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Ce que veulent les PME dans la Loi de finances complémentaire 2015 et dans la réforme fiscale
14/05/2015 | 20:49
10 min
Ce que veulent les PME dans la Loi de finances complémentaire 2015 et dans la réforme fiscale

Après les élections législatives et présidentielle, les entreprises tunisiennes ont cru que la situation économique du pays allait s’améliorer. Malheureusement entre temps, la guerre contre le terrorisme, la multiplication des grèves et mouvements sociaux n’ont pas facilité les choses. En contre partie, l’augmentation des taxes et droits ainsi que les restrictions à l’importation ont permis au marché parallèle de proliférer au dépend du marché officiel. Malmenées, les entreprises tunisienne attendent des décisions courageuses pour leur permettre de renverser la vapeur, notamment à travers la Loi de finances complémentaire 2015, la réforme fiscale et surtout l’application de la loi. Focus sur certaines de leurs propositions.

 

Un déjeuner-débat a été organisé par la Chambre tuniso-française de commerce et d’industrie (CTFCI), jeudi 14 mai 2015 à l’hôtel Africa en présence du ministre des Finances Slim Chaker et de l'ambassadeur de France en Tunisie François Gouyette, sur le thème "La Loi de finances complémentaire 2015 et la réforme fiscale", où la CTFCI a présenté ses propositions au ministre, qui a pu répondre à certaines de leurs interrogations et doléances.

 

 

A cette occasion, le président de la CTFCI, Foued Lakhoua, a brossé un tableau sombre de l’économie tunisienne : «La Tunisie connait une période difficile à plus d’un titre : une économe en berne, épuisée par le chômage, une croissance atone, une exacerbation des pressions fiscales exercées sur le budget de l’Etat et un grand dérapage du déficit commercial. Les sources des faiblesses de l’économie tunisienne se sont aggravées depuis un certains temps et nous avons abouti à un taux de croissance de 2,3% en 2014».

Ainsi, M. Lakhoua a jugé opportun d’aborder ce sujet à la veille des 100 jours du 1er gouvernement de la 2ème République, surtout que le dossier de la réforme fiscale figure parmi ses 5 priorités avec le développement du Partenariat Public-Privé (PPP), la recapitalisation des banques publiques, la révision de la loi sur le commerce qui date de 1961 et l’élaboration d’un Code d’incitation à l’investissement.

La réforme fiscale se base sur les principes de l’équité et de la transparence, selon l’article 10 la Constitution tunisienne. Elle veut créer les conditions optimales d’un développement solidaire et de consacrer l’égalité des chances entre tous les Tunisiens, estime-t-il. Cependant, elle soulève encore des questions, notamment concernant les délais de sa mise en place et des appréhensions qui se rapportent à son contenu et à sa mise en application, a-t-il ajouté. Ainsi, certains adhérents de la CTFCI lui ont confié que «ce sont toujours les mêmes sociétés organisées et transparentes qui sont contrôlées systématiquement».

 

 

Foued Lakhoua a souligné que «ces réformes ne peuvent donner leurs effets escomptés sans une paix sociale réelle et durable, qui mettra un terme aux grèves sauvages et à toutes les actions de perturbation du processus de production dont souffre énormément la Tunisie». Il a précisé, dans ce contexte que «l’ensemble des adhérents de la CTFCI questionnés, insistent sur le respect de la loi et trouvent qu’il est inconcevable que des entreprises subissent le siège d’un nombre restreint de personnes qui empêchent les autres de travailler», en assurant qu’«il faut injecter une grande dose de courage et de persuasion aux autorités régionales pour faire appliquer la loi».

 

Pour sa part, le président de la commission de la fiscalité à la CTFCI, Rached Fourati, a présenté, pour sa part, une synthèse de la vision de la chambre concernant ce sujet. Il a focalisé son intervention sur l'urgence de l'investissement, c'est-à-dire l'urgence de la résorption du chômage. Ainsi, il a proposé quelques mesures d'ordre fiscal à même de susciter, de faciliter et d’encourager l'investissement local.

M. Fourati a réclamé, ainsi, la correction, le plus tôt possible, de ce qu’il estime une injustice à l'égard des PME/PMI au titre de la restitution de la TVA. En effet, la Loi de finances pour 2015 a prévu que seules les grandes entreprises auront droit à un remboursement total du crédit de TVA dans un délai de 7 jours. Pour lui, cette nouvelle procédure, qui doit être applaudie, est discriminatoire envers les PME/PMI qui vivent une crise de trésorerie dramatique et elles ne peuvent accepter d'être exclues. Il a demandé, aussi, la restitution la totalité du crédit d'I/S et d'I/R dans un délai de 7 jours ainsi que la lutte contre la fraude, la contrebande et le marché parallèle en mettant tout le poids et toute l'énergie de l'administration pour stopper le harcèlement et les contrôles sur les contribuables disciplinés.

En outre, il a proposé la suppression de la caution de 20 % prévue dans les situations de contentieux fiscaux et l'arrêt d'une procédure de change simple et efficiente permettant aux entreprises totalement exportatrices non-résidentes d'encaisser le produit de leurs ventes sur le marché local en dinars. Les adhérents de la CTFCI veulent également une révision de la logique de la retenue à la source, qui transforme l'entreprise en un véritable auxiliaire de l'Administration fiscale avec, en prime, une responsabilité pécuniaire et pénale sérieuse. Ils désirent également la révision de la logique des pénalités qu’ils jugent injustes, inconsistantes et excessives. Selon eux, il faut différencier les opérations frauduleuses et les opérations réalisées de bonne foi ou les erreurs d'interprétation. Ils réclament dans ce contexte de démarrer le compteur des pénalités à partir du déclenchement du contrôle.

 

Le vice-président d’Amen Bank, Ahmed Karam, a recommandé, quant à lui 4 propositions susceptibles de redonner aux hommes d’affaires la confiance d’investir : une amnistie de change comme celle en vigueur au Maroc, de déclarer le dinar tunisien convertible, de supprimer les contrôles de change et d'appliquer une amnistie fiscale. Cette loi sera la Loi de solidarité et de prospérité qui posera les bases d’un environnement propice à l’investissement, a-t-il affirmé.

 

Dans la séance de débat, les intervenants se sont plaints du formalisme, des mesures mises en place par les Loi de finances des 3 dernières années, des retenues à la source non justifiées et de la lourdeur administrative réclamant la mise en place de procédures électroniques avec zéro papier, plus rapides et moins contraignantes. Certains ont réclamé des vis-vis des autorités pour des Partenariats Publics-Privés déjà en cours.

Un autre intervenant a fait remarquer au ministre que personne n’a réclamé la baisse des droits et taxes mais tous demandent la facilitation des opérations et procédures, qui changent selon les cas.

 

Réagissant aux différentes remarques et doléances, Slim Chaker s’est voulu rassurant et compréhensif : «je vous ai comppris», a-t-il affirmé avec humour, expliquant que lui-même est passé par là étant donné qu’il était dans le secteur public, puis le secteur privé, il a occupé un poste au gouvernement et il a étudié en Tunisie et en France. «Je connais vos difficultés ayant moi-même vécu ça». Alors qu’il n’avait pas de problèmes de financement, il a eu beaucoup de difficultés à avoir les autorisations requises pour la mise en place de deux cliniques à Bizerte et à Nabeul qui allaient créer 800 emplois. Il a noté que l’Etat lui-même en voit de toutes les couleurs lorsqu’il investit. Il a indiqué, dans ce contexte, que l’Etat a engagé énormément d’argent dans les régions, 5,8 MD en 2015, mais le taux de réalisation des projets n’est que de 50% à peine. Selon lui, le véritable problème n’est pas les fonds, mais le fait que l’Etat n’est plus ce qu’il était avant, surtout dans les régions, avec un affaiblissement total de l’Etat causé notamment par des gouvernements successifs, qui ne donnent pas le temps nécessaire aux ministres pour solutionner les problèmes : à peine arrivés, ils repartent ! Sans parler des ministres qui ne connaissent ni l’administration, ni la Tunisie. Ainsi, selon lui, ils n’avaient aucune chance de réussir, car les ministres sont devenus la locomotive qui tire l’administration.

Le ministre a souligné, également, l’importance de faire des études de projets poussées et exactes. Il a mis en relief les conditions difficiles de travail des administrations régionales qui se trouvent dans l’incapacité de conduire des projets outre la peur des entreprises à s’investir dans des appels d’offres à cause des problèmes sécuritaires et du manque des moyens. D’où la baisse de 2% de la croissance depuis la révolution.

 

M. Chaker a estimé que, pour remettre en marche l’économie, il faudrait une dizaine d’années pour que l’Etat reprenne les rênes et que pour l’instant, c'était le PPP ou rien, insistant que cela devrait être clair pour tout le monde.

«I have a dream, a-t-il affirmé, c’est de voir cette administration que j’ai intégré depuis 1986 devenir plus performante», rappelant que c'est l’administration qui a permis à la Tunisie de tenir les 4 dernières années, certes avec des difficultés. Pour lui, la Tunisie n’est pas uniquement les élections de 2014, elle est aussi le fruit de choix permanents comme le statut de la femme, la politique d’éducation et l’Etat qui a su tenir alors que d’autres se sont effondrés.

 

Slim Chaker a assuré que la Tunisie est capable de faire son chemin seule par ses propres moyens mais que cela va lui prendre le double du temps qu’il lui faudrait avec l’assistance de ses partenaires, notamment la France et l’Europe. «La Tunisie est un pays d’exception qui passe par une situation d’exception, il lui faudrait un traitement d’exception avec un costume sur mesure», a-t-il déclaré, en soulignant que la première cause qui fait peur aux Européens, la migration, sera endiguée dans des dix ans au plus et que ce seront les Européens qui viendront s’installer dans ce pays.

Concernant la Loi de finance complémentaire, il a assuré qu’il ne s’agit pas d’un simple exercice mathématique, soulignant qu’actuellement un seul indicateur est au vert celui de la balance commerciale. Pour lui, il faut plus de mesures de relance à très court terme. Pour la contrebande, il est conscient que le problème vient de la pression fiscale et l'interdiction d’importation. Il a affirmé que son ministère travaille pour réduire la pression fiscale de telle sorte à intégrer les contrebandiers dans le circuit officiel. Concernant les produits interdits, il a expliqué que vu que ces produits sont présents en Tunisie, il vaut mieux lever les interdictions et profiter des taxes, le tout dans le respect des lois et des normes.

Concernant la douane, il a mis en relief l’importance de former les ressources humaines, de moderniser ses moyens avec des scanners sophistiqués, des caméras de contrôle et un système d’information à la hauteur et de passer à des contrôles à postériori avec des procédures sur internet.

 

Concernant la réforme bancaire, Slim Chaker a indiqué qu’elle est presque achevée, précisant que la BCT travaille sur de nouvelles lois bancaires. Concernant la réforme fiscale, il souligné sa compréhension des différents problèmes, expliquant que selon lui, il faut 3 réformes clés pour les PME: la fluidité des matières premières et marchandises, le financement à des coûts compétitifs, la réforme fiscale pour que les sociétés puissent investir et la gestion du budget par objectif.

Il a demandé à la CTFCI de lui soumettre ses propositions pour des mesures urgentes de relance à court terme ainsi que des idées, des remarques et des propositions  pour que l’investissement redémarre plus vite.

 

Pour sa part, François Gouyette a tenu à répondre à la sollicitation de M. Chaker, tout en affirmant apprécier le débat. Il affirmé que les partenaires de la Tunisie sont très profondément engagés avec elle, notant que, l’année dernière, c’est encore 100 millions d’euros d’investissements français qui ont été enregistrés, en progression de plus de 10% par rapport à ceux d’une année auparavant alors que l’ensemble des investissements étrangers ont régressé de 20% dans le pays. Il a précisé que la France a milité seule à Bruxelles pour que le programme d’assistance macro-financière (AMF) passe de 200 à 300 millions d’euros. Il a également indiqué que le président du Conseil européen Donald Tusk et le commissaire européen à l'Intégration Johannes Hann, qui ont récemment visité la Tunisie, sont repartis, l’un comme l’autre, avec la conviction qu’il fallait non seulement aider la Tunisie mais aussi faire un effort particulier exceptionnel pour l'aider.

 

«La finalité est de réaliser cette justice. La finalité est également de lutter contre la contrebande et le blanchiment d’argent, à travers la mise en place d’une administration fiscale performante», a déclaré Foued Lakhoua reprenant des propos de M. Chaker.

 

Imen Nouira

 

14/05/2015 | 20:49
10 min
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Commentaires (7) Commenter
Bravo Mr Fourati
Croco
| 15-05-2015 12:58
Bravo à Mr Fourati qui à dressé un tableau réaliste de la situation des PME/PMI.
Comment interprété que la restitution ne soit que pour les grandes entreprises et pas les "petits".
J'aimerais avoir une réponse du gouvernement. l'Etat protège les grands et coule les petits qui sont les plus grands employeurs. Comment interprété ce comportement.
Quand aux propositions de Mr Fourati concernant la restitution des crédits d'Impôts pour les PME/PMI , elles devraient être incluse dans la loi des finances complémentaire de 2015.
Mr le Ministre il y a péril en la demeure et nous ne savons pas si nous seront là à la fin de l'année.
Le quart de mon capital est dans les caisses de l'état , comment voulez vous que l'on investisse et que nous créons des emplois ?
Que l'administration fiscale nous lâche et qu'elle fasse son travail en allant chercher l'argent chez ceux qui ne payent rien ou presque.
se remettre aux fondamentaux
Adel
| 15-05-2015 10:55
Les propositions d'Ahmed Karam méritent d'être prises en considérations, car l'essentiel est de garder l'argent en Tunisie pour le réinjecter dans l'investissement.
Une amnistie fiscale, permet toujours de remettre le moral et la confiance des entrepreneurs au zénith et peut être l'occasion de remettre à plat les compteurs avec de nouvelles règles fiscales génératrices de meilleures recettes fiscales pour l'état.
Par ailleurs, il faudrait s'occuper aussi des autres volets de la croissance et ne pas se concentrer seulement sur les investissements, qui sans réels débouchés, n'auraient aucun impact sur la croissance.
des promesses vides
futurfortune
| 15-05-2015 09:09
la correction commence par la sensibilisation du peuple pas seulement avec ces réunions et ces paroles résonnantes.. si le peuple saurait l'état critique de notre Etat cela va diminuer la durée de la réforme au moitier au minimum .
ET LE BLA BLA BLA CONTINUE DE PLUS BELLE
TDK123
| 15-05-2015 06:26
Bla bla bla
La loi de finance se "vengera" et tiendra bon avec ceux qui ont toujours déclaré. Les contre bandiers, fraudeurs et autres continueront à se la couler douce. De quelle réformes parlent ces têtes de pierres de Lakhoua, Chaker, Ambassadeur de France notre économie est malade de son Administration corrompues jusqu'à la moelle (la douane à titre d'exemple est un gang bien organisé), notre économie est malade de ses ouvriers qui ne veulent pas travailler ou qui quand ils travaillent ils donnent le 1/100 du rendement d'un Chinois permettant ainsi aux piètres produits Chinois d'être hyper compétitif par rapport au Tunisien, notre économie est malade de ses banques qui devraient avoir sur leurs enseignes leur vrais noms USURIERS, enfin notre économie est malade de ses responsables malades n'ayant aucune cultures du travail et du sacrifice et ne pouvant aucunement l'inculquer aux gouvernés. Un pays gouverné par des "têtes à claques" ne peut vivre que des miettes que nous jettera l'Europe, s'il en ont encore....
M Gouette ou la goulotte !
DIEHK
| 14-05-2015 22:55
Dans laquelle la Tunisie se noiera!
Le< nouveau colonialisme par l'argent et les crédits est en place et dicte ses conditions et les gueux qui postent sur BN n'ont vu que du Feu avec le pseudo somalien!
Nom de Dieu: C'est le MEDEF Tunisien!
DIEHK
| 14-05-2015 22:52
Non, je rêve , les gueux de l'UTICA imite le MEDEF!
Mais il y a ses siecles de civilisation entre l'UTICA et ses Gueux et le MEDEF et ses patrons et une autre différence entre le CAC 40 et le Tunidex "like sex"!
By jove I lost my french or Arabic?
Tous des des gueux patentés et votre
arrogance détruira la Tunisie bande d'incompétents et de voleurs patentés!
BN un peu de sérieux
versus
| 14-05-2015 22:23
Remplacez moi "les entreprises tunisiennes ont cru que la situation économique du pays va s'améliorer" par "les entreprises tunisiennes ont cru que la situation économique du pays allait s'améliorer"

BN : Merci d'avoir attiré notre attention