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Chroniques
La contrition d'un journal égaré
01/01/2012 | 1
min
La contrition d'un journal égaré
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Par Radhouane Somai

Ce qui suit n’est pas le delirium tremens causé par une biture monstrueuse de la Saint-Sylvestre. Intriguée par les considérations ou plutôt la vision que se fait Rached Ghannouchi de la liberté de la presse et des médias, qui ne devraient être qu’une sorte de héraut de la joie de vivre ou bien une caisse de résonnance des desideratas populaires (comprenez du parti au pouvoir), la rédaction de Business News a décidé de jouer le jeu. Le temps d’une édition nous nous mettons à l’information en mode guimauve à la violette…
Nous avons entendu et nous avons obéi...

Les sentences ex cathedra de Monseigneur Ghannouchi ne pouvaient laisser insensibles que les cœurs des scélérats. Genou à terre, poing serré contre la poitrine, regard baissé et voix suppliante nous nous repentons d’avoir joué pendant toute l’année aux oiseaux de mauvais augure…
Cette année fut rude pour les nerfs. Les événements, bouleversements, rebondissements qui ont émaillé ces douze derniers mois dépassent tout ce qu’on a connu pendant un demi-siècle de torpeur dictatoriale. Quatre présidents en un an, il fallait le vivre pour le croire.

Et de mémoire de journaliste, jamais on aura entendu autant de foutaises pendant un si court laps de temps. L’ennemi public numéro 1 Ali Seriati et son don d’ubiquité : emprisonné à la caserne de l’Aouina, on attrape son avatar à Ben Guerdane. Farhat Rajhi et son gouvernement de l’ombre militaro-affairiste dont le dévoilement mit le pays à feu et à sang le temps d’un weekend. Moncef Ben Salem et les confidences faites par le secrétaire particulier de Moufida Bourguiba digne d’un conte d’Edgar Allan Poe…

Et Business News a péché par orgueil, mais aussi par cynisme, ou naïveté… Une révolution, une nouvelle époque que nous pensions propice à l’émergence d’une nouvelle presse. Démêler le vrai du faux, démasquer les cabales, appuyer là où ça fait mal, s’enfoncer comme une épine dans le flanc du politique… le rôle du journaliste est, pensions-nous ingénument, d’éclairer mais surtout d’enquiquiner.

Sit-in, grèves, inflation, chômage, insécurité, pénurie de lait ou de farine, montée de l’extrémisme, menaces terroristes, instabilité le long de nos frontières, cacophonie politique… le peuple n’en a que faire ! Le peuple est heureux, le peuple se nourrit d’espoir et d’eau fraîche… Oui, il a suffi d’une étude internationale commandée par on ne sait qui pour nous clouer définitivement le bec.
Sur l’échelle de l’espoir personnel, le Tunisien se classe juste deuxième derrière le Nigérian devançant l’Ouzbek et le Saoudien… Notre Cheikh vénéré a compris ce qu’on n’a pas tout de suite vu : « la misère est moins pénible au soleil ».
Vox populi, vox dei… Le peuple ne veut plus avoir le cafard, le peuple veut du bonheur ? Qu’à cela ne tienne ! Business News répandra la bonne humeur comme on prêche la bonne parole.

A regarder de plus près et en faisant un travail sur nous-mêmes, tout ne prêtait pas à la sinistrose. Des motifs de satisfaction, des épisodes cocasses ou hilarants on n’en a pas manqué. Rappelez-vous : Moncef Marzouki débarquant comme le messie tant attendu et qui se fait briser ses très vilaines lunettes ; Farhat Rajhi qui s’est fait chaparder son manteau et son téléphone portable dans son bureau du ministère de l’Intérieur ;les nuits à la belle étoile pendant les sit-in de la Kasbah I et II ; les moutons, casse-croûtes, paquets de cigarettes offerts pendant la campagne électorale ; la déculottée de Slim Riahi et son siège à trois MDT ; Hachmi El Hamdi grisé par le succès de ses listes aux élections qui pousse la chansonnette ; Brahim Kassas qui se fait traiter de péteur (bassas) par un élu du CPR ; Tonton Taher H’mila à qui il a suffi deux, trois déclarations pour faire exploser le Congrès ; les Tom et Jerry d’Ettakatol Khemaïs Ksila et Mohammed Bennour qui se rentrent dans le chou à chaque sortie médiatique…
Qui pourrait, après tout cela, s’inquiéter de futilités telles que la séparation des pouvoirs, l’indépendance de la justice, de la Banque centrale ou de la presse, le droit des minorités…

Business News fait amende honorable et se met à l'autosuggestion positive. Par patriotisme, par responsabilité civique, pour une année 2012 faste, sans ombres ni fausses notes, nous ne relayerons que les news qui favorisent la sécrétion de la vitamine D, de la dopamine et de l’endorphine…

Nous comptabiliserons tous les trains qui arrivent à l’heure au lieu de faire tout un tapage pour un train qui déraille bêtement causant des pertes en vies humaines irréversibles…
Nous féliciterons tous les automobilistes qui respectent les limites de vitesse en refusant de faire de la publicité à ces fous furieux du volant roulant à tombeau ouvert ou prenant la route après la soirée arrosée du réveillon…
Pourquoi parler des entreprises au bord de la banqueroute et omettre celles qui résistent courageusement aux soubresauts de l’agitation sociale et des tribulations de l’économie mondiale ?
Pourquoi s’acharner sur les erreurs de la Troïka, ses revirements, ses dissensions internes alors que le pays réclame l’union sacrée des Tunisiens pour se remettre sur le chemin de la croissance et du développement ?
Pourquoi insister sur des détails futiles de constitutionalistes sous le prétexte d’entorses à la démocratie balbutiante alors que le Tunisien a seulement besoin de sécurité et de pain pour le moment ?

Désormais, promis juré, nous ne parlerons que des hommes et femmes politiques qui tiennent leurs promesses, des agents de l’administration qui sourient, des chauffeurs de taxi qui acceptent une course sans maugréer, des policiers qui comptent jusqu’à sept avant de dégainer leur matraque, des gamins qui mangent les légumes et finissent leurs assiettes, et, surtout, que des journées où il fait au moins 27°…

Joyeuse année 2012 à tous, que Dieu guide notre Premier ministre provisoire sur le chemin du califat éclairé et longue vie à notre cher et vénéré guide de la révolution Cheikh Rached Ghannouchi…


Cet article a été publié dans l’édition satirique spéciale du 1er janvier 2012.
Une édition qui fait suite à la campagne demandant aux médias de cesser de dénigrer le travail du gouvernement, d’aller dans le sens de la volonté du peuple et de penser à l’intérêt du pays.

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