
Mongi Souab, haut fonctionnaire de l’État à la retraite et frère de l’ancien magistrat et avocat Ahmed Souab, aujourd’hui incarcéré, a pris la plume pour s’adresser au président de la République tunisienne, Kaïs Saïed. Mardi 13 mai 2025, il a publié sur les réseaux sociaux une lettre ouverte au ton grave et personnel, mêlant souvenirs intimes et reproches politiques.
Il écrit à celui qu’il dit avoir été son ami, autrefois. Il évoque leurs années communes à la Faculté de droit de Tunis, à la fin des années 1970. Kaïs Saïed lui apparaissait alors comme un homme « calme, doux, bien élevé et intègre ». Ces qualités ont marqué Mongi Souab, même après que leurs chemins ont divergé. Il se remémore aussi l’époque où, jeune journaliste engagé au sein du journal Al Mustaqbal, organe du Mouvement des démocrates socialistes (MDS), il avait mené avec Kaïs Saïed plusieurs entretiens sur des sujets pointus, comme le droit constitutionnel et les systèmes électoraux. À cette période, il croyait profondément à la sincérité de ses positions.
Dans un ton plus personnel, il évoque les visites que Kaïs Saïed lui rendait à son bureau du ministère de l’Équipement. Le futur président venait y chercher des conseils pour obtenir une autorisation d’ajout d’étage à leur maison familiale. Mongi Souab raconte l’avoir accompagné dans les méandres administratifs. Plus tard, ils se croisèrent encore, au gré des sit-in de la Kasbah 1 et 2, dans des échanges d’idées parfois vifs, mais toujours respectueux.
En 2019, lorsque Kaïs Saïed se présenta à l’élection présidentielle, Mongi Souab ne le soutint pas au premier tour. Mais au second, il le fit avec enthousiasme, entraînant sa famille avec lui. Il le défendait alors auprès des sceptiques : c’est un homme calme, intègre, digne de confiance.
Aujourd’hui, la déception est immense. Mongi Souab affirme ne plus reconnaître celui qu’il appelait autrefois « mon ami Kaïs Saïed ». Depuis le 26 juillet 2021, dit-il, une fracture s’est creusée. Plus qu’une incompréhension : une rupture.
Dans un dernier paragraphe, il plaide pour son frère Ahmed Souab, devenu, selon ses mots, un opposant radical au régime du 25 juillet. Un homme qui, insiste-t-il, a mené une lutte politique et juridique, non violente, dans le respect des principes. Il exige que cet affrontement se déroule dans la dignité, sur le terrain politique, et non judiciaire. Ahmed Souab n’est pas un terroriste, clame-t-il. Il est patriote, profondément. Une loyauté envers la Tunisie que la famille Souab revendique comme un héritage.
« Vous avez sali ce patriotisme en le traitant de terrorisme », conclut Mongi Souab, avant d’appeler, d’une voix indignée, à la libération de son frère : « Relâchez Ahmed Souab ! »
M.B.Z

