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Nidaa Tounes : Le congrès de la dernière chance
07/01/2019 | 19:59
5 min
Nidaa Tounes : Le congrès de la dernière chance

 

Après un parcours émaillé de péripéties diverses depuis la victoire de 2014, le parti Nidaa Tounes tente de se rassembler. Un calendrier détaillé a été annoncé pour un congrès de la dernière chance qui doit se tenir début mars. Toutefois, cette réunion n’a pas rassuré et les déclarations incendiaires de Hafedh Caïd Essebsi n’ont pas arrangé les choses.

 

C’est sur fond de guerre ouverte avec la Kasbah que s’est tenue, le 6 janvier 2019, une réunion du congrès des commissions régionales durant laquelle le calendrier du congrès national électif a été dévoilé. Ce congrès, prévu les 2 et 3 mars 2019, a pour objectif de régler de manière transparente le problème de légitimité dont il souffre depuis l’accession au pouvoir de son fondateur, Béji Caïd Essebsi. Le leadership de Nidaa Tounes a non seulement multiplié les gaffes et les mésaventures mais a également été remanié plusieurs fois. La manœuvre ayant conduit à l’élection de Yassine Ayari à l’ARP ou le message frileux de Hafedh Caïd Essebsi en pleine élection municipale auraient suffi pour mettre en doute les compétences de n’importe quel leader politique. Mais Hafedh Caïd Essebsi jouit de l’immunité que lui offre son nom, puisque son père reste le seul légitime à Nidaa Tounes, étant son fondateur. 

 

Le rêve absolu des dirigeants de Nidaa Tounes est de parvenir à recréer la dynamique de 2014 en vue des élections de 2019. Pou ce faire, il faudra élire un leadership consensuel derrière lequel tout le monde pourra se ranger. Ce n’est certainement pas avec un secrétaire général en fuite à l’étranger et un comité politique contesté que la conquête du pouvoir pourra se faire. D’un autre côté, il est utopique de penser que Nidaa Tounes présentera un projet politique complet avec un programme réalisable. Il se basera sur son supposé héritage bourguibien et jouera sur la peur qu’inspirent les islamistes.

Autre obstacle de taille qui entrave toute possibilité de succès de Nidaa Tounes : Hafedh Caïd Essebsi. Ses défenseurs et ses laudateurs diront probablement que cela s’inscrit dans une campagne orchestrée visant leur chef dévoué. C’est justement à cause de ce genre de comportements que les patrons de Nidaa Tounes sont restés isolés de leurs bases en plein effritement. Le parcours de HCE à la tête de Nidaa Tounes a été pour le moins chaotique. Sa dernière décision en date, à savoir l’incorporation de l’Union patriotique libre au sein du parti, a été pour le moins hasardeuse. Slim Riahi, catapulté secrétaire général, se trouve aujourd’hui en fuite à l’étranger à cause de ses casseroles judiciaires. L’intégration des députés UPL dans le bloc Nidaa n’a pas apporté à ce dernier le poids nécessaire pour peser sur la marche de l’ARP et pour contrer le bloc de la coalition nationale.

 

Hafedh Caïd Essebsi a continué sur la même voie juste après la réunion du weekend en multipliant les déclarations guerrières. D’abord, il s’est attaqué à tous ceux qui ont « osé » claquer la porte de Nidaa Tounes alors que le prochain congrès de début mars devait être placé sous le signe du retour des cadors du parti. Il a déclaré que tous ceux qui ont quitté Nidaa n’ont rien fait de notable et qu’ils ont tous formé des coalitions de « zéro virgule ». Ce n’est pas vraiment indiqué lorsqu’on cherche à attirer vers le parti ses anciennes compétences. D’autre part, Hafedh Caïd Essebsi se plaint du fait que Ennahdha, en utilisant tantôt Youssef Chahed tantôt Boujemâa Remili, essaye de détruire Nidaa Tounes. Toutefois, cela est tout à fait légitime en politique. Il n’y a qu’à voir comment Emmanuel Macron a détruit la gauche et la droite françaises pour devenir président de la République. Par ailleurs, Hafedh Caïd Essebsi et son parti n’ont pas vraiment de leçons à donner concernant Ennahdha puisqu’ils sont les instigateurs du fameux consensus qui a gouverné la Tunisie pendant près de 4 ans.  

 

Nidaa Tounes semble vouloir se lancer, sous la houlette de Hafedh Caïd Essebsi, dans une double guerre contre Youssef Chahed et son projet politique d’un côté, et Ennahdha de l’autre côté. Un choix pour le moins risqué car Nidaa Tounes ne dispose pas des armes nécessaires pour ouvrir deux fronts de la sorte. Cette présomption fera de Nidaa Tounes un parti « zéro virgule » comme se plait le fils du président à le répéter en guise d’insulte. Ceci est confirmé par deux faits : le premier est que Ennahdha continue à tenir le parlement malgré toutes les gesticulations du bloc de Nidaa Tounes concernant la Loi de finances par exemple ou concernant le fonds de la dignité. Du côté de Youssef Chahed, le bloc de Nidaa Tounes a été obligé de se ranger du côté du chef du gouvernement lors de la nomination de Hichem Fourati à la tête du ministère de l’Intérieur en faisant une impressionnante volte-face. Il aurait sûrement été plus utile à Nidaa Tounes de laisser une place pour la discussion avec la Coalition nationale et Youssef Chahed au lieu de claironner qu’il s’agit « d’un dirigeant de quatrième rang » parce que, en attendant, c’est ce même Youssef Chahed qui mène sa barque et qui est en train de les mettre sur la touche.

 

En fait, le seul vrai ciment qui pourrait rassembler ce qui reste de Nidaa Tounes n’est ni un congrès ni un programme. Le seul capable de réaliser cette prouesse est Béji Caïd Essebsi qui annoncerait sa candidature à l’élection présidentielle. C’est le seul à jouir d’une légitimité figée et intouchable, celle du fondateur du parti. Toute autre considération est à écarter pour les leaders de Nidaa Tounes qui s’empresseront de se tirer dans les pattes, congrès ou pas. Tous se bousculent, comme il y a quatre ans, pour se placer au mieux auprès de Béji Caïd Essebsi et de son fils. C’est dans cette espérance que les principaux leaders du parti, dont Sofiène Toubel par exemple, multiplient les appels du pied envers le président en l’assurant du soutien total de Nidaa Tounes. Mais le vieux briscard de la politique sait parfaitement que Nidaa Tounes n’existerait pas sans lui et que surtout, il n’a aucun avenir sans lui.

 

Marouen Achouri

07/01/2019 | 19:59
5 min
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Commentaires (1)

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le déçu
| 08-01-2019 07:20
QU'il s'agisse de BCE ou de nidaa, l'avenir est derriére eux ! et bon débarra! ILS ONT tellement trahi!