En ce 28 mai 2025, les réseaux sociaux tunisiens sont le théâtre d’une vague d’émotion et de solidarité. Deux prisonniers d’opinion, Mourad Zeghidi et Ayachi Zammel, célèbrent aujourd’hui leur anniversaire en détention, loin de leurs proches et de la liberté.
Une situation qui a suscité une avalanche de messages de soutien, de dénonciation et de tristesse émanant de nombreuses figures de la scène nationale. Après Sonia Dahmani, qui a fêté ses soixante ans en prison il y a deux jours, c'est aujourd'hui au tour de Mourad Zeghidi et Ayachi Zammel de fêter leur anniversaire derrière les barreaux.
Mourad Zeghidi, journaliste et chroniqueur, est emprisonné depuis plus d’un an pour ses prises de position critiques. Un anniversaire douloureux qui n’efface ni la voix ni les convictions de celui que beaucoup considèrent comme un symbole de liberté.
Ramla Dahmani, sœur de l'avocate Sonia Dahmani, a tenu à exprimer sa solidarité :
« Joyeux anniversaire Mourad. Les chaînes finiront par se briser. Tiens bon, chaque jour qui passe te rapproche de la lumière. » Ce message simple et fort résonne comme un rappel de l’espoir inébranlable qui unit les familles de détenus d’opinion.
L'avocat Sami Ben Ghazi lui a aussi rendu un vibrant hommage :
« Mourad Zeghidi, ton anniversaire est un hymne à la liberté. En ce jour de naissance, on te dit : la voix libre ne se fait pas taire, et la parole sincère ne meurt jamais. Tu n’es pas un prisonnier : tu es un témoin du temps de la peur… Une voix du juste que le pouvoir tente d’étouffer… en vain. Ce jour n’est pas seulement un rappel de ton âge, mais un rappel de ta force et de ta constance. Bonne fête à toi, homme libre… malgré les barreaux. »
Un sentiment partagé par Hichem Ajbouni, ancien député et dirigeant du parti Attayar, qui souligne l’absurdité de cette détention :
« Plus de 365 jours passés en prison, injustement et sans fondement ! Plus de 365 jours en détention sans avoir commis un crime punissable ! Plus de 365 jours derrière les barreaux pour une opinion libre ! Fier de toi mon ami, et que tu restes libre... Comme dit le proverbe : la prison ment, l’homme libre finit toujours par rentrer. »
Ayachi Zammel, candidat à l’élection présidentielle de 2024, croupit lui aussi en prison depuis plusieurs mois. Une arrestation qualifiée d’arbitraire par de nombreux observateurs. Son frère, Kais Zammel, lui a adressé une lettre bouleversante :
« En ce jour de ton anniversaire, je t’écris avec tout le manque et la nostalgie en moi. J’écris à un cœur libre, même s’ils l’ont enchaîné ; à un esprit éclairé, même s’ils ont tenté de le faire taire ; à une âme fière, qui ne s’est jamais inclinée que devant Dieu. (…) Nous t’attendons, non pas avec des cœurs brisés, mais avec des âmes pleines d’espoir, convaincus que le soleil de la liberté finira par se lever. »
Hichem Ajbouni, dans une autre publication dédiée cette fois à Ayachi Zammel, fustige un système électoral biaisé et une stratégie de destruction ciblée :
« Le système des parrainages a été un piège utilisé pour restreindre les candidatures, harceler et malmener les postulants. (…) Il aurait été possible de poursuivre l’enquête avec lui en liberté, afin qu’il puisse continuer à gérer ses entreprises prospères et préserver les emplois créés. Mais on a choisi de le détruire, ainsi que ses sociétés. »
L’ancien député alerte également sur le sort de Siwar Bargaoui, 24 ans, membre de la campagne présidentielle de Ayachi Zammel, incarcérée dans le même dossier :
« Elle n’a commis aucun acte représentant un danger pour la société. Par décence juridique et humaine, elle aurait dû rester libre jusqu’à la fin de l’enquête. »
En cette journée symbolique, les messages de soutien se multiplient, illustrant la fracture entre une société civile mobilisée pour la liberté d’expression et un appareil judiciaire qu'on juge instrumentalisé.
R.B.H
