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Tunisie - Mendicité : le business qui rapporte

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La mendicité est une "profession" qui rapporte, vraisemblablement, bien, voire même trop bien. Un business juteux qui se laisse s’organiser dans une économie souterraine florissante et aux ramifications multiples, notamment dans les périphériques et les quartiers nécessiteux de la capitale. Les mendiants s’ingénient, souvent, à gêner les âmes charitables pour les pousser à glisser la main dans la poche en usant et abusant d’une une stratégie de marketing émotionnelle, avec, au passage, quelques effets spéciaux. Vêtus d’habits déchirés et sales, les pieds nus, la main tendue et tordue, l’air triste et dédaignable, la plupart des mendiants se font passer pour des handicapés, physiquement et mentalement, afin d’attendrir les passants. Le montant du jackpot varie également d'une machine à sous (l’âme charitable) à l'autre, mais en moyenne la bonne recette de «la manche» quotidienne oscille entre 60 et 100 DT.
Monia Arfaoui, notre consœur de l’hebdomadaire arabophone "EL Ousbouî", vient de réaliser une excellente enquête sur le terrain publiée dans l'édition du 11 janvier 2010. Elle s'est ainsi déguisée en mendiante "professionnelle" afin de franchir la frontière et de s’incruster en plein cœur de ce monde étrange. Une fois en plein dans cet "underworld", notre consœur s’est trouvée dans une véritable fabrique de faux mendiants. Une vraie mafia. Ces derniers ont leur propre quartier, la cité "Ouicha", connue couramment sous le nom de la cité des "Toullabs" (signifiant mendiants). Un quartier nécessiteux ? Non, pas du tout. Il faut dire que les recettes de la mendicité ont éradiqué tout aspect de pauvreté et de misère. Un quartier résidentiel avec des villas de luxe, des logements moins luxueux, des voitures ainsi que toutes les commodités de la vie moderne. Une image qui contredit, de fond en comble, les stéréotypes et les images que l'on pourrait avoir des vrais nécessiteux. Elle s’est trouvée face à des imposteurs qui altèrent notre perception quant aux vrais nécessiteux et à ces gens humbles qui n'ont pas la possibilité de subvenir à leurs propres besoins.
Notre consœur s’est bien installée dans son nouveau repaire. Ce n'était pas facile pour elle de gagner la confiance de ces gens du fait que la plupart des ces personnes rejettent tout corps étranger. Le rejet est un phénomène naturel dans la "colonie" des suspicieux mendiants. Ainsi, l'essor de la greffe de notre consœur n'aurait pas été possible si elle n’a pas épuisé toutes les manœuvres possibles et imaginables afin de mériter son nouveau statut de mendiante professionnelle. Et voilà ce qu’il en ressort de son enquête : une vérité pas toujours bonne à entendre, faut-il l’admettre. Les millimes et les dinars qu’on nous soutire servent, plutôt, à faire la fortune de ces imposteurs.
Car c’est bel et bien de profession ignoble qu’il s’agit. Les mendigots œuvrent souvent dans les coins les plus féconds, en termes de victimes potentielles, de la capitale : les boulevards et rues, aux portes des mosquées, les stations, les métros, les cafés, les restaurants, les jardins publics,…et ne soyez pas surpris si, un jour, vous tombez sur un mendiant dans votre réfrigérateur ou dans le coffre à bijoux de votre femme. On est loin de l’ironie déplacée et grinçante, les faits montrent que la capitale regorge chaque jour de mendiants attirés par l’appât de l’argent facile. Passant pour de faux handicapés, ils usent d’un vocable attendrissant qui gêne les passants en les incitant et en les poussant à mettre la main dans la poche. En cas d’échec, ce même vocable se transforme, par miracle, en un langage répugnant ordurier voire insultant.
Pis encore, il n’y a pas que les effets spéciaux pour faire apitoyer les gens. Les professionnels, les vieux de la vieille dans le métier exploitent, inhumainement, les bébés, les enfants, les petites filles et les adolescents. Loués le matin, les enfants sont rendus le soir, après le boulot, à leurs familles, payées d’avance. Sous le sceau de l’anonymat, certaines sources affirment que la location grimpe en prix les vendredis, à l’occasion de la prière du vendredi, durant le mois de Ramadan, pendant les jours fériés et à l'occasion des fêtes religieuses.
A vrai dire, toute une journée dans la rue, pour un bébé ou un enfant, n’est pas sans dégâts. Et si la récolte varie entre 60 et 100 DT, pour les plus chanceux, c’est aux chefs-adultes que reviennent les fruits des aumônes et des oboles. Pire encore, ces enfants risquent d’attraper cette épidémie de mendicité. Contaminés dès leur prime enfance, ils se convertiront à leurs tours pour agrandir la tribu, assurant ainsi la continuité de la lignée.
Autrement dit, la mendicité n’est plus un simple et unique phénomène socioculturel. Il s’agit, également, d’un business qui répond à un organigramme hiérarchique et basique. En plus des mendiants qui exercent en électrons libres, dans certains cas de figures, les mendiants s’organisent dans le cadre d’un groupe dirigé par un leader. Ce dernier assure le "dispatching" de son staff en procédant à un découpage géographique du territoire. Après un petit briefing, le groupe se disperse, chacun pour une zone bien déterminée, soit dans la capitale, soit encore dans les autres gouvernorats du pays. Car s’il est vrai que les quartiers de la capitale sont les plus abordables, les marchés hebdomadaires, les souks, dans un bon nombre de régions font également couler la salive des mendiants. Ce découpage répond à une double finalité : atténuer les rivalités entre les frères du même métier et augmenter, exponentiellement, les revenus.
Faux mendiants le matin, nouveaux riches le soir, les comptes d'épargne et les propriétés privées de ces «professionnels» trahissent la prolifération d’un commerce juteux et rentable. Face à la clémence de la loi en vigueur, les nouveaux imposteurs continuent leur quête quotidienne de l’argent facile, entachant l’image de la Tunisie, qui n’a pas lésiné sur les efforts pour réduire le seuil de la pauvreté jusqu’à 3,8%.
Néanmoins, Il ne faut pas oublier qu’il y a encore quelques vrais nécessiteux qui s’abstiennent, pourtant en toute dignité, de tendre la main. Ceux-ci ont besoin d’aide et de solidarité. Toute la difficulté réside à savoir distinguer le vrai nécessiteux, qui mendie par besoin, de l'imposteur comédien qui vous apitoie par son jeu. Concernant les faux mendiants, au vu de leur richesse dissimulée qui s'accroît en douceur et en catimini, les autorités publiques concernées sont appelées à frapper fort afin que le phénomène ne gagne pas en ampleur. Très souvent, on les voit arrêter ces mendiants. Mais une fois la brigade chargée de les choper disparaît, ils reviennent de plus belle ! Précisons pour finir que le phénomène est répandu dans le monde entier, y compris les pays les plus développés.
Monia Arfaoui, notre consœur de l’hebdomadaire arabophone "EL Ousbouî", vient de réaliser une excellente enquête sur le terrain publiée dans l'édition du 11 janvier 2010. Elle s'est ainsi déguisée en mendiante "professionnelle" afin de franchir la frontière et de s’incruster en plein cœur de ce monde étrange. Une fois en plein dans cet "underworld", notre consœur s’est trouvée dans une véritable fabrique de faux mendiants. Une vraie mafia. Ces derniers ont leur propre quartier, la cité "Ouicha", connue couramment sous le nom de la cité des "Toullabs" (signifiant mendiants). Un quartier nécessiteux ? Non, pas du tout. Il faut dire que les recettes de la mendicité ont éradiqué tout aspect de pauvreté et de misère. Un quartier résidentiel avec des villas de luxe, des logements moins luxueux, des voitures ainsi que toutes les commodités de la vie moderne. Une image qui contredit, de fond en comble, les stéréotypes et les images que l'on pourrait avoir des vrais nécessiteux. Elle s’est trouvée face à des imposteurs qui altèrent notre perception quant aux vrais nécessiteux et à ces gens humbles qui n'ont pas la possibilité de subvenir à leurs propres besoins.
Notre consœur s’est bien installée dans son nouveau repaire. Ce n'était pas facile pour elle de gagner la confiance de ces gens du fait que la plupart des ces personnes rejettent tout corps étranger. Le rejet est un phénomène naturel dans la "colonie" des suspicieux mendiants. Ainsi, l'essor de la greffe de notre consœur n'aurait pas été possible si elle n’a pas épuisé toutes les manœuvres possibles et imaginables afin de mériter son nouveau statut de mendiante professionnelle. Et voilà ce qu’il en ressort de son enquête : une vérité pas toujours bonne à entendre, faut-il l’admettre. Les millimes et les dinars qu’on nous soutire servent, plutôt, à faire la fortune de ces imposteurs.
Car c’est bel et bien de profession ignoble qu’il s’agit. Les mendigots œuvrent souvent dans les coins les plus féconds, en termes de victimes potentielles, de la capitale : les boulevards et rues, aux portes des mosquées, les stations, les métros, les cafés, les restaurants, les jardins publics,…et ne soyez pas surpris si, un jour, vous tombez sur un mendiant dans votre réfrigérateur ou dans le coffre à bijoux de votre femme. On est loin de l’ironie déplacée et grinçante, les faits montrent que la capitale regorge chaque jour de mendiants attirés par l’appât de l’argent facile. Passant pour de faux handicapés, ils usent d’un vocable attendrissant qui gêne les passants en les incitant et en les poussant à mettre la main dans la poche. En cas d’échec, ce même vocable se transforme, par miracle, en un langage répugnant ordurier voire insultant.
Pis encore, il n’y a pas que les effets spéciaux pour faire apitoyer les gens. Les professionnels, les vieux de la vieille dans le métier exploitent, inhumainement, les bébés, les enfants, les petites filles et les adolescents. Loués le matin, les enfants sont rendus le soir, après le boulot, à leurs familles, payées d’avance. Sous le sceau de l’anonymat, certaines sources affirment que la location grimpe en prix les vendredis, à l’occasion de la prière du vendredi, durant le mois de Ramadan, pendant les jours fériés et à l'occasion des fêtes religieuses.
A vrai dire, toute une journée dans la rue, pour un bébé ou un enfant, n’est pas sans dégâts. Et si la récolte varie entre 60 et 100 DT, pour les plus chanceux, c’est aux chefs-adultes que reviennent les fruits des aumônes et des oboles. Pire encore, ces enfants risquent d’attraper cette épidémie de mendicité. Contaminés dès leur prime enfance, ils se convertiront à leurs tours pour agrandir la tribu, assurant ainsi la continuité de la lignée.
Autrement dit, la mendicité n’est plus un simple et unique phénomène socioculturel. Il s’agit, également, d’un business qui répond à un organigramme hiérarchique et basique. En plus des mendiants qui exercent en électrons libres, dans certains cas de figures, les mendiants s’organisent dans le cadre d’un groupe dirigé par un leader. Ce dernier assure le "dispatching" de son staff en procédant à un découpage géographique du territoire. Après un petit briefing, le groupe se disperse, chacun pour une zone bien déterminée, soit dans la capitale, soit encore dans les autres gouvernorats du pays. Car s’il est vrai que les quartiers de la capitale sont les plus abordables, les marchés hebdomadaires, les souks, dans un bon nombre de régions font également couler la salive des mendiants. Ce découpage répond à une double finalité : atténuer les rivalités entre les frères du même métier et augmenter, exponentiellement, les revenus.
Faux mendiants le matin, nouveaux riches le soir, les comptes d'épargne et les propriétés privées de ces «professionnels» trahissent la prolifération d’un commerce juteux et rentable. Face à la clémence de la loi en vigueur, les nouveaux imposteurs continuent leur quête quotidienne de l’argent facile, entachant l’image de la Tunisie, qui n’a pas lésiné sur les efforts pour réduire le seuil de la pauvreté jusqu’à 3,8%.
Néanmoins, Il ne faut pas oublier qu’il y a encore quelques vrais nécessiteux qui s’abstiennent, pourtant en toute dignité, de tendre la main. Ceux-ci ont besoin d’aide et de solidarité. Toute la difficulté réside à savoir distinguer le vrai nécessiteux, qui mendie par besoin, de l'imposteur comédien qui vous apitoie par son jeu. Concernant les faux mendiants, au vu de leur richesse dissimulée qui s'accroît en douceur et en catimini, les autorités publiques concernées sont appelées à frapper fort afin que le phénomène ne gagne pas en ampleur. Très souvent, on les voit arrêter ces mendiants. Mais une fois la brigade chargée de les choper disparaît, ils reviennent de plus belle ! Précisons pour finir que le phénomène est répandu dans le monde entier, y compris les pays les plus développés.
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