
Le président de la République s’est penché cette semaine, à sa manière, sur le dossier du pain qui est devenu, il est vrai, une denrée rare ces dernières semaines. Utilisant des arguments vrais, mais incomplets et faisant un diagnostic inachevé de la situation, Kaïs Saïed a lancé, devant son auditoire ministériel, qui a pris des postures de carpes, son slogan « un même pain pour un seul peuple ». Encore une fois donc, le président de la République a versé dans le populisme. Il continue de pratiquer la politique du « tout dans le même sac », qui consiste dans le cas présent, à « mettre tout son pain dans le même panier ».
Emboitant le pas à son président de la République, la présidence du gouvernement a annoncé que les boulangeries non classées seront interdites de vendre de la baguette. Dans la foulée, les ministres du Commerce et de l’Intérieur ont convenu d’intensifier les opérations de contrôle de toutes les catégories de boulangeries. Par ces mesures précipitées, la boucle populiste semble être bouclée. La pénurie du pain provient du fait de l’existence des « cartels », appellation qui quoiqu’on dise, a une signification stigmatisante, ainsi que d’une injustice sociale qui fait payer aux pauvres des impôts qui, au lieu de leur garantir leur pain quotidien, profitent aux riches qui ont les moyens de se payer un pain de qualité.
Mais en aucun moment, le président de la République, ni ses ministres n’ont cherché à faire la moindre autocritique ou pointer une quelconque responsabilité de l’État dans cette pénurie. Bien entendu, dans le secteur des minoteries et des boulangeries, il existe comme dans tous les autres secteurs, des escrocs et des corrompus. Seulement, il y a aussi la défaillance totale des structures de contrôle de l’État qui fait qu’une baguette qui doit peser normalement 220 grammes ne pèse plus depuis des années déjà, qu’à peine 150 grammes. Ceci sans oublier les retards de livraison du blé aux minoteries parce que l’Office du commerce peine à trouver les liquidités pour payer les cargaisons de blé, ou la réduction des quotas des boulangeries en farine parce que les minoteries ne travaillent plus à plein régime, ou encore l’accumulation des indemnités de la compensation au profit des boulangeries qui a dépassé la somme faramineuse de 250 milliards de nos millimes.
Toutefois, nonobstant ce raccourci populiste, on ne peut résister à la vérité du terrain qui indique que dans le pays, il y aura toujours plusieurs catégories de pains. D’abord, il y a, à côté de la baguette, le pain dit italien, occulté par le Président et ses ministres, qui devrait peser 400 grammes, mais qui a connu lui aussi une grave cure d’amincissement. Il y a aussi les pains qui font partie des traditions alimentaires des Tunisiens comme le « tabouna », le « mlawi » ou encore le petit pain « mbesses » qui garnit les tables durant le mois de ramadan. Il y a surtout le pain sans sel destiné aux Tunisiens dialysés ou qui ont des problèmes cardio-vasculaires, qui représentent selon les spécialistes de la santé, une frange importante de la population. C’est dire que cette logique démagogique, qui repose sur un égalitarisme primaire qui chatouille les sentiments de certains démunis, des éternels insatisfaits et des frustrés invétérés, ne laisse aucune place à la diversité et à la complexité du réel.
Toujours dans cette même logique du tout dans le même sac, la présidence du gouvernement, à la suite de l’audience avec le président de la République a annoncé la fusion des deux entreprises de presse, la Snipe-La Presse et Dar Assabah. Le subterfuge étant de faire croire que cette fusion contre-nature est capable de sauver ces deux institutions médiatiques que tout sépare sauf leurs difficultés financières du moment. En vérité, cette finasserie dégage une ignorance flagrante du mode de fonctionnement des médias. Elle montre surtout la volonté du pouvoir actuel de mette les médias sous son joug. Pour ce faire, au diable la démocratie, sa nécessaire diversité et son incontournable liberté d’opinion.
Donc cher SBH étudiez tous les aspects des questions que vous traitez et proposez un début de solution. C'est comme cela que vous ferez avancer le schmilblick