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Tunisie : Khelil Laâjimi oppose le bon sens aux rêvasseries des jeunes dirigeants
03/04/2009 | 1
min
Tunisie : Khelil Laâjimi oppose le bon sens aux rêvasseries des jeunes dirigeants
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Certains de nos ministres attirent les masses. Parce que leur secteur revêt une grande importance ou, tout simplement, parce qu’ils ont un certain sens de la communication leur permettant de tenir des conférences où l’ennui n’a point de place et qui transmettent des messages sans langue de bois aucune. C’est le cas de Khelil Laâjimi, ministre du Tourisme, invité jeudi 2 avril 2009 du Centre des Jeunes Dirigeants (CJD) pour débattre du tourisme tunisien à l’horizon 2020.
Pour ce débat, le CJD a préparé une présentation dont le contenu est fort approximatif. La vision des jeunes dirigeants de l’état actuel du tourisme et de ses perspectives dans 11 ans relève plutôt de rêvasseries ou de discussion de salon entre néophytes. A cela, et avec beaucoup de ménagement, Khelil Laâjimi a opposé un discours pragmatique et de bon sens, démontrant que l’industrie du tourisme est loin d’être une histoire de clichés.

« Nous sommes des agitateurs d’idées et non des donneurs de leçons ». En entamant ainsi son discours, Khaled Fourati, un des membres fondateurs du Centre des Jeunes Dirigeants de Tunisie, a donné beaucoup d’espoirs aux nombreux présents au déjeuner-débat du CJD. Les hôtes de la présidente Monia Jeguirim n’espéraient pas moins, elle qui les a habitués à des rencontres de haut niveau et des interventions d’une qualité irréprochable. D’habitude, les présentations du CJD s’archivent. Ça ne sera pas le cas cette fois et les espoirs suscités par M. Fourati ont été rapidement déçus à la lecture des réflexions élaborées.
La présentation, un peu trop, trop longue, est entamée par une comparaison de l’évolution du tourisme tunisien et son positionnement. Ensuite, on retrouve une comparaison entre les arrivées, les recettes, les dépenses par touriste et la durée moyenne du séjour en Tunisie, en Egypte, au Maroc et en Turquie. Des chiffres qui, présentés tels quels, laissent entendre que la Tunisie est fortement mal classée, comparativement à ces pays.

Alors qu’il a rejeté l’idée même de donner des leçons, Khaled Fourati est justement tombé dans le piège de donner des leçons à tort et à travers en matière de tourisme. Voilà ce qu’il faudrait faire, voilà ce qu’il faudrait éviter. Il faut retravailler ceci, il faut contrôler cela. Il faut créer une agence par ci, organiser des assises par là…
Avant même que l’orateur eut fini son intervention, l’assistance (du moins l’avisée) tombait des nues par rapport au contenu de cette présentation. Il est vrai qu’on était habitué à beaucoup mieux. Nettement mieux. Disons que ce sera l’exception confirmant la règle.

Face à cet état de fait, le ministre n’a quasiment eu aucune difficulté à répondre aux "critiques" et "suggestions" (évitons le terme leçons) des rédacteurs de la réflexion du CJD. Son appétit était aiguisé, comme il l’a signalé lui-même, avant de rebondir, avec beaucoup de diplomatie, sur tous les commentaires (il a dit certains, mais il a répondu sur tout).
Pour ce qui est des recettes, Khelil Laâjimi attire l’attention qu’il ne faut pas confondre dinars et dollars. Pour ce qui est des arrivées en Tunisie et celles d’autres pays, il rappelle que la Tunisie comptabilise uniquement les touristes, alors que certains pays (objet de la "réflexion") comptabilisent leurs résidents à l’étranger dans les arrivées. Pour pouvoir comparer, dit-il, il faut un seul référentiel et savoir aussi repositionner les choses par rapport à la taille du pays, ses capacités et ses limites physiques.
S’agissant des dépenses par touriste, Khelil Laâjimi fait observer que les dépenses des touristes en Tunisie comptabilisent également les dépenses des touristes des pays voisins (entendez la Libye et l’Algérie). Or, l’essentiel des dépenses des touristes de ces pays se font dans le marché parallèle et non dans le circuit officiel. Comment peut-on savoir par exemple ce qu’un Libyen a dépensé en Tunisie lorsqu’il préfère un appartement à un hôtel et cuisine chez lui plutôt que d’aller dans un restaurant ?
« Quand on retire ces pays des statistiques, vous allez voir comment le chiffre des dépenses par touriste va grimper rapidement », dira M. Laâjimi.

Pour ce qui est de voir des recettes de l’ordre de 20 milliards de dollars pour 20 millions de touristes à l’horizon 2020, le ministre indiquera être d’accord. Avec une pointe de sourire néanmoins qui dit ce qu’il dit.
En ce qui concerne l’élaboration d’une nouvelle stratégie globale de développement du tourisme, Khelil Laâjimi rappelle qu’on y est déjà et non pas à l’horizon 2020, mais à l’horizon 2016, au terme du 12ème plan économique et social.
Invité à retravailler l’image de la Tunisie et à rompre avec le cliché "destination balnéaire", Khelil Laâjimi indique qu’au contraire cette image est notre force ! Que nos plages n’existent pas aux Caraïbes et qu’il faudrait au contraire communiquer davantage de telle sorte à allonger la saison.
Au sujet de la création d’une Agence touristique tunisienne qui aura pour objectif d’améliorer la compétitivité de l’offre touristique et son adaptation aux nouvelles exigences du tourisme international, Khelil Laâjimi répond avec beaucoup d’humour : « Heureusement que Raouf Jomni (DG de l’ONTT) n’est pas présent, sinon il aurait sauté au plafond ».
C’est que les prérogatives qu’on veut donner à cette agence qu’on propose de créer relèvent déjà de l’ONTT qui fait le travail comme il se doit.

Le ministre admet cependant des insuffisances et a éclairé l’assistance sur les solutions envisagées. Celle de l’absence sur le net. Un gros projet est en train de s’élaborer et sera prêt début 2010. A propos du site de l’ONTT, le ministre relève que chaque pays a ses spécificités et que l’orientation actuellement retenue est que chaque bureau de l’ONTT à l’étranger possède son propre site Internet au contenu adapté au pays où il est.
Bien que ce ne soit pas coutumier chez lui, Khelil Laâjimi zappera superbement d’intéressantes questions posées par notre confrère Tahar Ayachi à propos des gîtes ruraux, des restaurants qui ferment tôt ou encore de l’absence d’alcool sur les terrasses. Il lui promet cependant une réponse en aparté.

Que retenir de ce débat ? En dépit de la présentation, le CJD a permis à ses membres et aux nombreux journalistes présents, d’avoir une idée bien claire et précise de la situation actuelle du tourisme en Tunisie. En cela, le CJD n’a pas du tout failli à sa réputation et on ne peut que saluer Monia Jeguirim et son équipe et en redemander encore.

03/04/2009 | 1
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