alexametrics
lundi 05 mai 2025
Heure de Tunis : 03:13
Chroniques
La Tunisie mérite mieux que ça
04/04/2015 | 16:01
5 min


« Béji Caïd Essebsi est un maître du discours » disait Moez Sinaoui. Que le porte-parole défende le président est on ne peut plus naturel. Les gaffes, maladresses et autres approximations en matière de communication ont été imputées au talent de « communicateur né » de cet as du discours. Soit ! Ce maître de la parole a, semble-t-il, inventé un « nouveau jeu politique », qu’il est seul à maîtriser…et à comprendre et qui échapperait, visiblement, aux citoyens lambda. Tout serait donc calculé et le moindre petit mot, pouvant être perçu comme un égarement par les néophytes, serait voulu et bien étudié.

 

Mais les faits disent tout à fait autre chose. Dimanche dernier, lors de la marche républicaine contre le terrorisme, organisée au Bardo pour commémorer la mort de Tunisiens et d’étrangers tués lors de la fusillade du 18-Mars, le président a encore gaffé. Alors que des chefs d’Etat étaient venus de plusieurs pays du monde exprimer leur solidarité à la Tunisie, l’accueil présidentiel était pour le moins approximatif et cafouilleux. Le président français, François Hollande, qui pourtant n’avait rien à voir, de près ou de loin, avec son défunt prédécesseur, a été pris pour François Mitterrand par notre président local. Si cette maladresse, qui relève de la simple anecdote, a été rapidement repêchée par Béji Caïd Essebsi qui, sourire aux lèvres, a pris son homologue dans les bras, les images d’officiels, de citoyens et de journalistes bousculés par un service de sécurité dépassé et sur le qui-vive, avaient plus de mal à passer.

Des invités refoulés car non reconnus par les membres de la Garde présidentielle et des journalistes sommés de s’éloigner car voulant faire leur travail de « trop près », l’organisation était loin des attentes. Le tout donnait l’impression d’une présidence incapable de faire face aux défis et situations qui menacent la Tunisie aujourd’hui. Cette image a été renforcée par une réplique, prononcée par un président agacé et en colère, à l’adresse de journalistes français pourtant accrédités pour s’approcher du cortège présidentiel. « Foutez-nous la paix quand même merdre ! », leur avait lancé BCE. Il ne s’agit malheureusement que de la bourde de trop.

Tout aussi décevant, le discours présidentiel, improvisé le jour de l’attaque du Bardo. Un discours de circonstance, froid et détaché, prononcé par un président cafouilleur qui aurait pu prendre le même ton pour annoncer l’Aïd El Fitr aux Tunisiens. On est loin, donc, de la figure de rassembleur proclamée par BCE et qui aurait dû être manifeste suite à un événement national aussi tragique.

 

 

« François Mitterrand est celui que je connaissais de mon temps », avait rétorqué BCE à son lapsus face à François Hollande. Force est de reconnaître que le président octogénaire se perd. Entre une époque révolue, à laquelle il appartient certes, et une nouvelle aux impératifs différents, il ne sait plus sur quel pied danser.

En réalité, Béji Caïd Essebsi a réussi, depuis son ascension, une accumulation de maladresses. Ses discours ont été marqués par une communication approximative et des paroles irréfléchies. Il patauge encore et n’arrive toujours pas à trouver le style qu’il veut, ou doit, imposer à la présidence. Et c’est justement là en soi un véritable saccage de l’image de l’institution présidentielle. Entre un président « jeune » qui écoute du rap et qui communique sur les réseaux sociaux avec ses électeurs et un Bourguiba des temps modernes dont il n’hésite pas à emprunter gestuelle, codes vestimentaires et répliques, BCE perd le nord. On en attendait mieux, en théorie, d’un « loup » de la politique qui a opéré pendant 50 ans et qui disait connaitre tous les rouages de la politique.

 

 

Force est de reconnaitre que Béji Caïd Essebsi était mieux lorsqu’il était candidat à la présidence. Au début de sa campagne, ses discours étaient plus rassembleurs et plus « passionnés ». Des bourdes, il en avait certes faites auparavant, mais ses discours convainquaient. On se rappellera tous de la fois où la vice-présidente de la Constituante n’était rien d’autre qu’une « simple femme »  ou de celle où il a appelé un journaliste à « aller se faire voir » parce qu’il l’a interrompu lors de son discours. Et pourtant, ces fautes ne lui ont pas coûté sa place à la tête de l’Etat. La concurrence n’était pas rude, à l’époque, et pour nombreux, du moins ceux qui ont voté pour lui, entre Marzouki et BCE, le choix était vite fait. Mais des bourdes, il n’arrêtera pas d’en commettre tout au long des quelques mois qui ont marqué son mandat. Un mandat qui n’est encore qu’à son début.

 

N’oublions pas que Béji Caïd Essebsi a été, pour nombreux Tunisiens, un président par défaut qu’ils avaient élu pour ne plus voir un Moncef Marzouki faire des siennes à Carthage. Il est donc le fruit du fameux « vote utile » et on n’attendait, en réalité, pas beaucoup de lui. Il fallait simplement qu’il fasse « mieux » que l’ancien locataire de Carthage, et la tâche n’était pas bien compliquée. Ceci dit, à regarder de près, les mêmes erreurs semblent se répéter.

 

Comparer Béji Caïd Essebsi à Moncef Marzouki c’est ne pas placer la barre très haut. Estimer que le nouveau président est un parfait tribun car ses improvisations tranchent avec les élucubrations farfelues d’un président au style décalé, n’est pas vraiment très ambitieux.

« Vous vouliez qu’on vous débarrasse de Moncef Marzouki ? ». Eh ben BCE l’a fait. Il a été présenté comme l’alternative évidente. Aujourd’hui encore, ses partisans continuent à le défendre bec et ongles. En effet, hormis ceux qui l’avaient élu par défaut, beaucoup avaient vu en Béji Caïd Essebsi « l’homme de la situation ».

Le constat n’en est que plus triste. Dans les faits, BCE ne livre aucune vision et ne raconte aucune histoire. Dans sa volonté de déposer sa marque, il se perd dans son fameux « prestige de l’Etat ». Une formule toute faite, adoptée pour rappeler qu’un fond de dictature était encore voulu par le peuple. Une formule qui lui permettrait d’être perçu comme l’héritier de Bourguiba qui devait sauver le pays du marasme dans lequel il se trouvait. Et s’il ne l’était tout simplement pas ? Le prestige de l’Etat ne se résume, invraisemblablement, pas uniquement au port de cravate…

04/04/2015 | 16:01
5 min
sur le fil
Tous les Articles
Suivez-nous
Commentaires (62) Commenter
Ne vous sous-estimez pas!!
salimo
| 12-04-2015 15:47
D'un regard exterieur,j'ai envie de lancer un fort message aux Tunisiens qui est ceci: Tunisiens,ne vous sous estimez pas.. la revolution Francaise est resté presque un siecle pour se stabiliser.A mediter
journalistes méprisants!
cimba
| 10-04-2015 10:02
Mr BCE a été largement élu par des tunisiens qui connaissaient pertinemment son age! Si les journalistes n'acceptent pas le verdict des urnes alors ils peuvent toujours changer de pays!!
@ Jojo (Réveillez-vous cher Mr )
EL-OUAFI
| 08-04-2015 18:25
Êtes-vous conscients de ce que vous nous suggérez.
Liberté d'expression oblige, on peut écrire tout ce qu'on veut et tu ne peux t'opposer, quant à l'anonymat elle n'y est pas car avec ton adresse e-mail et ( I P) tu ne peux pas échapper à la justice si le cas se présente, toutes tes coordonnées sont affichées, Vrai nom, adresse, opérateur inter net pays, donc l'anonymat n'existe pas. amitiés.(manai.) le 08/04/2015
P S : Mme tajine est dans son droit d'écrire tout ce qu'elle désire et à ce sujet elle a parfaitement raison, ne l'aviez pas vu comment ce Mr est perdu il ne sait plus où il est (à l'assemblée Nationale) en France, non il est dépassé par les événements, bravo Synda Tajine
bonne occasion
cimba
| 08-04-2015 17:36
Mme Tajine, vous avez raté une très bonne occasion de vous taire par ce que le président que vous critiquez a été élu par 55% de l'électorat tunisien. Arrêtez de mépriser le peuple SVP.
@ jojo
CHDOULA
| 06-04-2015 14:42
jojo un peu de calme , on est lundi , il faut y aller lentement le matin et pas trop vite le soir , en attendant que le 1er ministre et BCE donnent leurs avis sur la presse numérique , continuons à profiter de nos pseudos et nos anonymats !!!!
@CHDOULA
Jojo
| 06-04-2015 14:41
En effet ça se passe comme ça chez YouTube: afin de pouvoir commenter chez YouTube, il faut avoir un Compte YouTube (être inscrit sous son vrai nom) avec possibilité de choisir un pseudonyme.
@ jojo
CHDOULA
| 06-04-2015 13:53
Excusez ,j'ai oublié le z ( commencez à la place de commence ) . je reste poli et courtois malgré l'anonymat !!!!!!
@CHDOULA
Jojo
| 06-04-2015 13:42
Il est permit d'avoir un pseudonyme mais seulement il faut s'inscrire avec son vrai nom tout en choisissant un pseudonyme, auprès de Business News par exemple, avant de pouvoir participer aux discussions.

La réforme de la presse numérique est indispensable en Tunisie, sinon nous allons vers le collapse et l'anarchie entre les mains des nouveaux anarchistes qui sont les internautes (je corrige: j'ai écrit ci-dessous monarchie au lieu d'anarchie)

Je suis prêt à m'identifier par mon propre nom, si la règle est valide pour tout le monde (sinon, on me dénigrera avec ma réforme du journalisme numérique)
@ jojo L'ANONYME !!!!!!!!!
CHDOULA
| 06-04-2015 13:05
ok mais commence d'abord par vous identifier sauf si votre nom est JO et votre prenom est JO et si c'est le cas , chapeau bas jojo !!!!!
Futilités
Ataturk
| 06-04-2015 13:05
Pourquoi s'attarder sur des futilités? Se tromper de noms peut arriver à n'importe qui indépendamment de son âge.
Dire Mitterrand au lieu de Hollande a fait rire ce dernier, alors que chez nous, on en fait un drame!