
L’arrestation, ce lundi 21 avril 2025, de l’avocat et ancien magistrat Ahmed Souab a déclenché une avalanche de réactions indignées de la part d’acteurs politiques, de confrères et d’organisations de la société civile. Ahmed Souab, connu pour ses prises de position critiques à l’égard du pouvoir, a été interpellé après avoir tenu des propos qualifiés de « menaçants » par les autorités à l’encontre d’un magistrat, lors d’une audience dans l’affaire dite du « complot contre la sûreté de l’État ».
Une arrestation dénoncée comme arbitraire
Samir Dilou, membre de l’équipe de défense, a qualifié, dans une déclaration à Tumedia cette arrestation d’« inacceptable » et a mis en garde contre la campagne de diffamation ayant précédé l’interpellation de son confrère. Il a affirmé que les propos tenus par Souab étaient « dans les limites du droit » et « normaux pour un homme de loi qui connaît bien le dossier ». Dilou a également confirmé que Me Souab était retenu à la caserne de Bouchoucha, privé de l’assistance de ses avocats pendant 48 heures.
Une instrumentalisation de la justice dénoncée
Hichem Ajbouni, dirigeant du parti Attayar, a vivement critiqué le recours au Code de lutte contre le terrorisme contre un opposant politique, y voyant une « stratégie de diversion » pour faire oublier les « jugements absurdes » rendus dans le dossier de la conspiration. Selon lui, cette arrestation vise à « intimider les voix libres » et à « épuiser les forces démocratiques dans des batailles judiciaires interminables ».
Hichem Ajbouni a enchaîné avec un deuxième message sarcastique et indigné. Il affirme qu’il faut être d’une naïveté extrême, voire d’une bêtise volontaire, pour croire qu’Ahmed Souab a réellement menacé un juge. Il rejette les accusations portées contre lui, qu’il qualifie de manipulation grotesque, et dénonce une tentative claire de faire taire une voix critique du régime. Pour Hichem Ajbouni, ce n’est pas le contenu du discours d'Ahmed Souab qui a motivé son arrestation, mais bien son engagement constant contre l’autoritarisme et en faveur de l’État de droit.
Un homme décrit comme intègre et engagé
L’ancien président du SNJT et militant Mahdi Jlassi a salué l’engagement constant d’Ahmed Souab auprès des jeunes militants, le décrivant comme un « homme de principes » au service de l’État de droit et des libertés. Il a rejeté toute assimilation de son action à une activité criminelle ou terroriste.
Appel à la mobilisation
Dans un communiqué, le parti Al Joumhouri a exprimé son indignation face à ce qu’il considère comme un « précédent dangereux », révélateur d’une dérive autoritaire. Le parti appelle à l’union des forces démocratiques pour défendre la liberté d’expression et l’indépendance de la justice.
De son côté, la coordination des familles des détenus politiques a dénoncé une « procédure arbitraire » et appelle à une manifestation ce soir à 18 heures, au départ de la place du Passage vers l’avenue Habib Bourguiba, pour exiger la libération immédiate de Me Souab et dénoncer « la répression croissante » visant les défenseurs des droits humains.
Le mouvement Ennahdha a dénoncé l’arrestation d'Ahmed Souab, interpellé après ses déclarations critiques lors d’une audience le 18 avril, où il avait dénoncé les pressions du pouvoir sur la justice dans le cadre de l’affaire dite du « complot contre la sûreté de l’État ». Ennahdha exprime sa solidarité avec Me. Souab, qu’elle considère comme une figure engagée pour l’État de droit, et condamne les tentatives de criminalisation des avocats critiques du régime. Le mouvement appelle à sa libération immédiate et invite toutes les forces démocratiques à s’unir face à l’escalade répressive et aux campagnes de diabolisation visant les voix dissidentes.
Hommages et soutiens
La journaliste Khaoula Boukrim, qui a interviewé à plusieurs reprises Ahmed Souab, a rendu hommage à un homme qu’elle décrit comme « l’un des plus courageux de l’histoire contemporaine de la Tunisie », soulignant son engagement sans faille pour les libertés, malgré les risques et les intimidations.
L'ancien ministre et candidat à la présidentielle, Mondher Zenaidi, a réagi à l’arrestation d'Ahmed Souab et son renvoi devant le Pôle judiciaire antiterroriste, « une nouvelle chute pour un système fondé sur l’injustice, l’impuissance, la médiocrité et l’échec. Un pouvoir qui a perdu la raison et a déclaré la guerre à la parole libre et à l’opinion divergente. Un pouvoir qui avance à grands pas vers son destin inévitable et sa fin imminente. Tout notre soutien et notre solidarité avec Ahmed Souab…Liberté pour tous les prisonniers d’opinion…».
Condamnation des violations procédurales
Le Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT) a fermement dénoncé l’arrestation « brutale » de l’avocat par une unité antiterroriste, suite à la diffusion d’une vidéo dans laquelle il critiquait le fonctionnement de la justice. Le CRLDHT y voit une atteinte grave à la liberté d’expression et dénonce l’usage abusif de la législation antiterroriste, ainsi que les violations de procédure (perquisition musclée, absence de mandat, garde à vue prolongée…).
S.H.


