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Chroniques
Un oxymore nommé Habib Jamli
Par Ikhlas Latif
22/11/2019 | 18:00
4 min
Un oxymore nommé Habib Jamli

 

Il est indépendant et il le restera, nous dit-il à chaque fois que l’occasion se présente. Lui, c’est le candidat d’Ennahdha à la présidence du gouvernement, Habib  Jamli, celui qui a été chargé de former une équipe dans un délai ne dépassant pas un mois (renouvelable une seule fois). Le nouvel élu semble être un adepte du maniement de l’oxymore. Aligner « indépendant » et « candidat d’Ennahdha » dans le même énoncé est tout au moins inconcevable.

 

Monsieur indépendant en 2019, ne l’était pas tant que ça en 2011, lorsque Hamadi Jebali a annoncé la composition de son gouvernement. A l’époque, une mention devant le nom du nouveau secrétaire d’Etat à l’Agriculture le présentait comme étant Nahdhaoui. Quand on sait qui a été à l’origine de sa propulsion sur le devant de la scène, éliminant toutes les candidatures susceptibles de lui faire de l’ombre, le doute n’est plus permis. Rached Ghannouchi installe le décor de ce qui sera le paysage politique des cinq prochaines années. Un chef de l’un des deux pôles de l’exécutif, aux ordres, maniable à souhait, l’autre chef, isolé, sans ceinture partisane et parlementaire, à Carthage et le véritable manitou au Bardo.  

Pour le moment Ghannouchi s’attèle à nous faire avaler ses couleuvres. Monsieur sans couleurs affichées, Habib Jamli mène ses concertations avec les partis et les personnalités nationales en toute autonomie. S’il négocie, à titre d’exemple, avec Qalb Tounes, ce n’est pas du fait d’Ennahdha (ses leaders excluent la participation d’un parti qu’ils taxent de corruption), c’est parce qu’il est indépendant. Ennahdha n’y peut rien et continue à brouiller les pistes, tout en se servant de la carotte d’une potentielle alliance, qu’il tournera forcément à son avantage, au détriment d’un nouveau dindon de la farce.

 

Depuis des décennies et un parcours semé d’embuches, le cheikh n’attendait que ça : s’accaparer du pouvoir pour mener à bien sa politique dont on connait tous les contours idéologiques. Les liftings opérés entre temps ne sont qu’une façon parmi tant d’autres de noyer le poisson. Cette success story a failli tourner au vinaigre, Ennahdha n’ayant obtenu que 52 sièges, n’était-ce l’apport des 38 voix de Qalb Tounes. Enfin, le dessein se réalise. Voué auparavant à la potence, Rached Ghannouchi est finalement intronisé président du Parlement tunisien.

Après ce coup de main au cheikh et le coup en traitre envers ses électeurs, Qalb Tounes s’attend donc à une forme de partenariat gouvernemental qui lui sera « ouvertement » refusé. C’est que l’alliance parlementaire, ponctuelle, est une chose et la formation du gouvernement est toute autre.

 

Ennahdha avance ses pions et peaufine sa stratégie. La désignation de Habib Jamli en est le premier épisode. S’est-on basé sur le critère de la compétence et de l’indépendance en le chargeant de former le gouvernement ? Loin de là s’en faut. Son affiliation à Ennahdha et sa loyauté envers son président est LE critère qui a motivé sa nomination. Le nouveau maître du Bardo compte bien annexer la Kasbah dans son champ d’influence. Pour ce faire et pour institutionnaliser tout ça, il prévoit de mettre en place une commission au parlement dont la seule mission sera de contrôler les actions de la présidence du gouvernement. En perspective, une réelle intention d’une mainmise totale du cheikh sur son poulain, et par truchement, les ministères et les structures gouvernementales. Si l’administration et les rouages de l’Etat n’étaient pas « acquis », comme l’énonçait à l’époque Rached Ghannouchi, cela ne saurait tarder.

Le président de l’Assemblée des représentants du peuple deviendra ainsi le véritable maître à bord en soumettant le gouvernement à son hégémonie et en étant assuré de l’isolement du chef de l’Etat. Ne disait-il pas qu’il est maintenant le président de tous les Tunisiens, en confisquant cette qualité au président de la République. ?  C’est alors que le mouvement, version « édulcorée » de la confrérie des Frères musulmans, pourra mettre en application ses projets politiques et sociétaux, avec la complicité des nouveaux dindons de la farce.

 

Par Ikhlas Latif
22/11/2019 | 18:00
4 min
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Commentaires (13)

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DIEHK :Oxymore , nom masculin * Bravo 'IL'
| 24-11-2019 21:11
Un article digne d'1 samouraï du 16ème siècle au pays du soleil levant!!
Malheureusement vous pensez qu'en Tunisie beaucoup de gens feront le rapprochement entre votre merveilleux article et son contenu et de l'incidence intellectuelle de votre article sur tout ce qui se passe actuellement en Tunisie?
Ils ne se rendent même pas compte que leur président de leur "ARP" est le maître d'oeuvre de ce futur échec annoncé
à cause du mélange des genres chez ces "terrori.." qui ont vendu leur pays aux ottomans pour rester dans votre dialectique et de ne pas gâcher mon plaisir et mon ego.
Quelle était ma surprise de lire votre référence à cet Anarchiste qu'était Charles Baudelaire et ses "Fleurs du Mal",La chevelure ou Les bijoux, Le Spleen de Paris (recueil de poèmes en prose) et les Curiosités esthétiques.
Et je me permets de donner quelques explications à mes compatriotes révolutionnaires du Lablabi et de l'inculture depuis 2011!!
Oxymore:
Synonymes (contraste er opposition.)
Figure de style réunissant deux termes antinomiques (opposés, de sens contraire).
Impressionné par le mot de
Alliance de deux mots contradictoires.
La beauté du mal chez Baudelaire.
Réunion contradictoire. [Mots croisés]
Je vous prie de m'excuser si'il a des erreurs de frappes, coquilles et autres...Car je ne me vérifie jamais, parce que la culture je la bois et les sciences je les vérifie et c'est 1 défaut professionnel et qui n'a pas de défaut sur cette noble terre.
Merci et encore merci pour votre article.

Abir
| 23-11-2019 15:10
vos analyses et votre décrit à la situation passé actuel et avenir sont bien les magouilles et les méthodes diaboliques de Gannochi et misquin celui qui l'opportunisme niche dans sa crâne quitte à donner la confiance à des menteurs traîtres et détruire son pays

vieux tunisien
| 23-11-2019 14:32
toutes led religions et surtout l islam est incompatible avec la democratie et la liberté d expression.
La preuve edt qu à chaque fois que je critique cette religion de chameliers venus du desert pour nous imposer cette religion, tout le monde me traite de "traitre" ou de "kafer".
en occident où je vis depuis 50 ans, quand on critique le christianisme, personne ne vous traite de salaud..., c est la democratie où chacun pense comme il veut.
Dans la republique islamiste Tunisienne, où l islam est la religion d Etat et celui des fréres qui nous gouvernent, il n est pas possible de critiquer l islam sans se faire insulter, même par des gens ordinaires ..
meme en france, les arabes n'ont pas pu adopté leur mentalité a la laicité, au contraire ils veulent imposer un etat communatariste où ils pourront continuer à pratiquer l intolerance et le rejet des idees de la lumière où tout le monde doit être consideré comme citoyen independemment de ses convictions religieuses

Tunisie indépendante et fière à vécu
| 23-11-2019 13:41
La khouanjification de la société tunisienne est en marche depuis ce jour damne de 2011 où Ennahda a pris le pouvoir et à présent cela va être la curée sur les institutions je ne donne pas plus de deux ans pour que le pays soit profondément transformé ce qui est déjà le cas vu l'état de ruine du pays ! à la sauce de La Confrérie et aboutir à leur projet machiavélique de Califat.
Adieu Tunisie que j'ai connue et Tfouh a tous ces traîtres et corrompus qui ont permis ce triste résultat et trahis leur pays !

Mohamed Obey
| 23-11-2019 13:40
Une fine analyse de la mise en scène de la mascarade de la designationchef du Chef de gouvernement est bien écrite comme etant un oxymore: nommé par Ennahdha bien que 'indépendant. C"est l"une des tactiques pertnimment Nahdhaouie de tricher dans le jeu, que ce soit électoral, de la sémantique, et cr zu point de faire que les mots signifient leurs propres contraires..

mansour
| 23-11-2019 11:30
car avec l'islam politique il n'y a aucune politique dans son approche économique,sociale et de développement pour le bien des tunisiens et du pays et ça dure depuis 9 années de pouvoir absolu des islamistes d'Ennahdha

J.trad
| 23-11-2019 03:56
Le texte du 9oran , me semble avoir été conçu spécialement pour notre époque ,nous somme devant une tranche de tunisiens qui incarnent (aliman )et (annifa9).

J.trad
| 23-11-2019 03:48
(il faut que l'Islam rayonne à partir de la Sorbonne /et aussi à partir des Académies),heureusement l'outil INTERNET , commence à donner suite à mon objectif , les intélectuels de l'Occident ,sont entrain de chercher la vérité ,je trouve dans leur langage ce que je ne trouve pas dans le langage de la Racaille des soit disant intellectuels tunisiens qui expriment une aversion inouïe à toute activité qui relève de l'Islamisme , ils puent une haine à la notion Islam étonnante ,c'est un grand point d'interrogation suivi d'un grand point d'exclamation ?!!!

Zend
| 23-11-2019 00:59
Madame. Vous écrivez un long article pour nous dire , que le chef du gouvernement n'est pas indépendant. Réellement, ça vous inquiète.
Franchement, je m'en moque. . Les vraies questions:
Est il intelligent ? Est il compétent ?

Alya
| 22-11-2019 21:49
Makhlouf est en train partout d annoncer que l exclusion de qalb tounes du gouvernement ne serait qu' une plaisanterie du cheik. SVP VERIFIEZ CETTE INFORMATION POUR NOUS