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Les laissés-pour-compte du budget de l’État
24/01/2023 | 16:36
5 min
Les laissés-pour-compte du budget de l’État

 

Pour beaucoup de Tunisiens, les résultats provisoires de l’exécution du budget de l’État ne signifient rien : il s’agit juste d’un charabia incompréhensible. Or, pour les initiés ces tableaux sont une vraie mine d’or qui regorge d’informations croustillantes sur la gestion gouvernementale et sur les laissés-pour-compte du budget. Le point.

 

Tout d’abord commençons par faire le point sur les chiffres communiqués par le ministère des Finances.

On apprend ainsi que le déficit budgétaire a baissé de 4,91% sur les dix premiers mois de 2022, passant de -4.724,5 millions de dinars (MD) fin octobre 2021 à -4.492,4 millions de dinars fin octobre 2022. Les recettes de l’État ont augmenté de 20,53% pour cette période évoluant de 26.158 MD à 31.530,3 MD, dont 1.564,5 MD de revenus non fiscaux, 936,3 MD de dons et 29.029,5 MD de recettes fiscales composées de 11.543,4 MD d’impôts directs (+14%) et 17.486,1 MD d’impôts indirects (+20,7%).

 

Les dépenses se sont accrues de 13,8% atteignant 35.041,4 MD contre 30.788,2 MD pour la même période en comparaison avec un an auparavant.

La plus grosse rubrique demeure la masse salariale avec plus de 17.424,3 milliards de dinars dédiés (plus de la moitié des ressources collectées) et en hausse de 4,6%. Les dépenses de la compensation ont plus que doublé par rapport à 2021, atteignant 6.041,6 MD : 1.938,8 MD pour la compensation des produits de base, 3.658,4 MD pour la compensation des carburants et 444,4 MD pour la compensation relative au transport.

Les charges de financement relatives à l’intérêt de la dette ont augmenté de 11,8% passant de 3.169,2 MD fin octobre 2021 à 3.544,6 MD fin octobre 2022, 2.019,1 MD relatifs à la dette intérieure et de 1.525,5 MD relatifs à la dette extérieure.

 

L’État tunisien a réussi à mobiliser 14.098,7 MD de ressources d’emprunt à fin octobre 2022 sur les 19.983 MD prévus dans la loi de finances rectificative 2022 : 7.678 MD d’emprunt intérieur (+53,77% par rapport à 2021) et 6.420,7 MD d’emprunt extérieur (-33,61% par rapport à 2021), dont 4.879,6 MD d’appuis budgétaires extérieurs.

Le pays a remboursé 11.240,5 MD en tant que service de la dette : le principal étant situé à 7.695,9 MD, dont 4.555,2 MD de la dette intérieure et 3.140,7MD de la dette extérieure, et un intérêt de 3.544,6 MD.

L’encours total de la dette publique a atteint 111.434,8 MD fin octobre sur les 114.142 MD prévus dans la loi de finances rectificative 2022 et représentant 82,6% du PIB du pays.

 

Première information de taille, le déficit budgétaire a baissé : il est situé à moins de la moitié du déficit prévu sur l'ensemble de l'année, le déficit prévu dans la loi de finances rectificative 2022 est de 9.308 MD.

Alors pourquoi le déficit est aussi bas ? La réponse est simple : l’État est en retard sur certaines dépenses. À fin octobre 2022, normalement le taux d’exécution des diverses rubriques du budget devrait se situer aux alentours des 83%. Or, le taux de réalisation est disparate et va d’à peine plus de 50% à plus de 100% pour certaines rubriques.

Côté ressources nous sommes à un taux de réalisation de 82% alors que côté dépense on est qu’à 74% avec des différences notables : le taux d’exécution des dépenses en salaires est de 81%, en interventions de 69% et des investissements de 68%, sachant que dans cette dernière rubrique le montant budgétisé dans loi de finances rectificative de 4183,2 MD est pratiquement la moitié de celui prévu dans loi de finances 2022 et qui est de 8.364 MD.

 

Le focus sur les ressources d’emprunt montre une grande disparité malgré un taux d’exécution de 71%. En effet, le taux d’exécution est de 105% sur le marché intérieur et seulement de 51% pour l’emprunt provenant de l’extérieur. Ce qui est en soi une suite logique de la non-conclusion de l’accord final avec le Fonds monétaire international (FMI). Concrètement et sur le terrain, l'emprunt auprès des banques tunisiennes provoque un effet d'éviction : l'État se transformant en concurrent de l'ensemble des acteurs économiques au niveau des prêts et ceci conduit à l'exclusion de certains d'entre eux.

En outre, lorsqu’on observe de près, les dépenses de compensation, le taux de réalisation est très encourageant avec 83%. Mais, dans le détail, les taux d’exécution sont très disparates : 51% pour les produits de base, 126% pour le carburant et 74% pour le transport.

Donc, l’État s’est priorisé sur le reste des acteurs économiques, en se remboursant lui-même avant le reste des acteurs économique. C’est lui qui achète le carburant et qui paye la différence de prix entre achat et vente. Or, le taux de réalisation est à 126%.

Pour les produits de base, le taux n’est que de 51%. Ainsi, les intermédiaires comme les intervenants de la filière du lait ou les boulangers à titre d’exemple, et qui ont crié à multiples reprises au scandale n’ayant pas perçu leurs dus depuis plusieurs mois, sont les laissés-pour-compte.

Bien sûr, ils ne sont pas les seuls, plusieurs fournisseurs de l’État sont dans la même situation. D’ailleurs, de nombreux d’entre eux ont déclaré faillite.

 

Autres laissés-pour-compte, les nouvelles vaches à traire de l’État, les salariés et les entreprises du circuit officiel. En effet, ce même document admet que la pression fiscale est passée de 23,3% dans la loi de finances 2021 à 24,4% dans la loi de finances rectificative 2021 à 25,4% dans la loi de finances 2022. Il ne précise pas, cependant, à combien elle passe après la loi de finances rectificative 2022.

Dans sa frénésie à remplir ses caisses pour faire face à ses obligations, l’État n’a trouvé comme boucs-émissaires que les bons payeurs d’impôts et s’est amusé à inventer diverses taxes et impôts à cet effet. Bien sûr, vu la crise, les augmentations salariales, en particulier, dans le privé n’ont pas suivi le rythme. Pire, vu son incapacité à assurer un bon rythme d’approvisionnement, provoquant de multiples pénuries de denrées notamment alimentaires, l’inflation a atteint en décembre 2022 un nouveau record jamais égalé en 38 ans : une inflation à deux chiffres de 10,1%.

 

La Tunisie traverse la pire crise jamais enregistrée depuis des décennies ! Le gouvernement Bouden peine à redresser la barre et a choisi de sacrifier une certaine catégorie de Tunisiens, les résultats provisoires de l’exécution du budget à fin octobre en témoignent.

 

Imen NOUIRA

24/01/2023 | 16:36
5 min
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Commentaires
DHEJ
Si...
a posté le 25-01-2023 à 09:08
"... La plus grosse rubrique demeure la masse salariale avec plus de 17.424,3 milliards de dinars dédiés"!


Alors comment la transformer en avantage avec une bonne régulation pour stimuler la croissance?

Dans cette masse salariale, il y a aussi le salaire qui va dans le marché parallèle...




Patriote
'?a sera meilleur
a posté le 24-01-2023 à 18:43
Tout le monde sait que les khouanjias ont tout détruit durant la décennie noire de leurs invasion et ont laissés les caisses à vide et un pays en dérive proche de la faillite et avec une dette qui est passé de 20 Mille milliards en 2012 à 120 mille milliards en 2021
Le gouvernement Bouden à hérité de cette situation catastrophique et ont travaillé dur pour arrêter la descente du pays au enfer du club de paris malgré tout les obstacles des khouanjias et surtout des supposés syndicalistes de l UGTT de Hached allah yzrhmou
Des voyous qui ont aimés le pouvoir de l'ingérence dans les affaires de l état qu ils ont eu durant la décennie des envahisseurs incompétents et qu ils n'acceptent pas de revenir à leur vrai tâche de syndicaliste
Ils savent bien que les caisses sont vides et malgré cela ils annoncent des grèves dans tous les secteurs demandant des majorations salariales
J ai bien aimé cet article qui analyse bien les lois des finances d une manière arithmétique mais avec une intention de nous montrer l'incompetence du pouvoir actuel en cachant les vérités et en ne pas mentionnant les vrais responsables
Dommage de voir le 4eme pouvoir en tunisie qui participe au complot des khouanjias et de saboter le travail très dur que fait le gouvernement actuel ey surtout en débarrassant notre pays de la gangrène Cancéreuse des khouanjias


ABDELHAMID CHORFA
Les vraies raisons de la débâcle
a posté le à 19:37
Tout à fait d'accord avec votre analyse. Les frérôts arrivés après l'événement de Sidi Bouzid ont confisqué la révolte (la révolution?!) et se sont comportés en conquérants sauvages pour s'accaparer le butin 'Tunisie'.
Kaies hérite d'une mise à sac en règle et paradoxalement de l'obstruction qu'opère l'UGTT, frustrée de ne pas avoir son mot à dire dans le processus politique du président. Elle craint d'avoir après les législative d'être réduite à faire du syndicalisme alors qu'elle a toujours fait de la politique en se mêlant des affaires du pouvoir abusivement.
Tunisino
Il faut le dire
a posté le 24-01-2023 à 17:18
La Tunisie a besoin de ses fils excellents et qui croient à l'excellence pour la mettre pour la première fois et une fois pour toute sur les rails du progrès durable. Ses fils médiocres et qui ne croient qu'à la médiocrité ont été essayés, ils ne sont que des catastrophes. La Tunisie a besoin d'une vingtaine d'années pour revenir aux indicateurs de 2010 (phase Sauver), ce qui donne une idée sur la traitrise cuisante de la deuxième république qui a fait perdre aux tunisiens une trentaine d'années de développement. Ensuite vient la phase Vivre et Se développer, qui doit demander quelques dizaines d'années, pour mettre la Tunisie sur le bon chemin, pour des générations. Le travail doit s'axer sur le projet socioéconomique, à qui un régime politique centriste et modéré doit s'accommoder. Les littéraires et les illettrés ont causé assez de dégâts à la Tunisie, ils sont très mauvais en gestion, ils doivent se retracter pour laisser les vraies compétences sauver, faire vivre, et développer la Tunisie.
TRE
Un putschiste tunisien a dit en passant !
a posté le 24-01-2023 à 16:44
"On ne peut rien acheter avec la prospérité, mais la prospérité rend gros, stupide, paresseux et malade.

Ce sont les pisse-froid qui veulent transformer 50 dinars en 100 dinars.

Je peux très bien me passer de ce genre de choses."