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Tribunes
Chers Tunisiens, nous sommes en plein délire !
08/04/2018 | 12:01
3 min
Chers Tunisiens, nous sommes en plein délire !

Par Ahlem Hachicha Chaker


Les élections municipales arrivent. Des personnes ont déposé leurs candidatures, la campagne électorale s'ouvre dans quelques jours, les électeurs sont appelés au vote. Pourquoi? On n'en sait rien. 

Mais on nous dit que c'est pour notre bien.

 

Un Code des Collectivités Locales pléthorique, qu'on veut faire voter à la hâte par des élus réticents sous la pression publique des médias et des experts.

Pour notre bien, on vous le dit.

 

 

Pourquoi nos élus sont-ils donc réticents? "Parce que les partis ne sont pas prêts pour les élections", c'est la phrase facile que l'on aime répéter ici et là. Et bien non. Les élus ont raison d'être réticents. C'est à eux qu'on fera payer le prix des engagements pris en notre nom à tous. Ils ont donc bien raison de se méfier et d'hésiter s'ils ne voient pas assez de garanties de réussite.  Des générations de Tunisiens devront vivre avec les conséquences de leur vote.

 

 

La mise en place de la décentralisation est un projet pharaonique. Un processus qui changera le quotidien des Tunisiens sur plusieurs générations, qui transformera la dynamique régionale et locale, la fiscalité, l'approche du développement, l'exercice des pouvoirs, le fonctionnement de l'administration.

Ce processus sera donc régi par le Code des Collectivités Locales. Ce texte est en gestation depuis des années. Nous en sommes à la énième version. Faut-il s'en réjouir? J'ai des doutes. Un document qui nécessite autant de versions, cela signifie soit qu'on était partis de très loin du but ou qu'on a dérivé trop loin du chemin. Quel genre de charcutage législatif a-t-on pondu?

 

Un processus aussi capital et aussi profond suppose une responsabilité et des comptes à rendre. Les élus qui voteront cette loi seront tenus responsables. Les élus issus des prochaines municipales seront tenus responsables. C'est leur mandat.

 

 

Le maillon qui manque à la chaîne de responsabilité est au niveau de l'élaboration du Code. Un texte confié à des experts, en collaboration avec la société civile. Des personnes qui produisent un texte qui changera radicalement le paysage administratif et politique du pays, qui sont certainement compétentes mais qui n'ont pas de capacité pour cela. Un ministre a une responsabilité politique. Un fonctionnaire a une responsabilité administrative. Quelle est la responsabilité des experts? Quel mandat leur a été confié? Par qui? Seront-ils là pour assurer le "service après-vente"? Qui pourra les tenir responsables plus tard? Qu'en est-il de la société civile? Pourrait-on la tenir responsable?

 

 

En 2011, des experts avaient choisi pour nous un système électoral. Ils avaient également choisi pour nous l'option d'une assemblée constituante. Des experts avaient de même choisi pour nous un régime politique parlementaire. Aujourd'hui, ce système électoral est jugé problématique. Des voix s'élèvent pour regretter le choix de la constituante. Le régime parlementaire est estimé inadapté au contexte tunisien. Il est clair que la loi électorale et le régime politique disperse l'échiquier et dilue la responsabilité politique.

 

Et vous savez quoi? Ce sont les experts à l'origine de ces idées qui appellent maintenant à réformer le régime politique et la loi électorale. Pour une meilleure représentativité de la volonté des électeurs et plus de responsabilisation des décideurs politiques.

 

 

La faute à qui messieurs, dames? On envoie la facture de ces cafouillages à qui? Quelqu'un est responsable ou pas? Une irresponsabilité totale et une impunité intolérable qui sont une insulte aux Tunisiens.

 

 

Et comme ça avait tellement bien marché, on recommence? Pour notre bien, bien sûr.

08/04/2018 | 12:01
3 min
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Commentaires (18)

Commenter

Adil
| 09-04-2018 16:59
Un autre foutoir à venir comme tout le foutoir constitutionnel dans lequel la Tunisie se débat depuis 7 ans. Ne vous faites pas d'illusions, personne ne sera responsable ni même ne se sentira responsable grâce à la phrase magique" Nous sommes tous responsable". Tout, absolument tout à refaire

DHEJ
| 09-04-2018 13:43
?

Une production au profit de qui?


Et si un vice caché?

Socrate
| 09-04-2018 13:31
La qualité de vos commentaires montre la grandeur de votre esprit et de votre intelligence!

A4
| 09-04-2018 08:11
Préparez-vous au match du 6 Mai prochain !
Quel sport et quelles règles ?
Euuuuuuuh ... on ne sait pas, ça peut être du catch, du foot, du water-polo, de la boxe, du rugby ou autre chose.
Les règles ? Il n'y en a pas !

JJ L'amoroso
| 08-04-2018 23:19
Je trouve cette ambiance regrettable.
Les Tunisiens font l'apprentissage de la liberté certes, mais aussi et surtout de devoir choisir. Ce n'est pas si facile. Pendant des siècles, on a appris aux Tunisiens, qui habitent un pays-carrefour, à louvoyer. Ce qu'ils ont fait. Et maintenant, sans formation ni préparation, on leur dit : dites clairement ce que vous voulez.
Je ne voudrais pas être à leur place ...

TMT
| 08-04-2018 20:08
J'ajouterais encore feux points:
Pour remédier autant que possible au manque de cadres dans certaines collectivités,je pense qu'il faut rechercher dans la multitude de compétences qui ont déserté leurs régions ...
Le processus est véritablement gigantesque,et il faut savoir être patient et positif surtout,car il y aura sûrement des erreurs et des embûches et ne pas espérer l'équilibre qu'après deux ou trois élections,soit d'ici l'horizon 2030#

Dr. Jamel Tazarki
| 08-04-2018 19:40
la production législative est rarement envisagée comme un travail impliquant des fonctionnaires. En effet, L'art d'écrire la loi est plutôt le fait de quelques grands juristes aux belles formules ou de professionnels rédacteurs qui assistent le législateur. On ne peut que rester vigilants quand ce sont les fonctionnaires/députés qui écrivent du droit (maladroitement) par leur plume, car cela n'a rien de rassurant (il suffit de penser a notre constitution qui a été réécrite dans sa totalité par des experts, car nos députés étaient/sont faibles en expression écrite juridique).

Par contre il serait important de garantir la neutralité des professionnels/experts!

Très Cordialement

Jamel Tazarki

Imad
| 08-04-2018 18:51
Seul Gassas a fait son travail........naivement.
Les autres ont ete des professionnels des "vols planes"

Nouri Kamoun
| 08-04-2018 18:07
Contrairement à ce que vous affirmez, en 2011; les experts de la commission Ben Achour ont proposé un scrutin uninominal à un tour ou à deux tours et que ce sont les représentants des partis dans cette commission qui ont imposé le choix du scrutin sur les listes.

Bien sûr Ennahdha voulait ce type de scrutin mais les autres représentants des partis n'étaient pas clairvoyants pour voir que ce scrutin ne leur convenait pas étant donné qu'ils n'étaient pas bien implantés
'
La suite; on la connait, Des députés hors norme et une constituante qui écrit la meilleure constitution du monde 'en seulement 3 ans.""

Forza
| 08-04-2018 17:50
Vous mettez le doigt là où ça fait mal, oui le problème de la Tunisie est le régionalisme instauré par Bourguiba et qui n'a pas ete profondément réduit par Ben Ali donc comme vous dites les décideurs (ministres, PDG, directeurs etc.) sont dans leur majorité originaire du Sahel et de Tunis, il est clair qu'ils dirigent tous les projets et tous les investissements vers leurs régions. Ils appliquent la formule "alakrabouna Awla Bilmarouf". Ils utilisent l'avantage octroyé par Bourguiba à leurs régions et veulent l'eterniser, même les postes dans les banques, les ministères etc. s'héritent maintenant donc rebelote et rien ne changera et c'est même Beni par l'UGTT. La decentralisation peut presenter une chance aux régions défavorisées. Il faut un partage clair des richesses (les critères du nombre d'habitants, superficie, etat des infrastructures, existence ou non d'universités et de centres de Formation, zones industrielles etc.) doivent être pris en considération. L'application de la discrimination positive est nécessaire car certaines régions ont trop profité ces derrières 60 ans donc plus de transfer du pouvoir central aux regions sans infrastructures mais il faut aussi s'assurer les ressources humaines et la plupart de ces ressources vivent à Tunis. L'administration centrale doit envoyer ses meilleurs éléments aux régions pour les aider à identifier et développer des projets pour leurs régions. L'objetif doit être des conditions de vie comparables sur tout le territoire et non pas comme aujourd'hui un facteur de 4 ou 5 entre la richesse à Monastir et celle de Gassrine.
Sinon ne faites pas attention à HatemC. Il est lui-même Keffi mais fait le lèche-bottes du pouvoir central et de ses "élites". Il n'a pas la fierte des kaffiyas (majabitouch enisma elkaffiya). .

Sinon je ne vois pas de risques pour l'unité du pays qui existe depuis plus de 3000 ans. Ceux qui veulent maintenir le statu quo comme Hatem parlent de scission et bla bla pour bloquer tout changement.