
Pour les Tunisiens résidents à l’étranger, la question de la double imposition fiscale revient souvent. Dois-je payer des impôts en Tunisie alors que je travaille déjà dans un autre pays ? Que se passe-t-il si mon pays d’accueil n’impose pas les revenus ? Et si je suis binational ? Cet article propose un décryptage clair, illustré par des cas concrets et des conseils pratiques.
La double imposition survient lorsqu’un même revenu est imposé deux fois : une première fois dans le pays de résidence fiscale et une seconde dans le pays d’origine, ici la Tunisie. Cela peut devenir un véritable casse-tête administratif et financier.
Premier cas : la résidence dans un pays sans accord fiscal avec la Tunisie. Par exemple, un Tunisien vivant au Nigeria ou au Kenya. En l’absence de convention bilatérale de non-double imposition, la Tunisie considère que tout contribuable qui garde des liens fiscaux avec le pays peut être imposé sur ses revenus mondiaux. Ces liens sont établis si la personne passe plus de 183 jours par an en Tunisie, y maintient un foyer, une activité professionnelle ou des intérêts économiques, ou encore perçoit des revenus de source tunisienne. Dans ce cas, la Tunisie peut imposer les revenus même si le pays d’accueil les taxe déjà. C’est la double imposition réelle. Pour l’éviter, il est recommandé d’obtenir un certificat de résidence fiscale étrangère, de justifier que son foyer et ses intérêts principaux sont à l’étranger, et de déclarer ses revenus de manière transparente.
Deuxième cas : la résidence dans un pays avec accord fiscal, mais sans impôt sur le revenu. Exemple : un Tunisien travaillant au Qatar. Le Qatar ne prélève aucun impôt sur les revenus des personnes physiques. Pourtant, il existe une convention fiscale entre la Tunisie et le Qatar depuis 2003. Cela peut donner l’illusion d’une immunité totale vis-à-vis de l’impôt tunisien. Mais attention : si des attaches fiscales sont conservées avec la Tunisie, le contribuable peut être considéré comme résident fiscal tunisien et donc imposable en Tunisie. Cela concerne, par exemple, ceux qui ont laissé leur famille en Tunisie ou y possèdent un bien immobilier. Il est conseillé de clarifier son statut de non-résident fiscal en Tunisie avec des preuves concrètes : contrat de travail local, bail de logement, attestation de résidence. Il faut éviter toute situation floue ou ambigüe vis-à-vis de l’administration fiscale.
Troisième cas : les binationaux. Contrairement à ce que certains croient, le statut civil (binational ou non) ne change rien à la fiscalité tunisienne. Ce qui compte, c’est la résidence fiscale, définie par les articles 4 et 5 du Code de l’IRPP et de l’IS. Par exemple, un Franco-Tunisien vivant en France ne sera pas imposable en Tunisie sur ses revenus français si sa résidence fiscale est clairement établie en France, conformément à la convention de non-double imposition signée en 1973 entre les deux pays.
En cas de doute, il est important de vérifier sa résidence fiscale. Passe-t-on plus de 183 jours à l’étranger ? La famille vit-elle en Tunisie ? Un contrat local existe-t-il ? Il faut aussi consulter la liste des conventions fiscales internationales disponibles sur le site du ministère tunisien des Finances. Il est recommandé de demander un certificat de résidence fiscale étrangère auprès du fisc local, d’éviter les ambiguïtés (comme garder des revenus non déclarés en Tunisie) et, en cas de doute, de consulter un fiscaliste.
En conclusion, la double imposition est un risque réel mais évitable. Il ne suffit pas d’être à l’étranger pour échapper à l’impôt en Tunisie. Tout dépend de la résidence fiscale, des conventions en vigueur et de la transparence vis-à-vis des autorités fiscales. Mieux vaut prévenir que subir un redressement coûteux.