Programme électoral d'Ennahdha : Vers l'application de réformes économiques et sociales d'envergure ?
Le mouvement Ennahdha a organisé, mardi 23 septembre 2014, une conférence de presse au Palais des Congrès de Tunis, afin de présenter
son programme électoral pour le prochain scrutin législatif. Organisation à l’américaine et en présence de nombres des figures du mouvement, les membres d’Ennahdha se succèdent pour exposer la stratégie économique et sociale du parti, pour les cinq ans à venir.
Premier à prendre la parole, le secrétaire général d’Ennahdha, Ali Laârayedh a déclaré que les réalisations des Tunisiens doivent perdurer, en vue de garantir les objectifs de la révolution. M. Laârayedh a ainsi indiqué qu’Ennahdha a consulté ses bases avant de préparer son programme électoral, illustrant ces propos avec la diffusion d’un spot où des citoyens s’expriment sur la situation économique et sociale en Tunisie, abordant différents sujets : enseignement, agriculture, chômage, conditions de la femme, etc. Ali Laârayedh a annoncé que « partant de notre expérience au pouvoir de 3 ans et de la réalité de la situation, Ennahdha s’est fixée des objectifs politiques : construire un Etat fort, consolider les libertés et garantir une société équitable ». Et d’ajouter qu’après l’adoption de la Constitution, le parti islamiste s’attèlera à préserver les valeurs de la démocratie, de la pluralité, soutiendra l’institution sécuritaire et militaire et réformera la justice pour instaurer l’indépendance et l’efficacité de ces institutions. L’ex-chef du gouvernement a affirmé que la prochaine étape pour la Tunisie est celle de la stabilité économique, politique, sociale et sécuritaire, se basant toujours sur le consensus. Selon M. Laârayedh, Ennahdha appuiera les efforts de l’Instance Vérité et Dignité, présidée par Sihem Ben Sedrine pour qu’il y ait une réconciliation nationale, et d’un autre côté le mouvement consolidera le partenariat politique, économique et culturel sur le plan international, tout en combattant le terrorisme, en préservant les frontières et en luttant contre la contrebande.
Concernant l’aspect économique, la priorité d’Ennahdha est la création de la croissance et du décollage de l’économie tunisienne, le parti considérant les programmes de développement qui ont été mis en place jusque-là inefficaces. Par conséquent, la stratégie d’Ennahdha se basera sur 3 axes : une économie sociale du marché, dépassant l’économie de rente en allant vers l’économie de concurrence et un rôle régulateur de l’Etat. Une vision économique nouvelle est prônée et elle s’appuiera sur une politique réformiste à travers la législation. Les objectifs étant, une économie qui crée de la valeur ajoutée, faire baisser le chômage et les disparités sociales et régionales, tout en luttant contre la pauvreté et en intégrant l’économie tunisienne dans l’économie mondiale.
Ennahdha préconise donc des réformes structurelles, en améliorant, à titre d’exemple l’industrie dans les secteurs à grande productivité. Une économie inclusive qui soutiendra les régions et l’appui du rôle de la Tunisie régionalement, en Afrique et avec l’UE seront mis en place. Par ailleurs, Ennahdha prévoit une croissance de 5% sur les 3 ans à venir et de 7% à partir de 2018 mais aussi une inflation qui ne dépassera pas les 4% et tâchera de baisser le déficit du budget de l’Etat qui n’outrepassera pas les 40% en 2019. Au cours de son intervention l’expert économique d’Ennahdha a également mis en exergue la nécessité de préparer un climat d’investissement qui se basera sur la concurrence loyale et transparente et où les investisseurs auront la chance de développer des projets à l’abri du clientélisme. Il a aussi annoncé la réforme du système bancaire, fiscal et des institutions publiques mais aussi la réorganisation des caisses sociales, toutes ses réformes s’inscrivent dans la stratégie du mouvement pour le décollage et le succès de la transition économique en Tunisie, d’après l’intervenant.
Pour le volet social, Ennahdha préconise l’investissement dans les ressources humaines tunisiennes. Emna Dridi a ainsi assuré que la jeunesse est la richesse du pays, ce qui a amené le parti à concevoir des réformes dans l’enseignement supérieur et la formation professionnelle : Le budget de l’enseignement supérieur se verra à la hausse : «
Nos étudiants seront les responsables de demain en ce sens Ennahdha s’engagera dans une révolution de la connaissance, d’ailleurs on augmentera la bourse d’étude de 60d à 120d ». En outre, la responsabilité sociétale de l’Etat sera développée, en créant la richesse, tout en mettant en place une politique inclusive d’investissement dans les régions et en luttant contre la pauvreté. «
Nous appliquerons une stratégie nationale de l’immobilier et développerons les services de santé. Au programme : minimiser à moitié le chômage chez les diplômés ou créer une caisse de chômage ». Le rôle imputé aux Tunisiens résidant à l’étranger, pour participer au développement économique du pays, sera consolidé avec la création du programme « Soukouk Biladi », pour que les ressortissants tunisiens investissent dans leurs régions. L’Etat devra développer la recherche médicale et pharmacologique pour que la Tunisie puisse produire 60% de ces médicaments et s’attachera à dispenser aux familles pauvres des habitations respectables, ces familles verront leur prime en hausse et elle avoisinera les 150d.
Le chef du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi, présent à côté d’Abdelfattah Mourou, Hammadi Jebali et Ali Laârayedh, a repris le terme « consensus » comme un leitmotiv. «
Notre pays est le plus uni dans le monde arabe. Il n’y a plus lieu pour la division à l’heure actuelle. Ennahdha est contre l’exclusion et la division du pays en deux factions. Le débat politique doit être axé sur les programmes et non sur des idéologies ! ». M. Ghannouchi clôt finalement la conférence en clamant : «
Nous sommes les enfants de cet Etat, nous sommes la continuité de cet Etat ! ».
Un hymne national version Ennahdha a été diffusé vers la fin de la rencontre. Chacun fait sa Com’ à sa façon, et le mouvement islamiste a choisi une version bien particulière de l’hymne tunisien, scandé par la voix d’une enfant à la manière des chants religieux.
I.L.