
La crise du lait ne risque pas de s’estomper et les raisons sont multiples. Selon Mohamed Aziz Bouhajba, un ingénieur agronome membre fondateur du syndicat des agriculteurs. Il a affirmé que le secteur continuera à pâtir des coûts élevés de production et du manque d’entretien qui perdurent depuis des années.
Invité de Hatem Ben Amara dans la matinale de Jawhara FM, il explique que le secteur du lait a connu son apogée dans les années 90 grâce à des politiques de gouvernance efficaces. La Tunisie a, d’ailleurs, atteint son auto-suffisance vers la fin de 1999 et a commencé à exporter du lait.
Plus tard, comme le secteur fonctionnait bien, il a été délaissé, selon Mohamed Aziz Bouhajba. Au lieu de le moderniser, de l’entretenir et de chercher des solutions aux problématiques des différentes composantes du secteur, il a été négligé jusqu’à miner le stock stratégique.
L’agriculteur précise que les troupeaux de vaches laitières en Tunisie ont rapetissé de par la diminution de leur production. Plus de 40% des troupeaux ont été abandonnés par les producteurs, selon ses dires. La moyenne de production de lait par vache ne dépasse pas, assure-t-il, 18 litres alors que la moyenne à l’étranger est de 25 à trente litres.
Deux raisons sont derrière cette chute de production. La première est en lien avec la disponibilité des fourrages qui représente jusqu’à 70% du coût de production pour les agriculteurs. La seconde est la race bovine importée en Tunisie. La Prim’Holstein est, selon ses dires, la race dominante dans le cheptel. La diminution de sa productivité par rapport au potentiel s’explique par la qualité de la ration alimentaire. La généralisation de cette race est une erreur selon l’agriculteur de par sa sensibilité. Le pays aurait dû, à son sens, introduire d’autres races bovines.
Sur la question des fourrages, il ajoute que plusieurs types de fourrages ne peuvent être produits en Tunisie, notamment la soje. Le maïs coûte moins cher à l’importation qu’à la production. Le triticale peut, cependant, remplacer jusqu’à 80% l’alimentation à base de maïs.
L’agriculteur souligne que les épisodes de sécheresse dus au changement climatique ne sont pas non plus à négliger. Leurs répercussions sur la disponibilité de l’alimentation animalière étant considérables.
Interpellé sur une éventuelle stratégie d’État pour palier à cette problématique, M. Bouhajba signale que la stratégie élaborée en 2010 est restée dans les tiroirs. Pour ce qui est de la contribution de l’office des fourrages créé sur ordre du président de la République, le rôle demeure incompréhensible pour les agriculteurs.
N.J
