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Commerce parallèle : Quand Mohsen Hassen jette un pavé dans la mare
23/02/2016 | 19:58
5 min
Commerce parallèle : Quand Mohsen Hassen jette un pavé dans la mare

 

Au moment où le débat bat son plein sur les moyens de lutte contre le commerce parallèle en Tunisie, le ministre du Commerce, Mohsen Hassen, a lancé une véritable « bombe » dans la mare en annonçant sa disposition à ouvrir le dialogue avec les plus grands contrebandiers avec l’objectif d’intégrer ceux qui le désirent au circuit officiel, notamment en les aidant par les idées de projets, le financement et la commercialisation.

 

 

Le ministre du Commerce, fraîchement débarqué à La Kasbah, a rappelé, lors d’une récente interview, la semaine dernière, la création de la Commission nationale de suivi des prix, de la garantie de la périodicité de l’approvisionnement du marché et de la lutte contre la contrebande et le commerce parallèle et qui aura comme mission de combattre ce fléau et de réduire la part de l’économie parallèle, d’ici 2020, à 20%, de l’ensemble de l’économie nationale, au lieu du taux actuel dépassant plus de 50%.

 

Il a précisé, également en réponse à une question, que les services sécuritaires et douaniers possèdent une liste bien détaillée et actualisée des acteurs majeurs dans ce domaine.

Cette baisse sera possible, selon M. Hassen, à travers plusieurs décisions, à l’instar de la mise en place de zones franches et l’intensification des contrôles aux points de passages frontaliers et à l’intérieur du pays.

 

Or, devant le tollé soulevé par cette proposition, considérée comme insolite et inopportune, le ministre du Commerce a dû se raviser par le biais d’un post publié, aujourd’hui mardi 23 février 2016 sur la page officielle de son compte Facebook.

Sur son compte Facebook, le ministre du Commerce, Mohsen Hassan, a tenu à clarifier ses propos publiés dans certains médias relatifs à l’ouverture de négociations avec les barons de la contrebande.

 

Mohsen Hassan, précise, dans ce texte, que ses propos ont été déformés en soulignant qu’il demeure partisan d’une approche prônant la nécessité de trouver une solution globale pour lutter contre la contrebande. Une approche impliquant tous les facteurs adéquats, à savoir, ceux sécuritaires, militaires et socio-économiques.

 

Le ministre du Commerce précise encore dans le même post que son département s’engage à soutenir et à accompagner les contrebandiers qui ne sont pas impliqués dans le terrorisme ni dans des affaires de droit commun. Pour lui, ceux-là devront s’investir dans les secteurs réguliers afin de s’intégrer à l’économie nationale en s’acquittant de leur devoir fiscal.

Mohsen Hassen fait remarquer, à la fin de son texte,  que cette solution a été adoptée dans d’autres cas comme au niveau des frontières américano-mexicaines ou hispano-marocaines.

 

Selon une étude effectué en 2015 par la Banque mondiale (BM), il ressort que le commerce parallèle aux frontières terrestres tunisiennes entraîne des pertes fiscales pour l'Etat tunisien, évaluées à 1,2 milliard de dinars, dont 500 millions de dinars sont des droits de douane.

Les auteurs de l'étude estiment que la lutte contre la contrebande en Tunisie, phénomène qui s'est, d’ailleurs, répandu après la révolution, doit passer, notamment, par une révision des prix et une libéralisation de certains produits, l’objectif étant de réduire les écarts entre les tarifs appliqués en Tunisie et ceux adoptés dans les territoires voisins, en l'occurrence, la Libye et l'Algérie.

 

La même étude a recommandé aux autorités tunisiennes de renforcer le contrôle en modernisant les moyens adoptés avec l'objectif de limiter l'impact du commerce illicite sur l'économie et améliorer les conditions de vie des populations vivant dans les zones frontalières.

Les résultats ont fait état d'une valeur de commerce transfrontalier entre la Tunisie et ses voisins libyen et algérien, dépassant les 1,8 milliard de dinars, soit -5% du total des importations officielles. Ce chiffre représente plus de la moitié du commerce officiel avec la Libye et il est supérieur au commerce avec l'Algérie, a noté l'étude.

 

D'après la même étude, l'importance de ce commerce transfrontalier s'explique par les niveaux de subventions appliquées des deux côtés des frontières et aussi par la quasi-absence de la pression fiscale à la consommation, notamment en Libye.

Les enquêtes de terrain à la frontière libyenne ont fait ressortir des différentiels des prix majeurs entre la Tunisie et la Libye, notamment pour des produits comme l'huile de maïs, les bananes, les pommes, l'essence, le mazout, et les climatiseurs.

 

Plus concrètement et à titre d'exemple, le litre d'essence et de mazout est vendu en Tunisie respectivement, au moment de l’étude, à 1,57 et 1,7 dinars alors qu'on pouvait les acheter en Libye à seulement 0,19 dinar !

L'étude montre que l'ensemble des marchandises est revendu en Tunisie, pour une valeur annuelle de près de 600 millions de dinars. Elle a indiqué que la plus-value du commerce de carburant dépasse de loin celle des autres produits, estimée à une moyenne annuelle de 44 millions de dinars.

 

Du côté de la frontière algérienne, les enquêtes de terrain ont montré que, là aussi, le principal produit de commerce illégal demeure, de loin, le carburant.

Selon des témoignages recueillis par les enquêteurs de la Banque mondiale, plus de 3000 camionnettes traversent, quotidiennement, la frontière tuniso-algérienne, sachant que 60% de ces véhicules sont chargés de carburant et de mazout.

L'étude fait état, dans ce cadre, d'écarts des prix concernant, notamment, les produits alimentaires (fromages, café torréfié, thé, jus, boisson gazeuse), les boissons alcoolisées, les carburants (essence, mazout), le fer rond à béton, les électroménagers et le tabac.

Pour les carburants, le litre d'essence était vendu à 1,57 dinar en Tunisie contre 0,23 dinar en Algérie et le litre de mazout coûte 1,17 dinar en Tunisie contre 0,2 dinar en Algérie.

 

Quant au profil des praticiens du commerce transfrontalier, l'étude a montré que 47% de ces personnes exerçant à la frontière libyenne sont des ouvriers journaliers.

Un pourcentage de 55% de la population interrogée a formulé le souhait d'abandonner cette activité exercée actuellement.

 

Pour ce qui est de la frontière tuniso-algérienne, 56% des personnes exerçant ce type de commerce (commerce parallèle) se considèrent comme commerçants et 31% se disent ouvriers journaliers.  Ainsi, 50% des personnes interrogées sur le futur de leur métier, souhaitent continuer leur activité commerciale et revendiquent une amélioration des conditions d'échange commercial entre les deux pays, alors que 20% espèrent changer de métiers.

 

Les experts et les spécialistes s’accordent à dire que le commerce parallèle constitue un véritable fléau hautement nuisible pour l’économie nationale et pour les recettes de l’Etat, mais personne ne peut nier le rôle, relativement positif, qu’il est en train de jouer dans les régions frontalières, dans le sens où il représente le véritable moteur économique et social.

Les mêmes analystes assurent qu’en l'absence d’investissements publics dans les régions reculées, la contrebande offre des sources de revenus et freine l’exode rural, « l’État ne pouvant pas tout laisser faire, mais ne pouvant pas, non plus, tout arrêter », expliquent les mêmes experts.

 

Sarra HLAOUI

23/02/2016 | 19:58
5 min
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Commentaires (13)

Commenter

TeTeM
| 25-02-2016 19:32
Dans un tel chantier, on peut opter pour le tout répressif et se livrer au jeu du chat et de la souris ou mettre en place une période d'amnistie pour transformer l'illégale en légal à Loi courante. C'est à dire que l'activité illégale se convertie en activité légale sans que la Loi ne change. Passé un certain délais, la répression reprend ces droits. Je trouve cette approche intéressante et pertinente. Le tout répressif à ses limites surtout après toutes ses années de laxisme!

Mohamed zarrouk
| 25-02-2016 14:18
Bjr Mesdames Messieurs,

Lecteur assidu depuis longtemps ,j'ai publié un commentaire correct le 24 courant je suis surpris qu'il est supprimé.
Merci de savoir les causes/

Cordialement Med Zarrouk


B.N : Votre dernier commentaire date du 23 Février et il n'a pas été censuré.












Ataturk
| 24-02-2016 16:23
Pourquoi pas ouvrir un dialogue avec Daech?? Il faut être naïf pour croire que les grands barons de la contrebande accepteraient facilement à renoncer à leur commerce illicite très juteux.
A moins qu'on les soumet à un chantage ***.

Nephentes
| 24-02-2016 15:10
Moi qui suis revenu au bled depuis quinze années, croyez moi c'est devenu ici un mélange de Cour des miracles et d'aile psychiatrique

On ne sait pas comment cela va finir; ce qui est sur c'est que les chances d'édification d'une société moderne et citoyenne sont faibles pour les cinq années à venir

le scénario libyen n'est pas loin, croyez moi

kameleon78
| 24-02-2016 14:21
On ne dialogue pas avec les contrebandiers, on doit les confondre et les punir. Ce ministre envoie un signal évident de laxisme aux malfaiteurs et autres criminels, un signe de faiblesse de l'état qui doit être au contraire ferme et implacable. Mais que voulez-vous faire avec un premier ministre qui porte mal son nom, il est faible et indécis, il a été nommé pour ne pas froisser le Gourou National qui l'apprécie, on sait bien que l'économie informelle est soutenue par les islamistes, c'est leur fond de commerce. Imaginez un peu l'état italien qui aurait décidé de dialoguer avec la mafia? C'est inconcevable mais en Tunisie, la logique est toute relative, les choses ne vont bien que quand tout tourne à l'envers. Je suis heureux de vivre loin de ce pays sinon je deviendrais en quelques mois dépressif, tendu et diabétique.

moha
| 24-02-2016 13:37
cela peut etre une bonne idée mais il faut faire le tri et le faire dans le sens du commerce avec respect de la loi
bien sur saisir tous les produits ilicites
pas facile de payer des taxes et des charges alors que le marché noir rapporte beaucoup plus
la 1ere chose tout raser sans negociations

Nephentes
| 24-02-2016 12:59
Décision qui officialise l'incapacité de l'Etat à :

créer des emplois pour juguler le phénomène de la contrebande, qui n'est pas uniquement une alternative au chômage mais aussi et surtout UN CHOIX de mode de vie...et un moyen de gagner facilement de l'argent en dehors de la LOI.

- la banalisation et l'officialisation de l'illégalité

- la reconnaissance par voie de ricochet des baronnies mAFIEUSES qui structurent la contrebande en tunisie, et dont le rayon d'action dépasse désormais largement le cadre de la contrebande :

blanchiment de l'argent illégal par systèmes de tontines accorées aux propritéires de petits commerces ( les falmeux HAMS)

investissement dans le secteur de la distribution de vêtements, de petits biens d'équipement, dans le secteur des pièces automobiles...

investissement dans le secteur de l'immobilier, en pleine bulle spéculative

ouverture de salons de thé et autres cafés

et même : appui familial à la création de structures d'éducation privées (on aura tout vu)

Voilà donc les puissantes baronnies de la contrebande et de la drogue officialisées, elles qui 'uvrent effectivement dans notre dynamique économique et financière depuis deux décennies.

DHEJ
| 24-02-2016 12:05
Il y a déjà le grand WZAIR Kamal JENDOUBI!


Mais bon son truc c'est les LGBT...

Drmohamed Sellam
| 24-02-2016 11:41
Non,ce doit probablement un traquenard pour les contrebandiers..Il entendait les attraper dans une chausse-trape pour les mettre sous le contrôle de l'Etat..il est malin et fort intelligent ..Il sait bien qu'on n'engage jamais de pourparlers avec des criminels.. Mais son entreprise est vouée à l'échec!!
si on les connait pourquoi ne les coffre-t-on pas..et les manoeuvres de la contrebande s'arrêtent..?c'est une question qui me taraude.En avez-vous une solution?

C . T
| 24-02-2016 10:52
Je crois que Mr le premier ministre il doit nommer un ministre de négociation.
Ce ministre il se chargera de négocier avec les contrebandiers les terroristes les voyous les grévistes et à ceux qui tentent de se suicider .
Je pense un ministre à ce poste aura du bouleau devant lui.