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Tunisie : L'UBCI doit descendre de sa tour d'ivoire
11/05/2009 | 1
min
Tunisie : L'UBCI doit descendre de sa tour d'ivoire
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L’assemblée générale de l’Union Bancaire pour le Commerce et l’Industrie (UBCI), filiale du groupe français BNP PARIBAS, s’est tenue vendredi 8 mai 2009 sous la présidence de son PDG Slah-Eddine Bouguerra.
Au vu des résultats de la banque et à l’écoute des propos de son PDG, tout observateur pourrait dire : "Tout va bien madame la marquise".
Cependant, en entendant les critiques de certains actionnaires et en observant le paysage bancaire tunisien, la réflexion qui s’impose est que l’UBCI doit obligatoirement et rapidement descendre de sa tour d’ivoire. La phrase ne nous appartient pas puisqu’elle a été si bien formulée lors de l’AG par un actionnaire de référence, devenu administrateur de la banque : Mohamed Riahi.


Slah-Eddine Bouguerra est satisfait. Il semble même amplement satisfait. L’exercice 2008 vient concrétiser dans les chiffres ses ambitions et conforter ainsi le bien fondé de ses choix stratégiques. Les propos lui appartiennent et se trouvent dans le préambule du rapport annuel provisoire de l’UBCI. Un préambule qu’il nommera éditorial alors que le terme est exclusivement consacré au monde de la presse puisqu’il s’agit d’un article de fond reflétant les grandes orientations d’un journal. Ce ne sera pas sa seule confusion.
La satisfaction du PDG de l’UBCI est justifiée par les chiffres de la banque. Un PNB de 93 millions de dinars en augmentation de 14% et un résultat net de 24 millions de dinars, en progression de 39%. Mais au vu des résultats des autres banques, il n’y a pas vraiment de quoi sauter au plafond.
A titre d’exemple, Attijari Bank qui était déficitaire l’année dernière de 9,4 MD a enregistré cette année un résultat net de 41 MDT et un PNB de 127 MDT.
La BIAT, qui n’est pas adossée à un groupe bancaire solide comme n’a cessé de le rappeler le PDG, a réalisé en 2008 un PNB de 311 MDT.
Idem pour la BT dont le PNB est de 126 MDT et le résultat net de 63MDT.

L’un des points forts de l’année 2008 pour l’UBCI a été la création de ses agences, ce qui place la banque au cinquième rang avec une part de marché réseau de 9,5%.
Mais à quoi sert-il de créer des agences s’il n’y a pas de banquiers derrière les guichets comme l’a rappelé, durant l’assemblée, un actionnaire. On a même invité le PDG, et avec insistance durant cette même AG, à aller visiter ces agences et voir ce qui s’y passe.
La réponse ? Elle détonne. « Je voudrai bien aller faire un tour dans les agences, répond M. Bouguerra, mais cela va agacer le secrétaire général, le directeur du réseau… Ma crainte est de gêner les directeurs et qu’ils disent que c’est une immixtion dans leur travail. Un jour, je voulais visiter les bureaux et on m’avait dit : « Vous devez rester dans votre bureau et les gens viennent vous voir ». Quid des PDG et des ministres qui multiplient sans cesse les visites inopinées sur le terrain ? L’époque a changé, et il serait bien que le patron de l’UBCI s’en aperçoive.

Interrogé sur le débauchage de certains cadres dirigeants de l’UBCI qui sont partis (avec certains de leurs clients) vers la concurrence, M. Bouguerra a présenté, encore une fois, une réponse qui détonne.
Ce débauchage ne concernerait que trois ou quatre personnes, selon lui. Certaines banques, dit-il, ont eu un besoin spécifique de directeurs et c’est normal qu’elles n’aillent pas les chercher à la BTS, mais dans une banque internationale. Inutile de rappeler au PDG de l’UBCI que le vrai débauchage qui mérite qu’on en parle, ne touche justement, que certains postes-clés de l’entreprise.
M. Bouguerra fera, durant l’AG, une belle révélation qui ne devrait pas laisser insensible le Conseil de la concurrence. Selon lui, il y aurait un accord entre les banquiers pour ne pas surenchérir et débaucher du personnel. Est-ce vraiment le cas ? Nous avons interrogé un banquier qui a formellement démenti cette histoire nous citant même quelques mouvements récents de hauts cadres bancaires. Tant mieux pour la concurrence du secteur en Tunisie ! Un autre nous parle cependant d’un gentleman agreement "convenu" avec l’UBCI suite à la multiplication des départs.
A propos de la clientèle convoitée par ces cadres de l’UBCI pour qu’elle les rejoigne vers leur nouvelle banque, M. Bouguerra a cité une étude française qui dit que la clientèle est fidèle et que la probabilité de changer d’épouse est supérieure à la probabilité de changer de banque. Intéressant !

L’image de l’UBCI, quoiqu’en penseraient ses salariés et leur chef, est loin d’être au top en Tunisie. Nous considérons sérieusement qu’elle a un déficit abyssal en matière de communication et de marketing, comparée à l’ATB, Attijari, la BIAT, voire la BTS. Mohamed Riahi (l’actionnaire devenu administrateur au cours de cette AG) épingle, à ce propos, le PDG et l’invite à faire preuve de beaucoup plus d’efforts : « Cessons de sponsoriser le tennis et la musique baroque, dit-il, et collons mieux à la clientèle qui écoute le mézoued et le malouf. Il faut qu’on descende de notre tour d’ivoire ». M. Riahi citera l’exemple de l’ATB, stigmatise le fait que la banque soit considérée comme celle de l’élite et demande la publication de l’organigramme de la banque qui change souvent.
M. Bouguerra ne dérogera pas à la règle et offre sa réponse. Il dément avoir sponsorisé le tennis (bien que le président de la FTT soit son ami et que la BNP ait insisté pour qu'il sponsorise ce sport), cite quelques dons offerts à des associations de bienfaisance et met en exergue le côté humaniste de l’UBCI. M. Bouguerra confond-il sponsoring (sur lequel il a été interrogé) et mécénat (sur quoi il a répondu) ? A une époque où les banques rivalisent en matière de communication et font la course pour marquer leur présence dans le paysage médiatique, M. Slah-Eddine Bouguerra, lui, prône la discrétion.
La même discrétion est évoquée lorsqu’il a été question du centre de formation de l’UBCI. M. Bouguerra n’a pas souhaité polémiquer avec ses confrères quand ils ont médiatisé le lancement de leur centre de formation de compétences. Suivez son regard…

L’un des principaux points évoqués (et avec insistance) par les actionnaires est celui des réserves excessivement élevées de l’UBCI. « Que faites-vous avec tout cet argent ? Donnez-le nous ! Augmentez le capital ! Doublez le nombre de nos actions ! Faites un split !»
Réponse de M. Bouguerra : « Si on fait un split, on rentre dans l’irrationnel… ». Un actionnaire lui coupe la parole et lui fait remarquer que deux banques ont fait appel à cette technique. « Une seule banque a fait le split en divisant le nominal par 5, mais nous, on ne veut pas doper l’action », répond le PDG qui précise que la banque ne devrait plus avoir besoin de fonds propres d’ici 2013 avec ce qu’elle possède comme actifs et trésorerie. Les actionnaires interpréteront à souhait cette sorte de fin de non-recevoir.
Il est vrai, malgré tout, que l’ensemble de l’assistance est convaincue que l’action UBCI est une action de fond de portefeuille. Il est quasiment impossible aujourd’hui de la trouver sur le marché. Une action qui a grimpé, sur un an, de 25,6% contre 10,65% pour le Tunindex. De quoi rassurer les actionnaires. Mais pour combien de temps encore ?

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