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Tunisie - Le recouvrement, obstacle majeur à la pérennité de l'entreprise

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L'économie tunisienne est certes en train de vivre une des plus dures périodes de son histoire, pour d'innombrables raisons, dont la continuité des protestations et mouvements sociaux, la réticence des investisseurs, la mauvaise gouvernance des opérateurs politiques et économiques, et la continuité de l'instabilité sécuritaire…
Les entreprises sont déjà accablées par ces difficultés économiques et par ce retard du rétablissement de l'élan économique occasionné par la spécificité de cette phase transitoire, mais face à la problématique de recouvrement, il y va de la pérennité et de la survie de la majorité des entreprises.
Vu l'importance de la question, le Centre des Jeunes Dirigeants (CJD), en collaboration avec l'association allemande Konrad-Adenauer-Stiftung, a organisé une rencontre-débat intitulée : "La problématique du recouvrement en Tunisie, enjeu majeur pour la pérennité de l'entreprise", samedi 27 avril 2013 à Tunis.
Ayant pour objectif d'analyser le rôle de l'efficacité des procédures de recouvrement, de faire un état des lieux des défaillances en matière de délais de paiement en Tunisie, de proposer des améliorations visant à réduire les risques des impayés et les délais abusifs de paiement, le débat était axé sur trois principes : la démarche préventive, la définition exhaustive des conditions générales de vente et les différentes méthodes de l'action de recouvrement des créances arrivés à échéances.
Outre la participation des institutions organisatrices, avec notamment l'intervention de Wafa Makhlouf, présidente du CJD, Slim Ben Ammar, chargé de la commission de recouvrement au CJD et Hardy Ostry, représentant permanent de Konrad-Adenauer-Stiftung, on a noté la participation des représentants des autorités, à l'instar de Lamia El Kateb, sous-directeur du Registre central de commerce (INNORPI) et Ali Chebbi, conseiller économique auprès du chef du gouvernement et également membre du Conseil d'Administration de la Banque Centrale de Tunisie (BCT). Par ailleurs, l'Ordre des Experts Comptables de la Tunisie (OECT) était également présent avec l'intervention de son président Nabil Abdellatif.
Le débat a démarré avec la présentation par Hassan Zargouni, directeur général de Sigma Conseil, d'une enquête sur l'état des lieux des entreprises tunisiennes face à la problématique de recouvrement. Le sondage a, selon M. Zargouni, porté sur 208 entreprises, d'activités et d'emplacements divers, donc assez représentatives. En fait, sur ces entreprises, 58 % proviennent du secteur des services et 42%, du secteur de l'industrie.
En ce qui concerne le mode paiement utilisé par ces entreprises, le sondage révèle que les paiements par chèques vient en tête des modes de revouvrement avec un taux de 40%, suivis des virements bancaires avec 31%, ensuite viennent les traites avec 16% et enfin les paiements en espèces avec 13%.
Par ailleurs, Sigma Conseil a enquêté sur le délai moyen entre la date d'émission des factures et celle du paiement, pour parvenir à une moyenne de 54 jours pour les clients et 53 jours pour les fournisseurs. D'une manière plus générale, les délais dépassant 60 jours représentent 36% soit le taux le plus élevé, alors que les délais de plus de 90 jours atteignent 12% et les délais de plus de 120 jours ne dépassent pas 4,7%. Mais, selon M. Zargouni, en termes de montants, les données ne sont pas forcément dans le même ordre de grandeur, c'est-à-dire que les délais et les montants n'évoluent pas d'une manière proportionnelle.
Arrivant aux conclusions émanant de cette enquête, M. Zargouni a affirmé que si on simulait une conversion des délais en pourcentages par rapport aux chiffres d'affaires des entreprises, les retards de paiements pourraient être considérés comme étant des postes d'emploi perdus. Ainsi, les délais de paiement tardifs accentuent d'une manière indirecte le taux de chômage.
En outre, un constat s'impose, étant le fait que seules de rares entreprises prévoient des pénalités de retard, donc les pratiques n'incitent pas au respect des dates de recouvrement prévues.
Autre lacune du système en place en matière de recouvrement, est selon M. Zargouni, l'absence du concept du bureau de crédit ou "credit bureau" qui peut être défini comme étant une organisation qui acquiert et compile les antécédents de crédit des particuliers. Les informations recueillies par ce credit bureaus sont, par la suite, utilisées par les établissements financiers pour évaluer leur risque et les possibilités d'octroi de crédit et par conséquent adapter les crédits à la situation de l’emprunteur. Il se trouve qu'en Tunisie, cette organisation fait défaut et la visibilité des banques est donc quasi nulle.
Les mécanismes juridiques pour la gestion des contentieux sont également jugés défaillants. Ali Chebbi, intervenant en sa qualité de membre du Conseil d'Administration de la BCT, a considéré que les textes juridiques présentent plusieurs lacunes, d'où la nécessité de réformer la loi en vigueur. M. Chebbi a rappelé que compte tenu du tissu entrepreneurial basé à 96% sur les business familiaux, les entreprises sont sujettes à un problème de gouvernance interne. Il a également rappelé que la circulaire de la BCT datant de 2011 a prévu le rééchelonnement et la consolidation des créances dont ont bénéficié près de 70% des entreprises, dans le cadre d'une politique de relance. Sauf que cette circulaire n'est plus opérationnelle. Et compte tenu du fait que le système bancaire tunisien est un système de crédit, il devient utile de proposer des solutions, par le biais de réformes juridiques. Il a, à ce titre, affirmé l'existence de 72 projets de lois en cours d'élaboration.
De son côté Lamia El Kateb a mis en exergue le rôle indéniable du registre central de commerce qui fournit les données chiffrées et détaillées, révélant l'état de santé de l'entreprise. Le non respect des sociétés aux mises à jour obligatoires des registres de commerce, restent cependant le plus grand obstacle contre l'instauration de la transparence des entreprises, condition sine qua none pour l'amélioration de leur visibilité.
Plus concrètement, plusieurs entreprises de nos jours risquent gros, et pour cause, la non solvabilité de leurs créances. La problématique de notre modèle économique relève, en fait, de la vente à crédit. Souvent, l'entreprise se trouve contrainte à attendre indéfiniment de percevoir ses honoraires et de toucher le prix de ses services ou marchandises. Ainsi, à moins d'une réglementation claire et prévenante et l'instauration de benchmarks réglementaires à l'échelle internationale, en vue d'améliorer les délais de recouvrement, toute entreprise risque de sombrer dans une agonie alarmante.
En économie, comme en politique, l'heure est grave et il faudrait que dirigeants de sociétés, financiers, experts ainsi qu’autorités compétentes, se penchent, tous, sur la question cruciale qu'est le recouvrement et agissent pour garantir la pérennité des entreprises.
Les entreprises sont déjà accablées par ces difficultés économiques et par ce retard du rétablissement de l'élan économique occasionné par la spécificité de cette phase transitoire, mais face à la problématique de recouvrement, il y va de la pérennité et de la survie de la majorité des entreprises.
Vu l'importance de la question, le Centre des Jeunes Dirigeants (CJD), en collaboration avec l'association allemande Konrad-Adenauer-Stiftung, a organisé une rencontre-débat intitulée : "La problématique du recouvrement en Tunisie, enjeu majeur pour la pérennité de l'entreprise", samedi 27 avril 2013 à Tunis.
Ayant pour objectif d'analyser le rôle de l'efficacité des procédures de recouvrement, de faire un état des lieux des défaillances en matière de délais de paiement en Tunisie, de proposer des améliorations visant à réduire les risques des impayés et les délais abusifs de paiement, le débat était axé sur trois principes : la démarche préventive, la définition exhaustive des conditions générales de vente et les différentes méthodes de l'action de recouvrement des créances arrivés à échéances.
Outre la participation des institutions organisatrices, avec notamment l'intervention de Wafa Makhlouf, présidente du CJD, Slim Ben Ammar, chargé de la commission de recouvrement au CJD et Hardy Ostry, représentant permanent de Konrad-Adenauer-Stiftung, on a noté la participation des représentants des autorités, à l'instar de Lamia El Kateb, sous-directeur du Registre central de commerce (INNORPI) et Ali Chebbi, conseiller économique auprès du chef du gouvernement et également membre du Conseil d'Administration de la Banque Centrale de Tunisie (BCT). Par ailleurs, l'Ordre des Experts Comptables de la Tunisie (OECT) était également présent avec l'intervention de son président Nabil Abdellatif.
Le débat a démarré avec la présentation par Hassan Zargouni, directeur général de Sigma Conseil, d'une enquête sur l'état des lieux des entreprises tunisiennes face à la problématique de recouvrement. Le sondage a, selon M. Zargouni, porté sur 208 entreprises, d'activités et d'emplacements divers, donc assez représentatives. En fait, sur ces entreprises, 58 % proviennent du secteur des services et 42%, du secteur de l'industrie.
En ce qui concerne le mode paiement utilisé par ces entreprises, le sondage révèle que les paiements par chèques vient en tête des modes de revouvrement avec un taux de 40%, suivis des virements bancaires avec 31%, ensuite viennent les traites avec 16% et enfin les paiements en espèces avec 13%.
Par ailleurs, Sigma Conseil a enquêté sur le délai moyen entre la date d'émission des factures et celle du paiement, pour parvenir à une moyenne de 54 jours pour les clients et 53 jours pour les fournisseurs. D'une manière plus générale, les délais dépassant 60 jours représentent 36% soit le taux le plus élevé, alors que les délais de plus de 90 jours atteignent 12% et les délais de plus de 120 jours ne dépassent pas 4,7%. Mais, selon M. Zargouni, en termes de montants, les données ne sont pas forcément dans le même ordre de grandeur, c'est-à-dire que les délais et les montants n'évoluent pas d'une manière proportionnelle.
Arrivant aux conclusions émanant de cette enquête, M. Zargouni a affirmé que si on simulait une conversion des délais en pourcentages par rapport aux chiffres d'affaires des entreprises, les retards de paiements pourraient être considérés comme étant des postes d'emploi perdus. Ainsi, les délais de paiement tardifs accentuent d'une manière indirecte le taux de chômage.
En outre, un constat s'impose, étant le fait que seules de rares entreprises prévoient des pénalités de retard, donc les pratiques n'incitent pas au respect des dates de recouvrement prévues.
Autre lacune du système en place en matière de recouvrement, est selon M. Zargouni, l'absence du concept du bureau de crédit ou "credit bureau" qui peut être défini comme étant une organisation qui acquiert et compile les antécédents de crédit des particuliers. Les informations recueillies par ce credit bureaus sont, par la suite, utilisées par les établissements financiers pour évaluer leur risque et les possibilités d'octroi de crédit et par conséquent adapter les crédits à la situation de l’emprunteur. Il se trouve qu'en Tunisie, cette organisation fait défaut et la visibilité des banques est donc quasi nulle.
Les mécanismes juridiques pour la gestion des contentieux sont également jugés défaillants. Ali Chebbi, intervenant en sa qualité de membre du Conseil d'Administration de la BCT, a considéré que les textes juridiques présentent plusieurs lacunes, d'où la nécessité de réformer la loi en vigueur. M. Chebbi a rappelé que compte tenu du tissu entrepreneurial basé à 96% sur les business familiaux, les entreprises sont sujettes à un problème de gouvernance interne. Il a également rappelé que la circulaire de la BCT datant de 2011 a prévu le rééchelonnement et la consolidation des créances dont ont bénéficié près de 70% des entreprises, dans le cadre d'une politique de relance. Sauf que cette circulaire n'est plus opérationnelle. Et compte tenu du fait que le système bancaire tunisien est un système de crédit, il devient utile de proposer des solutions, par le biais de réformes juridiques. Il a, à ce titre, affirmé l'existence de 72 projets de lois en cours d'élaboration.
De son côté Lamia El Kateb a mis en exergue le rôle indéniable du registre central de commerce qui fournit les données chiffrées et détaillées, révélant l'état de santé de l'entreprise. Le non respect des sociétés aux mises à jour obligatoires des registres de commerce, restent cependant le plus grand obstacle contre l'instauration de la transparence des entreprises, condition sine qua none pour l'amélioration de leur visibilité.
Plus concrètement, plusieurs entreprises de nos jours risquent gros, et pour cause, la non solvabilité de leurs créances. La problématique de notre modèle économique relève, en fait, de la vente à crédit. Souvent, l'entreprise se trouve contrainte à attendre indéfiniment de percevoir ses honoraires et de toucher le prix de ses services ou marchandises. Ainsi, à moins d'une réglementation claire et prévenante et l'instauration de benchmarks réglementaires à l'échelle internationale, en vue d'améliorer les délais de recouvrement, toute entreprise risque de sombrer dans une agonie alarmante.
En économie, comme en politique, l'heure est grave et il faudrait que dirigeants de sociétés, financiers, experts ainsi qu’autorités compétentes, se penchent, tous, sur la question cruciale qu'est le recouvrement et agissent pour garantir la pérennité des entreprises.
Dorra Megdiche Meziou
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