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SUR LE FIL
L’État recrute à tout va
Par Marouen Achouri
04/06/2025 | 15:59
5 min
L’État recrute à tout va

 

C’est le nouveau mantra du président de la République, et donc de son gouvernement : le rôle social de l’État. Ce dernier doit donc soigner, éduquer, transporter, investir, établir la justice, améliorer les conditions et, évidemment : employer.

 

Quand la dette devient solution miracle

Puisque la roue économique est grippée, que les taux de chômage stagnent et que les entreprises privées n’arrivent plus à recruter, la solution est toute trouvée : c’est l’État, grâce à nos impôts et surtout grâce aux dettes qu’il contracte, qui va se mettre à recruter à tour de bras. D’ailleurs, Kaïs Saïed a clairement indiqué à sa cheffe du gouvernement et à sa ministre des Finances qu’il souhaitait que les portes du recrutement dans le secteur public soient rouvertes.

Récemment, l’État a imposé l’interdiction de la sous-traitance et la fin des contrats à durée limitée, hormis quelques exceptions. Pour donner l’exemple et se conformer à sa propre loi, l’État va dissoudre Itissalia Services et recruter de manière officielle l’ensemble de ses agents, et les affecter aux structures dans lesquelles ils étaient envoyés, c’est-à-dire d’autres structures étatiques. Autrement dit, il s’agit du recrutement massif de centaines de personnes.

Le président de la République avait également ordonné le recrutement de milliers d’enseignants suppléants. La légitimité des revendications de ces derniers et la justesse de leur combat pour une certaine dignité n’empêchent pas que des milliers de recrutements ont un coût, qui n’était pas budgétisé en amont.

 

Des slogans plein les poches, des caisses vides

La fièvre populiste n’épargne évidemment pas le Parlement, et certains élus veulent se mettre au diapason de la politique sociale du président de la République. Ainsi, il y a une proposition de loi en passe d’être discutée, qui vise le recrutement, par l’État évidemment, des diplômés restés longtemps au chômage. Tous ces recrutements sont justifiés par des slogans et des discours creux autour de la dignité, de la justice, de l’équité et autres valeurs. Certes, ces valeurs sont importantes, mais il se trouve qu’elles ne sont pas convertibles auprès des banques ni auprès des commerçants.

Au final, il faudra payer ces gens depuis les caisses de l’État, qui sont loin d’être dans une situation confortable. Tous mettent en avant la dignité et la fin de « l’esclavagisme », mais personne ne nous dit comment tout cela sera financé. Mais comme nous ne sommes pas devant des flèches en économie et en finances, parions que l’État va continuer à assécher le marché intérieur par l’emprunt et puis, pourquoi pas, au nom de l’unité de l’État, toquera-t-il encore à la porte de la Banque centrale de Tunisie, devenue une simple chambre d’enregistrement.

 

Le talon d’Achille du système social

Mais restons dans le social, puisque c’est la lubie du moment. Il est incontestable que des manquements sont à déplorer dans ce champ depuis des décennies. Il est clair que nous avons besoin de plus de recrutements, de plus de fonds à consacrer à l’éducation, à la santé, aux prestations sociales, à l’infrastructure de base et autres. C’est là une partie du combat que sont en train de mener les jeunes médecins en Tunisie sous la houlette de leur organisation. Dans le dernier développement de la crise entre gouvernement et jeunes médecins, ces derniers ont décrété une grève de cinq jours à partir du 12 juin. Quand on sait que ce sont ces jeunes médecins qui portent les hôpitaux tunisiens à bout de bras, on peut entrevoir les conséquences d’une telle grève.

Les jeunes médecins réclament une amélioration des conditions matérielles par l’augmentation des primes de résidence et de stage, jugées largement insuffisantes. Ils veulent également régulariser les arriérés liés aux gardes hospitalières et en revoir les montants à la hausse. Les jeunes médecins l’ont dit avant que ça ne devienne un élément de langage officiel : ils sont victimes d’une forme d’esclavagisme.

Et pourtant, malgré la légitimité des revendications, le soutien de tous les corps médicaux et l’intérêt social évident, le ministère de la Santé continue à faire la sourde oreille. Hormis l’expression de la compréhension et éventuellement d’un soutien moral, il n’y a rien qui ait été décidé en faveur des jeunes médecins, malgré les discours grandiloquents autour du rôle social de l’État, de l’égalité d’accès aux soins et autres slogans.

Ce sera difficile de faire tourner cela sans jeunes médecins, sans ceux qui plongent les bras tous les jours dans le cambouis de la santé publique. Le social serait-il à géométrie variable ? Ou recruter des gardiens et des jardiniers est-il plus urgent que faire en sorte que les hôpitaux fonctionnent ?

 

Le rôle social à géométrie variable

Les jeunes médecins, et même les plus vieux, souhaitent travailler dans des conditions dignes et percevoir une rémunération qui corresponde à l’effort qu’ils fournissent. Ils sont tout à fait conscients des limites de l’État tunisien mais, dans le même temps, on ne peut pas continuer à payer une heure de garde entre un et trois dinars. D’autant plus que l’argent n’est pas un problème, vu que l’État recrute à tout va. Les médecins ne sont peut-être pas aussi « vendeurs » en termes politiques que les autres catégories.

Il est clair que, même si leurs revendications sont satisfaites, les médecins n’iront pas sous l’horloge de l’avenue Habib Bourguiba pour danser au son du Tabbal et de la Zokra. Parler de rôle social de l’État en ignorant les jeunes médecins et leurs revendications n’aurait pas de sens. Trouver de l’argent pour recruter des milliers de personnes et refuser aux jeunes médecins l’amélioration de leur situation, notamment matérielle, les poussera, encore plus, à quitter le pays.

Par Marouen Achouri
04/06/2025 | 15:59
5 min
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Commentaires
nozha
@bn hassine, Réponse
a posté le 07-06-2025 à 16:54
Il est absolument absurde de croire que la rénovation de la piscine municipale du Belvédère a coûté 18 millions de dinars: ce qui fait 6 millions d'euros. Est-ce-que vous êtes tombé sur la tête afin de croire à une pareille blague?

Je suppose que vous êtes concerné par cette rénovation. Je vous assure que tout le linge sale sera étalé après le départ de Kais Saied. En effet, personne n'est éternelle.

Les privilégiés d'avant le putsch sont aujourd'hui derrière les barreaux, et ceux d'aujourd'hui le seront avec l'arrivée du prochain dictateur. En effet, Kais Saied a bien préparé la Tunisie pour le prochain dictateur et la prochaine dictature dont il sera probablement la victime....
Perdita Deblanc
Recrutement
a posté le 06-06-2025 à 06:21
Commencer la réforme administrative en réduisant l'omnipotence de l'administration. L'état n'est ni une '?uvre de bienfaisance ni une association pour indigents.
Dr. Jamel Tazarki
Les politiques sociales en Tunisie devraient avoir une fonction économique en tant que paramètre de fortunes futures. L'accroissement des richesses produites est la condition la plus évidente de la réduction de la misère matérielle!
a posté le 05-06-2025 à 08:37
Une réforme sociale est indispensable en Tunisie, c'est de savoir comment nous pourrions aider aujourd'hui les classes pauvres à se fournir/produire le minimum de consommation dont elles ont besoin par leur propre travail (sans offre gratuite par l'Etat). C'est cela ce-qu'elles attendaient de la Révolution de Jasmin. Elles n'attendent pas que nous leur donnions tant et tant de billets, elles attendent seulement qu'on leur donne des possibilités de se dégager par elles-même de l'emprise de la faim et de la misère et de pouvoir vivre par leur propre travail, c'est-à-dire de consommer et de produire des produits.
--> j'insiste ici sur le fait que les classes pauvres attendent en particulier qu'on leur donne des possibilités afin de pouvoir (sur-)vivre par leur propre travail, oui par leur propre travail.

Comment répondre aux nouveaux besoins sociaux? Est-ce que nous en avons les moyens financiers? Les politiques sociales pourraient-elles soutenir la nouvelle croissance économique? Quels sont les investissements nécessaires aujourd'hui pour ne pas aider et subventionner dans les années à venir? Comment minimiser les charges sociales? Comment passer des politiques sociales de prise en charge et de distribution gratuite à une politique dont la base est l'investissement social?

Il est temps de concevoir autrement les dépenses sociales. Elles ne devraient pas être une charge qui gêne la croissance économique, mais plutôt un investissement qui soutient le passage vers une meilleure économie avec moins de chômeurs et de meilleurs salaires. --> Malheureusement, beaucoup de nos politiciens ne sont pas assez intelligents afin de faire ce qu'il faudrait faire et non pas ce qu'il voudraient faire.
-->
Les politiques sociales en Tunisie devraient avoir une fonction économique en tant que paramètre de fortunes futures. L'accroissement des richesses produites est la condition la plus évidente de la réduction de la misère matérielle.

Je propose ainsi de motiver et de responsabiliser le Tunisien par la loi (sans les emprisonnements injustes, absurdes et abusifs) afin de le pousser/obliger à faire quelque chose d'utile par lui même, pour lui même, pour tous les Tunisiens et pour le reste du monde tout en lui fournissant des possibilités de réussite--> il faudrait apporter la/les possibilité(s) aux classe pauvres afin de pouvoir sortir par leurs propres moyens de la situation qui leur a été faite en tant que classes qui ont été toujours ignorées et désavantagées.

--> Chaque Tunisien devrait produire ses conditions d'existence. Il doit apprendre à se procurer par soi-même ses conditions d'existence. Nous sommes tous des êtres de projet, tourner vers l'avenir en prenant en considération ce qui est disponible afin de l'intégrer dans nos ambitions.

Certes il faudrait donner à ceux qui n'ont rien des possibilités afin de sortir de leur situation de misère, par contre il ne faudrait pas essayer de résoudre leurs problèmes à leur place --> c'est à eux de prendre leurs problèmes socio-économiques en charge, et de les résoudre par eux même. --> c'est ça l'assistance, c'est donner la possibilité à résoudre ses problèmes socio-économiques par soi-même. Exemple: je n'encourage pas à offrir des maisons gratuites à certains pauvres, il faudrait plutôt leur offrir la possibilité de construire leurs habitats par leur propres moyens. Il suffirait de louer les maisons sociales aux pauvres à bon prix pour un temps limité, le temps d'améliorer leur situation socio-économique par eux-même et par leur propre travail --> c'est ce mouvement au sein des habitations sociales qui pourrait résoudre le problème de l'habitat des classes pauvres en Tunisie: celui qui va entre-temps socialement mieux, devrait laisser la place pour ceux qui n'ont rien --> c'est une loop/boucle où les uns sortent et les autres entrent pour un temps limité!

--> Le soucis de soi (le soucis de sa propre existence ) ne devrait pas conduire à ignorer le soucis de l'autre, sans pour autant chercher à résoudre les soucis des autres à leur place --> On ne peut pas se soucier seulement de soi, nous sommes d'abord et essentiellement des êtres de relation que l'on a avec les autres (si cette relation est abîmée, c'est toute la vie sociale qui serait abîmée)

Le fait particulier et dominant qui singularise notre temps/siècle, c'est l'égalité des conditions, la passion principale qui agite les hommes, c'est l'amour de cette égalité. Par contre cette égalité ne devrait pas être gratuite et sans aucun effort...

- La Tunisie devrait être un système socio-politique dans lequel le mérite détermine la hiérarchie sociale et professionnelle. --> Chaque Tunisien devrait être responsable de sa vie, de sa nutrition, de ses initiatives, de ses ambitions et l'Etat tunisien devrait garantir en particulier la justice sociale / judiciaire, l'égalité des chances et des possibilités socio-économiques pour tous afin que la méritocratie réussisse --> La Tunisie a besoin ainsi d'un Etat de droit et non pas d'une dictature'?'

Dr. Jamel Tazarki, Mathématicien résidant à l'étranger
Dr. Jamel Tazarki
18 millions de dinars pour la rénovation de la piscine municipale du Belvédère, c'est trop trop trop cher!!!
a posté le à 10:36
18 millions de dinars pour la rénovation de la piscine municipale du Belvédère, c'est trop trop trop cher --> Toute dépense engagée pour la rénovation de la piscine municipale du Belvédère devrait être justifiée par un document (facture, ticket, note de restaurant, note de frais, etc.) --> franchement, je ne crois pas que l'on a eu besoin de 18 millions de dinars afin de faire une simple rénovation...

Dr. Jamel Tazarki, Mathématicien résidant à l'étranger

PS: je cite Business News TN du 03/06/2025 à 15:05
"sera ouverte du mardi au dimanche, de 8 heures à 16 heures, réparties en quatre séances quotidiennes et que le lundi sera réservé aux travaux d'entretien. Le prix d'entrée a été fixé à quatre dinars par séance."
-->
c'est-à-dire, on vide la piscine de sa clientèle à 10 heures, à 12 heures, à 14 heures et à 16 heures. Et ainsi, celui qui arrive avec ses enfants par exemple à 11 heures devrait attendre durant une heure l'entrée à 12 heures (sinon ça ne fait aucun sens d'entrée avec 3 enfants pour une heure...) -->Et ainsi, je me demande pourquoi tout le high-tech à l'entrée de la piscine, s'il est incapable de gérer les entrées et les sorties de deux heures d'une façon intelligente et flexible...

Exemple: à la piscine que je fréquente en Allemagne, la durée de la séance de natation est de 4 heures. J'entre quand je veux, par contre à la sortie, le système informatique contrôle, si j'ai dépassé les 4 heures...


quelques remarques
- Le prix d'une séance de natation de deux heures à 4 dinars est trop cher pour une famille de 3 à 4 enfants.
- Il faut avouer que 2 heures de temps sont trop courtes pour une maman avec ses 3 ou 4 enfants. --> en effet, Il lui faudrait au minimum une heure de temps afin a)que les enfants se déshabillent et se mettent en maillot de bain, et b)prennent la douche obligatoire avant la baignade, et d)prennent la douche après la baignade, puis il faudrait habiller les enfants, etc., etc., etc.
-->
je suppose que celui qui a fixé la durée d'une séance à deux heures n'a jamais été avec ses enfants dans une piscine. --> la seule option pour les mamans est celui de payer pour deux séances --> ce qui ferait 48 dinars pour une familles à 4 enfants. (et dire que la Tunisie voudrait être sociale) --> en Allemagne, l'entrée est gratuite pour les enfants de moins de 6 ans...
bn hassine
trop trop trop cher
a posté le à 14:31
je vous en conjure de nous l'expliquer
si nos arrêtons ses délires
le financier
une destruction à l URSS
a posté le 04-06-2025 à 21:27
Ceux qui ont connu l URSS de 1980 à 1989 verront que les dirigeants tunisiens souhaitent appliquer cette meme faillite pour qu une élite capitaliste tunisienne et étrangère se partage le gâteau, une fois le pays en faillite .
Ceci n est pas de l incompétence mais un plan bien orchestré
nazou de la chameliere
Même
a posté le 04-06-2025 à 20:47
Les partisans commentateurs du perché, n'ont rien à dire pour défendre leur idole.
C'est dire que même eux n'arrivent pas a le suivre .

C'est un bon démolisseur !