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L'affaire Aziz Miled - Michèle Alliot-Marie, vue de Tunis
03/02/2011 | 1
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Une tempête dans un verre d’eau ? On n’en est pas loin. Le scandale, puisqu’on en parle d’un, a été déclenché par le Canard Enchaîné, dans son pur style satirique.
Michèle Alliot-Marie, ministre française des Affaires étrangères, a passé ses vacances de Noël en Tunisie et a pris le jet de Aziz Miled, jugé proche de Ben Ali, donc infréquentable au regard de la presse française.
Quels sont les rapports d’Alliot-Marie avec la Tunisie et quelle est la position de Aziz Miled (actuellement à Tunis et non en exil au Canada) avec la famille. Un éclairage de Tunis est nécessaire pour mieux analyser la position de la ministre et de l’homme d’affaires.

Ministre depuis une bonne dizaine d’années, sous Chirac puis sous Sarkozy, Michèle Alliot-Marie a quasiment passé toutes ses vacances des dix dernières années en Tunisie. A Djerba qu’elle adore, à Hammamet, à Tabarka. A l’instar de beaucoup de Français (de droite comme de gauche), elle a la Tunisie au cœur.
Ce dont on peut témoigner, c’est qu’elle a également les Tunisiens au cœur. A Djerba, elle assistait même à des fêtes familiales et appelait les gens par leur prénom. Et nul n’est exclu, elle connait aussi bien la communauté musulmane que la communauté juive ou encore la communauté française de Tunisie ou tunisienne de France.
Restent ses rapports avec le régime. Ministre de la République, Mme Alliot-Marie a des obligations de politiques et ne peut éviter des contacts avec les officiels tunisiens. Elle aurait dit le fond de sa pensée de Ben Ali, elle aurait eu toute la France à dos, au nom des sacro-saintes relations tuniso-françaises. Quand Delanoë s’est essayé sur ce terrain, il a dû essuyer les pires critiques, voire même les insultes, le poussant à s’expliquer et se rétracter rapidement.

Quant à Aziz Miled, objet aujourd’hui d’un feu violent de critiques, il faudrait bien dire qui il est.
Homme d’affaires des plus en vue dans le pays (il représente le 7ème groupe en Tunisie), il ne pouvait pas ne pas connaitre Michèle Alliot-Marie. Inévitable. Recevoir chez lui Alliot-Marie oui lui affréter un jet fait partie des us et coutumes du milieu des affaires et du sens de l’accueil et de l’hospitalité. C’est la moindre des choses pour un hôtelier de renom d’ailleurs.
Europe 1, et beaucoup d’autres médias français, s’interrogeaient si Aziz Miled était proche ou non de la famille Ben Ali.
La réponse est oui, voire un grand oui. Il était quasiment le seul à avoir des affaires avec toutes les branches de la famille Ben Ali. Alors que ces différentes branches ne s’associaient pas entre elles, Aziz Miled a réussi à s’associer avec tout le monde. Pour ne citer que les grosses affaires, M. Miled était l’associé des Mabrouk à la BIAT, première banque privée tunisienne. Associé à Belhassen Trabelsi à Karthago-Nouvelair, première compagnie privée tunisienne. Associé à Materi dans la Banque Zitouna, première banque islamique tunisienne.
Difficile de dire, dans ce cas, qu’Aziz Miled n’est pas proche de la famille ! Sauf que voilà, il faut connaitre le milieu tunisien des affaires et Zine El Abidine Ben Ali pour juger.

Si sa participation à la BIAT ne soulève aucune interrogation (il était là avant les Mabrouk et bien avant l’arrivée de Ben Ali au pouvoir), il n’en est pas de même quant à Karthago et Banque Zitouna.
Pour la compagnie aérienne, c’est un mariage de raison et non forcé comme certains des défenseurs de M. Miled veulent faire croire.
Aziz Miled était à la tête de Nouvelair, une petite compagnie privée. Belhassen Trabelsi était à la tête de Karthago, une toute petite compagnie privée avec une filiale encore plus petite en Egypte.
Face à l’ouverture du ciel aérien et la concurrence des compagnies low cost à venir, les deux hommes d’affaires n’avaient d’autre choix que de s’unir. Il y allait de la pérennité de leurs entreprises. Mais bien que la taille de la compagnie de Aziz Miled soit plus grande que celle de Belhassen Trabelsi, c’est à ce dernier qu’a échu le poste de président de la compagnie née de la fusion. Difficile ici de ne pas voir un forcing de la part de la famille de Ben Ali, voire de Ben Ali lui-même, pour une mainmise sur la nouvelle entité.
Quant à la Banque Zitouna, les choses sont encore plus claires quand on connait le climat tunisien des affaires. Le nouveau gendre Sakher El Materi voulait sa banque islamique et devait trouver des fonds. Et où trouver des fonds si ce n’est du côté des hommes d’affaires les plus en vue ? Les hommes d’affaires amis ?
Qu’a pensé ce jour-là Aziz Miled ? Considérait-il cette participation à la première banque islamique comme un énième racket ou comme une participation intéressante en vue de récolter plus tard de jolis dividendes, nul ne pourra le dire.
De même quant à sa signature pour l’appel à Ben Ali de se représenter à la présidentielle de 2014. Plusieurs ont déclaré, tout comme M. Miled, qu’ils n’étaient pas informés au préalable ou que, de toute façon, ils ne pouvaient pas dire non quand on les a sollicités pour apposer leur signature.
Le racket évident demeure cependant les dons très importants aux campagnes présidentielles et législatives. Aucun homme d’affaires ne peut y échapper, sans risquer d’avoir un contrôle fiscal approfondi ou une affaire en justice montée de toutes pièces.
Autant d’éléments qui montrent que le milieu tunisien des affaires était bien proche du milieu politique et familial. Que ce soit par intérêt ou par obligation, on ne donnait de toute façon pas le choix aux hommes d’affaires. C’est ainsi ou qu’ils quittent le pays. Chose qu’Aziz Miled et beaucoup d’autres ont refusé de faire.
03/02/2011 | 1
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