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Congrès des intellectuels contre le terrorisme : une force de proposition pour la Tunisie
13/08/2015 | 19:59
4 min
Congrès des intellectuels contre le terrorisme : une force de proposition pour la Tunisie

Un groupe d’universitaires a organisé hier, 12 août 2015, le congrès des intellectuels tunisiens contre le terrorisme. L’événement a eu lieu au palais des congrès à Tunis en présence d’une pléiade d’écrivains, de penseurs et d’artistes, venus de Tunisie et de l’étranger. Ce congrès intervient, quelques semaines après l’attaque meurtrière de Sousse qui a ébranlé la Tunisie et touché de plein fouet son industrie touristique.

 

C’est donc bouleversés par ce drame et conscients de l’urgence d’agir que des intellectuels tunisiens avec à leur tête Habib Kazdaghli, doyen de la faculté des lettres de la Manouba, ont lancé cette initiative deux mois environ avant le congrès national contre le terrorisme qui aura lieu en automne prochain. Un laborieux travail a précédé la tenue de cet événement pour dégager une sorte de manuel de lutte contre le terrorisme. Un document qui comporte des pistes de réflexion sur comment et par quels moyens peut-on combattre ce fléau. Un manifeste, en quatre langues, a été aussi distribué. Celui-ci contient un « nouveau pacte social » élaboré par le collectif d’intellectuels.

 

Cette fois-ci, les intellectuels ne se sont pas uniquement attelés à réfléchir à des solutions, mais aussi à faire leur autocritique. Ils reconnaissent avoir des carences et se disent conscients de la nécessité de revoir leurs méthodes de communication. « Il est temps de nous remettre en question et faire montre de plus d’humilité.  Nous devons aussi rompre avec l’image de l’intellectuel qui se contente de regarder ou de donner des jugements. Il faut sortir de cet immobilisme », a martelé Raja Ben Slama. L’universitaire a aussi soulevé une autre problématique, celle de la vie estudiantine. « L’après-midi, nos universités sont désertes. Elles ressemblent à des villes fantômes. Il est de notre responsabilité de les revivifier et d’accrocher les jeunes à l’université », a-t-elle poursuivi.

 

Le choix du 12 août pour tenir ce congrès n’était pas un choix arbitraire. C’était voulu, indique M. Kazdaghli, rappelant que ce jour est la veille de la fête de la femme. « Rappelons-nous du 13 août 2013. A cette date-là, les femmes et les hommes marchaient côte à côte dans la célèbre manifestation du Bardo […] Les intellectuels et les femmes ont un grand rôle à jouer », a-t-il dit.

 

 

Montant sur scène, Sghaïer Ouled Ahmed a déclaré après une longue ovation : « Ce congrès me remonte le moral […] Garder le moral c’est toute la guérison ». Entrant dans le vif du sujet, le poète affirme que le terrorisme commence dans la langue. « Depuis l’aube des temps, le terrorisme existe dans les textes qu’ils soient littéraires, religieux ou de loi ». Puis d’enchainer : « Au parlement, on célèbre la loi incriminant l’accusation d’apostasie. C’est une victoire tronquée. Car cette incrimination affirme l’obligation de la foi […] Il reste beaucoup à faire au niveau de la Constitution ».

 

 

Le rapport indique que l’appartenance à des groupes jihadistes transforme les jeunes d’« une personne inutile » en « héros », comme elle leur permet aussi de combler leurs besoins spirituels et de foi et même de satisfaire leurs désirs sexuels. Cela se réalise, explique-t-on, à travers les « fantasmes du paradis promis » et le « jihad sexuel » qu’ils s’autorisent. « Nous devons nous poser la question sur les alternatives à présenter pour répondre à ces besoins et pour que les jeunes ne se sentent pas inutiles ni isolés », peut-on lire.

 

Le rapport souligne la nécessité de contrôler les lieux de culte : « L’Etat devra continuer à tenir à l’œil les mosquées pour qu’elles ne se transforment pas en espace de recrutement ou d’entrainement pour les terroristes ou en lieu de stockage de munitions ». Le rapport appelle également à appliquer la loi contre les écoles coraniques et les associations religieuses afin de réduire la propagation de l’islam wahabite. « Mais toutes ces mesures ne suffiront pas et même s’imprégner de l’islam sunnite malékite modéré ne résoudra pas le problème tant que les hommes de foi ne prennent pas en considération les réflexions de Taher Haddad, de Mohamed Talbi et d’autres sur comment marier la foi, l’égalité et la liberté ».

 

 

Le document attire aussi l’attention sur une réalité importante, à savoir le taux de couverture internet. 35% des Tunisiens utilisent cet outil. Le nombre d’abonnés ADSL est estimé à 400 mille et la 3G couvre 50% des zones rurales. Ce terrain reste, toutefois, mal exploité par les intellectuels. Pourtant c’est un moyen efficace pour interagir avec les jeunes et diffuser les valeurs de citoyenneté, de tolérance et d’égalité. « Les intégristes se servent beaucoup de cette technologie pour embrigader les jeunes. Nous devons rivaliser sur ce terrain-là », a remarqué Raja Ben Slama.

 

Lutter contre le terrorisme requiert aussi un combat des inégalités, une démocratisation de la culture ainsi qu’une « refonte du rapport de l’Etat au religieux ». Il faut, à ce propos, « établir une nette séparation entre le politique et le religieux » et « revoir les statuts des instances en charge des affaires religieuses afin d’en assurer la neutralité et les protéger contre toute manipulation idéologique ».

 

Elyes ZAMMIT

 

 

  

 

13/08/2015 | 19:59
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Commentaires (10)

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Ben
| 14-08-2015 19:34
Tous les jours que dieu fait, la preuve est apportée que le président Ben Ali, Bac moins dix, comme certains de nos « intellectuels » se plaisent à le répéter, était un grand homme d'État, un véritable nationaliste, et un visionnaire.
Le manifeste, de ce collectif d' « intellectuels », avec son lot de recommandations ne vient-il pas réitérer toutes les mesures prises, par l'État, du temps de Ben Ali l'érigeant en système, celui-là même qui sera, décrié, de manière démesurée, et détruit par une junte de pseudo-révolutionnaires faisant que les pseudo-gouvernants, aux commandes de l'État, peinent, aujourd'hui, à lui trouver un substitut à même de sauver la nation et avec elle l'État dont il est l'émanation.
Ben Ali n'avait pas besoin d'attendre si longtemps pour se rendre compte qu'il fallait garder un 'il sur les mosquées, consacrer la séparation entre le temporaire et le spirituel et empêcher toute tentative de politisation des lieux de culte et du discours qui y était tenu, faisant de la mosquée un lieu de prière et un lieu de prière seulement,
Ben Ali n'avait pas besoin de mettre tout ce temps pour garder un 'il sur les universités, considérant que la population estudiantine était ciblée par le radicalisme, tant de droite que de gauche, empêchant toute tentative de politisation de nos universités, faisant qu'elles constituent des lieux de savoir et des lieux de savoir seulement,
Ben Ali n'avait pas besoin de mettre tout ce temps pour mettre en place un cadre pour les débats avec les jeunes, promouvoir, ne serait-ce qu'une ébauche de dialogue entre cultures et religions, et envoyer, même, les prêcheurs dans les prisons pour ré- inculquer aux jeunes le sens des véritables préceptes de l'islam modéré.
Force est alors de constater que nos « intellectuels » commencent à dépasser, au vue des maux et fléaux ayant gangréné le pays, en si peu de temps, la phase de l'adolescence.
Il est heureux de constater que nos « intellectuels » murissent et retrouvent la raison, celle-là même, communément, qualifiée de « raison d'État », que le président Ben Ali privilégiait en agissant, par anticipation, contre tous les fléaux qui guettaient, de manière permanente, notre pays.
Que le bon dieu nous en préserve.

iris ramis
| 14-08-2015 16:45
Nos intellectuels imbus d'eux même aimaient à s'absenter de la fac , des hommes profitent de leurs positions pour copiner avec leurs étudiantes moyennant des largesses. Les artistes n'ont pas fait un travail gigantesque gratuit contre le terrorisme. Nos feuilletons ramadanesques continuent à présenter la femme et le citadin dans un piteux état, ce qui alimente plus la haine et l'esprit de vengeance. Le changement se fait par le bon exemple pas par la parole.

Bourguibiste nationaliste
| 14-08-2015 14:06
Merci.

Nephentes
| 14-08-2015 11:30
Le terrorisme trouve de nombreux adeptes dans ce pays aupres de la jeunesse parce que cette dernière est paumée et sans perspective.

Parce que les fondements de l'identité tunisienne, construite depuis des siècles autour nottament de ce phare de la tolérance et de l'intelligence que fut l'Univesité Zitouna ,ont été détruits.

Parce qu'il n'y a pas eu harmonisation ente les sous-cultures des régions de l'intérieur et celles des régions du littoral.

Provoquant ainsi un déracinement et une acculturation beaucoup plus profonds qu'on ne le croit au sein des populations défavorisées issues de l'exode rural .

L'islam radical devient ainsi une culture de substitution, en même temps qu'un moyen de valorisation sociale.

La cause principale du terorisme est d'ordre psychosocial , et participe d'une crise identitaire et morale complexe et difficile à résoude à cout terme.












wide
| 14-08-2015 11:06
On se réveille .. mais trop tard. Avec mes respect .. vous etiez la depuis des années et vous n avez rien fait .
j etais la .. les d'étudiants livres a leur sort .. . Vide..inconscients ..jetais humilié de voir la faculte de manouba assiégeé par des terroristes et le doyen mr h.kozdoghli menace mais les voix étaient timides ce temps la ... maintenant
.il faut agir et rapidement ... on est avec vous

Observateur en Tunisie
| 14-08-2015 10:30
Tout à fait! bien exprimé

Bourguibiste nationaliste
| 14-08-2015 08:35
Cher Monsieur, puis-je vous demander de transmettre à ces intellectuels que le terrorisme est nourri par l'islamisme et que plusieurs parmi ces intellectuels ont soutenu ou soutiennent l'islamisme. Pouvez-vous leur dire qu'ils devraient de commencer par réfléchir sur eux-mêmes et sur leur prétendu savoir. Il faut qu'ils fassent leur propre autocritique car beaucoup d'entre eux ont joué à un rôle néfaste en 2011, en particulier en ayant servi comme marche pied pour les islamistes. Je vous prie également de leur transmettre que Yadh Ben Achour (pour autant qu'il est encore considéré encore comme un « intellectuel ») a joué un rôle destructeur en ayant contribué à l'instauration de la proportionnelle qui permet aux islamistes d'exercer le pouvoir sans responsabilité. Sans parler, bien sûr, de son opportuniste lorsqu'il a servi la soupe à Marzouki.
Enfin, dites à ces intellectuels leur que la misère n'a jamais expliqué le terrorisme. C'est une explication vulgairement marxiste. Dites leur aussi que le mal est profond et qu'un jour il faudra remettre en cause la transition elle-même qui a affaibli l'Etat et a permis aux islamistes de s'enraciner dans les institutions. Le combat contre le terrorisme jihadiste passera inéluctablement par un combat contre l'islamisme.

Observateur en Tunisie
| 14-08-2015 06:07
Le premier acte de l'offensive islamiste de manipulation de la jeunesse étudiante pour la mise en marche du programme de radicalisation takfiriste essentiellement à fond qatarien (qui devait porter à l'explosion du terrorisme en Libye, Egypte et Syrie) a été la suppression de la Chaire Ben Ali du dialogue des religions et des civilisations, en février 2011.

Suppression basée seulement sur le prétexte qu'elle portait le nom du "dictateur", alors qu'elle était sous la responsabilité d'un savant et d'un homme de vaste érudition comme le Dr. Fantar et qu'il suffisait de la rebaptiser par un quelconque nom républicain !

Soyons logiques! voilà le résultat de trois ans de gouvernement "religieux" par les chameliers venus de Najd avec Rached Khriji el-Ghennouchi et son staff politico-mafieux des Ligues pour la "protection" de la révolution et de prêcheurs vendus aux thèses wahhabites et takfiristes:

un pays sous l'attaque continuelle du terrorisme islamiste, avec des camps d'entrainement au djihad que ces crapules politiques niaient jusqu'au bout, un pays premier exportateurs de djihadistes sanguinaires, assassins et violeurs !

IL FAUT absolument soutenir le prompt rétablissement d'un Chaire Républicaine pour le Dialogue des Religions et des Civilisations! Excellent moyen de rééducation de la jeunesse et surtout de la jeunesse étudiante!

nazou
| 13-08-2015 23:32
Alors là c'est sur et certain que les jeunes vont être sauver !!!

Nos intellos tunisiens continuent sur leur lancée révolutionnaire d'avant 2011.
Un naufrage ne leur suffit pas, non ils persistent dans leur connerie !!!

En tout cas les intellectuels et l'ordre des médecins sont très fort en banderoles.
C'est sur que les terroristes qui liront leur banderoles, vont sûrement arrêter d'être des vilains et méchants terroristes !!!

3ABROUD
| 13-08-2015 21:25
« L'après-midi, nos universités sont désertes. Elles ressemblent à des villes fantômes. Il est de notre responsabilité de les revivifier et d'accrocher les jeunes à l'université » (Rajà Ben Slama, article ci-dessus). Voilà un témoignage de pro qui résume la crise de l'Université tunisienne et le retard cumulé de la politique sociale. Tous les autres secteurs ont été touchés par la crise. Il en résulte une jeunesse qui se sent écrasée, humiliée, dégradée, réprimée, écrasée, ballottée,... Cette jeunesse est peu enracinée dans la société qui l'a larguée. Elle est le sous produit d'une politique sociale désastreuse qui a cumulé beaucoup de retard. Quelque soit son obédience (de gauche ou de droite), le jeune devient moralement fragile et s'accroche à un brin, pour se sauver du naufrage.