
Le ministre des Affaires étrangères, Nabil Ammar, a donné, à Londres, une interview au journal « Al Majalla », parue ce lundi 23 octobre 2023.
Le ministre a été interrogé sur de nombreux sujets, dont l’affaire des soixante millions d’euros rendus à l’Union européenne. Il a répondu au journaliste Ibrahim Hamidi en ces termes :
« Le 16 juillet à Carthage, nous avons signé un protocole d'accord sur insistance des dirigeants européens, dont la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le Premier ministre néerlandais Mark Rutte et la présidente du Conseil italien, Giorgia Meloni…
Au cours de ces discussions, nous avons souligné la nécessité d'un changement d'approche vers l'établissement d'un partenariat stratégique fondé sur le respect mutuel entre les deux parties. Cette conversation s'est étendue au-delà des préoccupations sur l’immigration…
L'Union européenne ne devrait pas chercher à atteindre ses objectifs sans tenir compte de nos intérêts et de nos priorités. Nous visons à cultiver un partenariat exempt d'exploitation et d'ingérence dans nos affaires intérieures. La partie européenne a dit comprendre cela et être d’accord avec ces principes. Ils ont exprimé, en outre, leur volonté de reconsidérer leurs perspectives, même en ce qui concerne les questions de démocratie et de droits de l'homme. Cependant, ce n'est pas ce qui s'est produit. Peut-être parce que certains pays de l'Union européenne sont divisés et que les points de vue de leurs experts les ont influencés, empêchant un changement de mentalité. [...] Nous leur avons fait comprendre la nécessité impérative d'un changement dans cette façon de penser, en soulignant que nous ne demandons pas d'aide.
Nous rejetons toute déformation de la situation, notamment concernant les soixante millions de dollars destinés à faire face à la pandémie du Covid-19. Nous leur avons dit que la Tunisie n'était pas à l'origine de la pandémie du Covid-19, du conflit ukrainien, de la situation en Libye ou du climat. Malheureusement, ils ne reconnaissent aucune responsabilité partagée et, dans nos circonstances difficiles, ils formulent des exigences qui sont, par essence, impossibles à satisfaire…
Ils nous demandent de fermer la porte à l'émigration clandestine, alors que nous faisons de notre côté ce qu'ils ne font pas ».
Nabil Ammar a accusé l’Union européenne de vouloir mettre en place un projet d'installation de migrants en Tunisie.
« Ils travaillent activement pour orienter la Tunisie dans cette direction en exerçant des pressions à travers les médias et en faisant des déclarations sur l'effondrement potentiel de l'économie tunisienne, comme en témoignent les propos de Joseph Borrell. Cela semble être un prélude à des pressions sur la Tunisie pour qu'elle assume le rôle de « gardien » de l'Europe et accueille les migrants illégaux. C'est totalement inacceptable » a-t-il précisé.
Sur la question des négociations avec le Fonds monétaire international (FMI), le ministre a indiqué que les responsables tunisiens ont souligné la nécessité de ne pas franchir les lignes rouges, à savoir la stabilité du pays et la protection des groupes vulnérables.
« Il est impératif de ne pas compromettre la stabilité de la Tunisie et de ne pas la mettre dans la balance. Nous sommes pleinement conscients de la nécessité des réformes économiques, qui sont déjà en cours sans incitation extérieure. Les dirigeants tunisiens et leur peuple sont les mieux placés pour déterminer la faisabilité et le calendrier de ces réformes. C'est une décision qui appartient à la Tunisie plus qu'à quiconque » a poursuivi Nabil Ammar, ajoutant que le président de la République, Kaïs Saïed, ne souhaitait pas reproduire les événements des « émeutes du pain ».
M.B.Z
N.G.M. - activiste indépendant

