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Tunisie - Accor / CTKD : éclaircissements sur un divorce
16/04/2009 | 1
min
Tunisie - Accor / CTKD : éclaircissements sur un divorce
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L’un représentait le fleuron de l’hôtellerie tunisienne. L’autre est une référence dans le tourisme mondial. Quand ils ont annoncé, en décembre 2005, leur mariage, les observateurs ont dit banco.
Trois ans après, patatras et voilà qu’on annonce un divorce. Chacun déclare avoir claqué la porte devant l’autre.
Qu’en est-il vraiment ? Que s’est-il passé ? Quelques éclaircissements sur un divorce qui passera devant les tribunaux tunisiens et qui fera encore parler de lui.


Dans les années 1980 et 1990, le Consortium Tuniso-Koweïtien de Développement représentait ce qu’il y a de plus chic comme hôtels en Tunisie. La réputation de ses Abou Nawas à Tunis, à Hammamet, à Gammarth, ou à Sousse, dépassait les frontières. Les unités attiraient les plus grandes vedettes et hébergeaient les présidents de la République.
Mais il est plus facile de devenir premier que de le demeurer. Face à la concurrence de plus en dure, au professionnalisme de plusieurs hôtels haut de gamme et à un certain 11-Septembre, Abou Nawas commençait à battre de l’aile. La direction et les équipes n’ayant pas réussi à se mettre à niveau en rapport aux nouveaux standards et faire face aux nouvelles exigences, le management a décidé en 2003 d’adopter une nouvelle stratégie pour ses sept hôtels.
La nouvelle stratégie tourne autour de la diversification des investissements et au changement des méthodes de gestion des hôtels avec le concours de partenaires stratégiques internationaux et expérimentés. Elle tourne également autour de la vente pure et simple de quelques unités. Ce sera notamment le cas de l’Abou Nawas Tunis cédé aux Libyens de Laico.

Il conclut en parallèle, en décembre 2005, avec le groupe ACCOR International des contrats de gestion pour compte de quatre hôtels stratégiques à savoir Gammarth, El Mechtel, Diar El Andalous et Sfax.
Le mariage fut alors fêté en grandes pompes à Paris et à Tunis.
Cheikh Mohamed Jarrah Sabbah, président du Conseil d’administration du CTKD, se réunit avec Gérard Pelisson, alors Président du Groupe ACCOR, en présence de Ali Debaya, président de la société STI, Olivier Hick, directeur général de la société THR, représentant d’ACCOR en Tunisie et Adnan Sager El Sager, directeur du CTKD.
En vertu de la convention signée à Paris, ACCOR se charge de la gestion des hôtels sous la fameuse marque commerciale « Mercure » qui exploite alors plus de 700 hôtels de par le monde.
L’initiative constituait un tournant historique dans l’itinéraire du CTKD qui cherche clairement à réaliser la plus value qui lui manquait de ses hôtels.

Deux axes sont en priorité : l’amélioration de la rentabilité et l’élévation du niveau des services par la formation et le recyclage du personnel des hôtels projetés à travers l’Académie ACCOR qui permettra d’améliorer la qualité des services surtout que le CTKD compte un nombre important d’employés ayant une longue expérience et un excellent niveau.
Le CTKD voyait même plus loin et envisageait, avec Accor, de conquérir des marchés voisins.

La belle idylle s’est cependant estompée au fil des mois. Le CTKD ne voyait pas venir les dividendes espérés.
Des différends relatifs à la gestion des Français couvent. La visibilité de Mercure et sa stratégie marketing sont loin d’être optimales. Quid de l’Académie Accor tant convoitée ?
Et puis, il faut l’avouer, Accor ne jouit pas de la meilleure réputation en Tunisie. Contrairement à Riu ou Iberostar, son management ne voit pas l’investissement tunisien comme étant des plus rentables.
Le même management ne se gène pas lorsqu’il s’agit de critiquer l’hôtellerie tunisienne. Un journaliste spécialisé dans le secteur rappelle les propos de Gérard Pelisson, quand il était à la tête du groupe, lors d’un point de presse. Des propos assez désobligeants à l’égard de certains acteurs de l’hôtellerie tunisienne, alors que le bonhomme venait d’être décoré par le président de la République !
En bref, le CTKD - bien implanté dans le pays avec une bonne maîtrise de ses us et coutumes - n’a pas la même vision des choses que son partenaire français. Et vu qu’il s’agit d’une gestion pour compte, le CTKD voit dans toute cette gestion un vrai manque à gagner pour lui.
Il envoie courrier sur courrier, mais ne reçoit pas de réponses convaincantes. Le différend naît et la décision du divorce est prise. Qui a pris la décision ? Mystère, car chacune des deux parties annonce que c’est elle qui a pris la décision de résiliation.

Publiquement, en tout cas, c’est Accor qui a annoncé le premier la fin du partenariat. Jeudi 9 avril (jour de congé en Tunisie), la chaîne hôtelière envoie un communiqué aux rédactions que seuls Business News, African Manager et Tourismag acceptent de publier, le jour-même, son contenu (cliquer ici pour lire notre article à ce sujet). Il est passé étrangement à la corbeille de nos confrères de la presse papier.
Il a fallu attendre dimanche pour que le CTKD réagisse via un communiqué payant publié dans des journaux papier en langue arabe. Pourquoi a-t-on cherché à ignorer la presse électronique et la presse francophone ?
Dans le communiqué, le CTKD déclare avoir mis fin au contrat le liant à THR (filiale d’Accor) pour la gestion des quatre hôtels (Mechtel, Gammarth, Diar El Andalous et Sfax) et retire, de ce fait, l’enseigne Mercure de ces unités.
Le CTKD décline toute responsabilité quant aux engagements futurs souscrits avec THR.
Pour sa part, Accor indique dans son communiqué que les différents échanges avec le CTKD n’ont pu aboutir et regrette de devoir cesser cette activité. Elle aussi décline toute responsabilité liée au fonctionnement des hôtels, mais engage des procédures judiciaires en conséquence.

Contactée par Business News, Charlotte Thouvard, directrice de la communication chez Accor à Paris, nous indique que « les réclamations reçues par le CTKD ne sont pas claires et c'est pour cela que nous engageons des procédures judiciaires ».
Selon elle, les performances des établissements gérés sous l’enseigne Mercure sont bonnes depuis plusieurs années, malgré le contexte difficile lié aux travaux en cours dans deux hôtels sur 3 (le 4ème étant fermé pour rénovation). Grâce à Accor, le chiffre d'affaires de ces unités a augmenté de 13% et le résultat brut d'exploitation de 30%.

Saisie par Accor, la justice tunisienne ne manquera pas de trancher rapidement. En attendant, la situation se détériore. Aux dernières nouvelles, et suite à la rupture du contrat, le DG néerlandais d’El Mechtel a été prié de quitter manu militari sa chambre d’hôtel où il réside en permanence. Il a dû se rabattre sur le Sheraton en attendant qu’Accor lui trouve un autre point de chute.
16/04/2009 | 1
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