alexametrics
jeudi 01 mai 2025
Heure de Tunis : 05:06
Tribunes
Tous des Hattab Slama en devenir
22/04/2025 | 08:40
3 min
Tous des Hattab Slama en devenir
 
 
Par Mohamed Salah Ben Ammar*

 
 
 
Hattab Slama, un Tunisien ordinaire et commerçant automobile sans antécédents politiques a déjà purgé une peine de deux ans de prison. Son unique "crime" : avoir garé sa voiture au mauvais endroit et au mauvais moment. Pire encore, il n’était même pas au volant. Cette coïncidence anodine, son véhicule stationné devant le domicile d’un autre accusé, l’a plongé dans une accusation grotesque de "conspiration contre la sûreté de l'État". Quarante accusés, un total de 922 années de prison cumulées, et pour Hattab, quatre années de sa vie dérobées.
 
 
Un procès mené dans l’ombre de la nuit
 
Le témoignage de sa sœur est glaçant : une famille dévastée, cherchant désespérément à comprendre le mécanisme infernal qui a broyé cet homme étranger à toute intrigue politique. Jugé à Tunis, tel un malfaiteur ordinaire, Hattab a été condamné dans les obscures heures du 18 au 19 avril 2025, à 5 heures du matin, sous une vigilance policière stricte, loin des regards des médias et des observateurs. Ce fut une parodie de justice, où le délibéré a été expédié, bâclé, sans le moindre semblant de débat contradictoire.
 
 
Des peines décidées à l’avance
 
Les sentences prononcées sont d’une logique déroutante : 66 ans pour l'homme d'affaires Kamel Letaïef, 48 ans pour Khayam Turki, 43 ans pour l'ex-ministre Noureddine Bhiri, et même Bernard-Henri Lévy écope de 33 ans. Ce dossier ne relève pas d'une simple erreur judiciaire, mais d'une obscénité flagrante. Hattab certes, mais les autres ne sont pas mieux traités. C’est un procès politique où la justice a été foulée aux pieds, gravant un nouveau chapitre terrifiant dans les annales de l’absurde.
 
 
Une mascarade judiciaire : absence de "preuves" et verdict nocturne
 
Qualifier ce procès de mascarade c’est un euphémisme. Pas le moindre début de preuve, aucun témoin crédible, des accusations reposant sur des rumeurs anonymes relayées à l’ambassade de Tunisie à Bruxelles par un mystérieux "XX". Un juge d’instruction en fuite. La liste des incohérences dans ce procès pourrait remplir des pages, illustrant le summum de l’injustice. Un verdict rendu sans la présence des accusés, sans réquisitoire ni plaidoirie dignes de ce nom, à une heure où les honnêtes citoyens dorment.
 
 
Urgence de réformes structurelles : libérer la justice des griffes de l’exécutif
 
Le cas de Hattab Slama n’est que la partie visible d’un iceberg judiciaire pourri. Il est essentiel de briser les chaînes qui entravent la magistrature, de créer un véritable Conseil Supérieur de la Magistrature indépendant, et de revoir les décrets liberticides. Il est primordial de limiter l’accumulation des charges pour éviter d’écraser les individus sous le poids d’accusations multiples et souvent infondées. Le pouvoir législatif doit enfin exercer un contrôle sur l’exécutif, et une commission d’enquête parlementaire, avec obligation de transparence, doit examiner ces pratiques honteuses.
 
 
Appel à la mobilisation de la société civile : le silence est complice
 
Citoyens, associations, avocats, médias, organisations internationales : il est temps de passer de l’indignation passive à l’action. L'inaction équivaut à une approbation. On peut ne pas approuver les idées des uns ou des autres, ni même leurs prises de position ; on a même le droit de ne pas les aimer tout simplement, mais nul n’a le droit de rester indifférent à l’injustice. La démocratie ne prospère pas sur les décombres de l'État de droit ; elle exige un respect scrupuleux des libertés et une protection indéfectible des plus vulnérables.
 
 
Nous sommes tous des Hattab Slama
 
Chacun devrait se retrouver en Hattab Slama, car il incarne le citoyen ordinaire. Son nom doit devenir un cri de ralliement pour tous ceux qui aspirent à une justice véritable. Afin que "l'absurde" et l’injustice ne s’installent jamais comme norme.
 
 

Professeur de médecine et ancien ministre de la Santé


22/04/2025 | 08:40
3 min
Suivez-nous
Commentaires
Mohamed Obey
Je joins ma voix à celle de l'auteur.
a posté le 22-04-2025 à 20:49
Il faut urgemment faire régner le droit. Si Hattab Slama été lésé par le système judiciaire, il faudra le dédommager. Nous voulons que le présent exécutif réussisse à dépasser les multiples difficultés et résoudre les complexités!
Sarra
Tous en sursis
a posté le 22-04-2025 à 09:30
Tous des Hattab Slama en sursis. Tous coupables jusqu'à preuve du contraire.... bienvenue en Tunisie