certainement pas grâce aux fonds du groupe Accor mais grâce à la STI (société Tanit International, filiale de la BIAT).
Comme quoi, la machine hôtelière tunisienne n’est nullement à la merci d’un grain de sable.
Le 31 mars 2010, Accor rétrocèdera à leur société propriétaire les deux derniers hôtels qu’il exploitait encore en gestion pour compte : le Sofitel Palm Beach Tozeur et le Sofitel Palm Beach Djerba, après avoir déjà rétrocédé le 1er janvier dernier le Sofitel Saphir Palace à Yasmine Hammamet. Ce retrait intervient également après l’abandon progressif ces dernières années de l’exploitation des hôtels sous la marque Coralia à Hammamet, Sousse, Monastir et Djerba et ceux du CTKD, l’année dernière, gérés sous l’enseigne Mercure, Gammarth, El Mechtel, Diar El Andalous et Sfax..
Jusqu’en 2008, le groupe Accor comptait encore une dizaine d’hôtels en Tunisie (2447 chambres exactement) et avait annoncé, plusieurs fois et en grandes pompes, des investissements de taille : la reprise du Sahara Palace à Nefta pour en faire un Sofitel de 106 lits, l’édification d’un Sofitel Thalassa de 264 lits avec un centre de thalassothérapie à Djerba (projet Lella Hadhria) et deux hôtels sur l’avenue Mohamed V à Tunis (un Ibis de 125 chambres et un Novotel de 127 chambres) dotés d’une académie de formation professionnelle.
On passera outre les monts et merveilles promis début 2001 qui portaient sur l’édification d’un hôtel face à l’aéroport Tunis-Carthage et de toute une série d’Ibis et de Novotel sur le littoral tunisien. De même, Accor s’était engagé à bâtir un palais des congrès à Tunis supposé être le plus grand d’Afrique en termes de capacité et conçu à l’image des projets similaires du groupe à Sydney (Darling Harbour) ou encore Casablanca.
Accor avait même annoncé sa volonté d’investir à Tabarka et à Bizerte. «Projets annulés suite à la crise consécutive au 11 Septembre 2001 », s’était plus tard justifié le groupe.
Plus récemment avec le CTKD (Consortium tuniso-koweïtien de développement), l’échec du partenariat a été retentissant en ce sens qu’Accor avait été sommé, en avril 2009, de quitter les ex-Abou Nawas qu’il exploitait sous le label Mercure (le Mechtel à Tunis, le Diar El Andalous à Sousse et l’ex Abou Nawas à Sfax). De même que le projet d’ouverture d’un établissement sous l’enseigne M. Gallery sur le site de l’ancien Abou Nawas Gammarth est complètement tombé à l’eau (projet repris aujourd’hui par la chaîne Mövenpick).
Idem pour le projet annoncé de faire du Saphir Palace à Yasmine Hammamet un hôtel Pullman, la marque haut de gamme d’Accor positionnée sur le segment MICE et qui ne s’est jamais concrétisé.
La Tunisie touristique n’a pas la mémoire courte : le 20 avril 2001, Gérard Pélisson, cofondateur du groupe, avait déclaré à la presse tunisienne : « notre développement est (…) d’intégrer toutes les forces commerciales de notre groupe pour développer mais également revaloriser le patrimoine touristique tunisien ».
Lors de son voyage en Tunisie, il était accompagné d’un certain Vladimir Evtushenkov, président de Sistema, présenté comme l’un des plus importants groupes russes et intéressé –paraît-il- par des investissements en Tunisie à travers sa filiale Intourist, à l’époque premier tour-opérateur en Russie. La montagne a accouché d’une souris !
Mais Accor n’en est pas à son coup d’essai. Le tourisme tunisien n’a également pas oublié qu’à la fin des années 80, Accor avait déjà provoqué un tollé en rachetant pour une bouchée de pain les ex-hôtels Tanit de la SHTT (à l’époque de sa privatisation) pour ensuite spéculer sur leur valeur immobilière et les revendre, empochant au passage de belles marges bénéficiaires. Dix ans après, on avait jugé bon de savoir tourner la page et faire table rase du passé.
Qu’il y ait eu des divergences entre les différents intervenants et les différents participants au tour de table (THR et STI ainsi que plusieurs banques locales) passe encore, car dans le milieu des affaires, cela relève du business traditionnel.
Mais que tous les projets aient capoté sans exception, cela relève de l’incroyable ! Lors d’une conférence de presse, tenue à Tunis il y a quelques années, Thierry De Jaham, directeur général du groupe Accor pour l’Egypte, l’Algérie et la Tunisie avait annoncé 60 MD d’investissements en Tunisie, malgré des pertes de 20 millions d’euros sur le marché !
En tout état de cause, la Tunisie touristique était en droit d’attendre d’Accor de la valeur ajoutée, que le groupe fasse bénéficier la destination de son know-how.
L’Etat tunisien, qui octroie des avantages très attractifs aux investisseurs étrangers, attendait –légitimement- qu’Accor participe à la création d’emplois, fasse profiter la destination de son réseau commercial et surtout respecte les investissements promis : 35 millions de dinars pour le complexe de l’avenue Mohamed V à Tunis, 16 MDT pour la rénovation du Sahara Palace à Nefta et 31 MDT pour le Sofitel Thalassa de Djerba.
Or, d’investisseur, Accor s’est transformé en simple gestionnaire d’hôtels. Comble du comble, il a même misé sur un tour-opérateur tunisien installé à Paris (1001 Soleils, pour ne pas le citer) pour remplir une partie de ses hôtels balnéaires en Tunisie !
La question qui se pose donc aujourd’hui est la suivante : pourquoi un groupe de l’envergure d’Accor qui gère 4000 hôtels et 500.000 chambres dans 90 pays n’a-t-il pas réussi en Tunisie ? Rentabilité insuffisante ? RBE pas assez élevé ?
Chez certains anciens d’Accor, on considère que l’échec du groupe hôtelier français est consécutif à de mauvaises négociations de base avec ses partenaires hôteliers tunisiens. D’autres observateurs estiment, au contraire, que le groupe est venu en Tunisie la fleur au fusil, s’attendant à ce que le privé et l’administration leur ouvrent grands les bras et leur concèdent tous leurs caprices, comme cela s’est passé sous d’autres cieux !
Or, c’était méconnaître la Tunisie qui a, certes, une tradition d’accueil et d’ouverture mais qui ne tolère en aucune manière que l’on empiète sur ses principes économiques.
Au jour d’aujourd’hui, le projet des deux hôtels sur l’avenue Mohamed V est en train de prendre forme, certainement pas grâce aux fonds du groupe Accor mais grâce à la STI (société Tanit International, filiale de la BIAT).
Comme quoi, la machine hôtelière tunisienne n’est nullement à la merci d’un grain de sable.
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