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Tunisie - Le système fiscal souffrirait-il de lacunes ?
02/11/2009 | 1
min
Tunisie - Le système fiscal souffrirait-il de lacunes ?
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Plusieurs économistes s’interrogent sur le système fiscal tunisien et son implication dans la faiblesse du flux d’IDE (investissements directs étrangers). Ils lui attribuent une part de responsabilité, notamment en ce qui concerne l'opportunité de l'imposition des bénéfices provenant de l'exportation et ses effets sur l'attraction des IDE.
D’autres économistes pensent le contraire et citent les études de plusieurs institutions internationales qui soutiennent que les avantages fiscaux ne sont pas déterminants pour l'attraction des IDE. Qu’en est-il vraiment ?

Une étude universitaire réalisée récemment arrive à la conclusion que « la Tunisie dispose d'un système fiscal de droit commun très moderne dans sa structure, dans le sens où elle a institué la T.V.A depuis 1988 en tant que principal impôt indirect, l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés depuis 1990 en matière d’impôts directs.
Toutefois, cette législation a besoin d'une mise à niveau, aussi bien en ce qui concerne les principes d'imposition que les règles d'assiette, qui doivent être harmonisés avec la fiscalité des pays développés ».
Les chercheurs ajoutent que : « par ces temps de mondialisation et de concurrence internationale poussée à l’extrême, les performances d'un Etat, à tous égards, notamment en ce qui concerne les possibilités d'attraction des IDE, passeraient par plusieurs facteurs, y compris sa législation fiscale qui, sans besoin d'être une fiscalité privilégiée, constitue, au même titre que les autres produits et services, un produit à vendre, qui se doit d'être compétitif face aux législations fiscales des autres pays».

Par ailleurs, le check-up par ces spécialistes du système fiscal tunisien aboutit à la conclusion que : « même après l’introduction de la réforme en 1990, les problèmes des impôts directs qui étaient liés aux tarifs d'imposition et à l'assiette des impôts sont demeurés posés et dans les mêmes conditions, sinon qu’ils se sont aggravés, surtout si on considérait les améliorations de l’environnement économique international sans frontières ni barrières douanières, donc plus ouvert à la concurrence et un droit fiscal comparé plus favorable.
En effet, en matière de taux d’imposition, et même si ces derniers ont passé respectivement de 68% pour les personnes physiques et de 54% pour les personnes morales à un maximum de 35%, une telle baisse était plutôt superficielle, dans le sens où les taux réels, c'est-à-dire les prélèvements par rapport au résultat économique, sont réellement supérieurs à 35% en prenant en considération les charges non déductibles, tels que les amortissements exclus du droit à déduction (les terrains, y compris ceux occupés par les carrières, les fonds de commerce, etc.), les provisions non admises en déduction, les pertes fiscales non reportables, etc. La question tendrait à s’aggraver si on tenait compte des redressements fiscaux dus notamment à l’absence ou à l’imprécision des textes ».

En ce qui concerne l'assiette de l'impôt, ces spécialistes pensent que : « le système fiscal tunisien continue aujourd’hui encore à souffrir des lacunes d’avant la réforme de 1990. La législation tunisienne en la matière se trouve devancée dans ce cas, y compris par les systèmes fiscaux qui continuent aujourd’hui encore à gérer les anciens impôts qui existaient en Tunisie avant la réforme de 1990 ».
Ils ajoutent que : « si on considérait les provisions qui constituent des charges à constater obligatoirement, faute de quoi le bénéfice distribué serait considéré fictif au sens des dispositions combinées des articles 287 et 289 du code des sociétés commerciales, la législation tunisienne est demeurée très conservatrice en la matière, voire à la traîne des législations africaines, pays de l’UMA compris. Dans ces pays, les provisions, toutes formes confondues, y compris celles ayant le caractère d’un passif réel, constituent des charges déductibles au même titre que le reste des charges d’exploitation, sans condition aucune et peuvent de ce fait avoir pour conséquence, soit la création, soit l’aggravation d’un déficit fiscal. La législation tunisienne ne reconnaît que partiellement les provisions, dans le sens où seules les provisions pour dépréciation du compte clients, les provisions pour dépréciation du stock destiné à la vente et les provisions pour dépréciation des actions cotées sont admises en déduction dans certaines limites et sous réserve de l’observation de conditions draconiennes, ajouté à des conditions de forme, qui, si le contribuable n’est pas avisé, risqueraient de remettre en cause le droit de déduction ».

Il ressort donc de cette analyse que c’est plutôt le régime fiscal tunisien qui serait derrière la faiblesse de l’attraction de la destination Tunisie pour les IDE et, non, le taux d’imposition des bénéfices. D’autres évaluations seraient nécessaires pour confronter les conclusions et asseoir les rectifications qu’il faut pour redresser la barre. En clair, et si l’on comprend bien ces spécialistes, la Tunisie pourrait attirer davantage d’IDE si l’on assouplit davantage la fiscalité.

Ces interrogations, légitimes du reste, méritent une profonde analyse. Cela étant, il est bon également de se référer aux différents rapports d’institutions internationales, telle que la Banque mondiale et de constater que les avantages fiscaux ne sont pas déterminants pour l'attraction des IDE, dans le sens où ces derniers sont plutôt conditionnés par d'autres facteurs, tels que la stabilité politique, le coût et la qualification de la main-d'œuvre, la qualité des infrastructures, la proximité des marchés, l’accès aux nouvelles technologies, etc.

A titre de confirmation de ce qui précède, certains pays émergents ont connu une progression importante des IDE, alors que leurs systèmes fiscaux soumettent à l'impôt à la fois les bénéfices provenant de l'exportation et des dividendes. La Tunisie, pour sa part, a choisi d’exonérer à la fois les bénéfices provenant de l'exportation et les dividendes.
Les statistiques montrent par exemple que la Chine caracole depuis des années en tête des pays bénéficiant des IDE. Elle a reçu en 2005 plus de 72 milliards de dollars US. Pourtant, la Chine soumet les bénéfices provenant de l’exportation à un taux d’impôts de 33%. De même pour le Brésil qui a reçu la même année plus de 15 milliards de dollars et dont le taux d’impôts s’élève à 34 %.
Il appert donc que l’attraction des IDE n’est pas fonction des avantages fiscaux mais plutôt d’autres facteurs qu’il faudrait chercher, étudier et développer.

Au vu de ces différentes théories et opinions qui s’affrontent, il apparait clair qu’un débat devrait s’ouvrir entre les différentes parties prenantes : investisseurs, fiscalistes, ministère des Finances, ministère du Développement pour aboutir à une réflexion profonde et une fiscalité avantageuse pour la Tunisie, Etat, entreprises et investisseurs.

02/11/2009 | 1
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