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Tunisair : Victime ou coupable ?
27/08/2018 | 19:59
7 min
Tunisair : Victime ou coupable ?
 
Les retards sur les dessertes de Tunisair consternent de plus en plus les passagers tunisiens et étrangers. Certains  voyageurs critiquent sévèrement la compagnie et son mode de gestion et les appels à sa privatisation deviennent de plus en plus nombreux. Tout ceci a fait sortir le PDG de la compagnie aérienne nationale de son silence.

 
Avec l’arrivée de l’été et le retour du tourisme, les chiffres de la compagnie aérienne sont dans le vert. Il en est autrement de son image. La saison estivale dans les aéroports tunisiens, notamment Tunis-Carthage, est en effet synonyme d’encombrement et de retards. Et la compagnie nationale est aux premières loges des critiques, puisqu'elle assure une part importante des dessertes ainsi que plusieurs services notamment le handling. Elle est souvent prise pour cible, même si elle n’est pas toujours directement responsable de ce de quoi on l'accuse.
Il faut dire que certains incidents n’arrangent pas les choses, notamment les pannes à répétition du tapis de transport des bagages, à cause de la vétusté du matériel ainsi que celles de plusieurs appareils, qui restent cloués au sol pendant des heures. Le dernier incident en date et celui d’hier, dimanche 26 août 2018, les passagers du vol TU7258 en partance vers Monastir ont dû être débarqués à l’aéroport de Prague (République Tchèque), le pilote ayant détecté une panne technique qui pouvait causer un incendie à bord d’un appareil affrété par la compagnie.
Tout ceci a provoqué la grogne des passagers, qui n'en peuvent plus de supporter les retards enregistrés sur les vols. Plusieurs voix se sont élevées pour réclamer la privatisation de la société nationale qui vie des difficultés importantes depuis la révolution. La compagnie ayant cumulé un résultat déficitaire reporté de plus de 500 millions de dinars !
 
 
Toutes ces critiques ont poussé le PDG de Tunisair Elyes Mnakbi à sortir dans les médias et à répondre à ses détracteurs. Ainsi, le responsable a souligné que la situation chaotique de la société date d’après la révolution, la société fournissant, avant, des entrées de l’ordre de 600 millions de dinars à l’Etat tunisien. Pour lui, certaines décisions prises ont impacté fortement la compagnie aérienne et ses équilibres financiers. Le PDG pointe du doigt, en particulier, le recrutement, effectué entre 2011 et 2012, de 1.200 personnes entre agents de sous-traitance et réintégration de personnel renvoyé outre les différentes hausses de salaires et les équivalences (mise à niveau des salaires selon les diplômes). Aujourd’hui, la société dispose d’un effectif de 165 employés par avion contre une moyenne comprise entre 80 et 100 personnes par avion de par le monde. Pire, les recrutements ont été tellement massifs que certaines filiales de la compagnie vivent une situation impossible. Par exemple, Tunisair handling, qui dégageait entre 40 et 60 millions de dinars par an au groupe, n’arrive plus à couvrir ses dépenses salariales, qui représentent aujourd’hui 130% de ses revenus, alors que pour n’importe quelle entreprise dans le monde qui veut réaliser des bénéfices, la masse salariale ne doit pas dépasser 50% du chiffre d’affaires.
L’exemple des bagagistes qui ont été intégrés à Tunisair est également un autre indicateur des difficultés vécues par la compagnie. Certains bagagistes ne sont pas habilités à assurer les tâches pour lesquelles ils ont été recrutés et mais sont pourtant diplomés dans d'autres spécialités. Ainsi, la société a dû tenir compte de leurs diplômes et augmenter leurs salaires qui sont passés de 400 dinars à 2.000 dinars pour certains, tout en recourant de nouveau à la sous-traitance pour que le travail soit quand même effectué. Un comble !
«Parfois au début du mois, on ne sait pas comment on va payer les 7.800 employés de la compagnie, des salaires avoisinant les 300 millions de dinars par an», avoue Elyes Mnakbi.
A tout ceci, s’ajoute une flotte vieillissante qui a besoin de plus d’entretien. Or, à cause de la situation financière, la compagnie souffre d’un manque de crédibilité vis-à-vis de ses fournisseurs de pièces de rechange qui ont perdu confiance en elle. Certains réclament d’être payés en avance ou, au mieux, d'avoir un acompte. Le tout, 10 fois plus cher que le prix qu’elle payait avant et avec des livraisons dans les 24 heures, alors qu’elle disposait, avant, d’un stock de pièces qui lui permettait de réagir rapidement aux pannes.
 
Le directeur de l’Aviation civile Habib Mekki indique ainsi que 5 appareils sur les 28 composant la flotte sont actuellement en maintenance et que la société a dû faire avec et revoir son programme, notamment en affrétant des appareils. Il explique que souvent Tunisair est prise pour bouc émissaire. Il a précisé, dans ce cadre, que l’aéroport de Tunis-Carthage a dépassé sa capacité d’accueil depuis 2014 : «On accueille 6 millions de passagers par an alors que la capacité est de l’aéroport est de 5 millions de passagers par an». Et de préciser qu’avec «la concentration des vols pendant la saison estivale, il y a 14 départs par heure alors que l’aéroport est dimensionné pour 7 départs par heure uniquement. Avec le glissement de trafic, on se retrouve parfois avec 16 à 17 départs par heure, note-t-il, d’où l’encombrement de la salle de tri bagage et de l’enregistrement».
En effet, l’infrastructure aéroportuaire n’est pas adaptée à un trafic important avec ses 3 ou 4 couloirs aériens. D’où, les retards.
 
Autres problèmes de taille. L’Etat s’est engagé à compenser la différence entre prix réel et prix pratiqué pour les vols internes, chose qui n’a pas été faite jusqu’à maintenant malgré les multiples réclamations de la société. L'Etat tunisien devait aussi débloquer 52 millions de dinars, sur un total de 130 millions de dinars nécessaire au plan de redressement et au départ d’un millier d’employés en sureffectif (indemnisation de départ + CNSS). Des promesses qu’il aura du mal à tenir avec les problèmes budgétaires actuels et les différents défis auxquels il fait face.
 
«Nous avons fait de notre mieux avec les moyens dont on dispose», se défend le PDG. «Nous avons comprimé les dépenses. Lorsque je suis entré à Tunisair, il y avait une perte annuelle de l’ordre de 170 millions de dinars. Pour 2017, la perte a été de 70 millions de dinars seulement. En 2018, on s’attend, et pour la première fois depuis la révolution la société, à un équilibre financier», note-t-il.
M. Mekki souligne pour sa part que «les autorités de tutelle ne sont certes pas satisfaites des retards de la société constatés sur la moitié des vols» et «que des réunions sont entreprises pour trouver des solutions concrètes, en notant que la situation économique du pays et les multiples attentats terroristes ont eu un impact désastreux sur elle». Le directeur de l’Aviation civile estime aussi que la filialisation de Tunisair n’a pas donné les résultats escomptés.
 
Pour pallier ses différentes problématiques, Tunisair Handling a contracté un crédit pour acquérir de nouveaux équipements en 2018 qui lui permettront de résoudre l’une des causes des retards indique M. Mnakbi. S’agissant de ses fournisseurs, il y a un retour de la confiance cette année, souligne-t-il.
La compagnie est en train de renouveler sa flotte. Elle réceptionnera 6 avions au 1 er semestre 2019. Pour la 1ère fois de son histoire, la société va avoir recours au leasing, qui lui permettra de renouveler sa flotte tous les 12 ans, explique le PDG.
 
En ce qui concerne la privatisation de la compagnie nationale, Elyes Mnakbi a assuré : «Tunisair est un patrimoine de notre pays et le porte-drapeau de la Tunisie n’est pas à vendre». Et d’ajouter : «Nous sommes parmi les meilleures compagnies au monde en terme de sécurité de vol et notre emplacement est stratégique, nous pouvons devenir le plus grand hub du monde, avec une stratégie adéquate».
 
La compagnie nationale est périodiquement prise pour cible par des passagers mécontents. Si ces couacs en font le bouc-émissaire idéal, une partie de ses problèmes est dûe à de mauvaises décisions prises au sommet de l’Etat. Beaucoup d’efforts consentis lui permettent aujourd’hui de voir le bout du tunnel avec des états financiers annoncés en équilibre pour 2018, une première depuis la révolution.  En plus de Tunisair, d’autres sociétés publiques sont vraiment au fond du gouffre comme la SNCFT et l’Office des céréales qui cumulent respectivement des déficits de l’ordre de 915 millions de dinars et 846 millions de dinars. Des réformes devraient être entreprises au plus vite, pour les sauver. 
D'ailleurs, la compagnie nationale compte aujourd'hui sur son plan de restructuration - dit plan de la dernière chance - pour décoller. « Depuis 2011, le dossier de la restructuration de la compagnie a été discuté à différents niveaux sans mettre en place les mesures adéquates préconisées, ce  qui a laissé la situation s'aggraver de jour en jour ! Le salut de notre compagnie nationale passe par l'approbation de ce plan de redressement tant attendu et qui est sensé lui donner des ailes », avait écrit il y a quelques jours Sami Blidi,  directeur de la stratégie et de la planification à Tunisiair, sur les réseaux. Affaire à suivre...
 
 
Imen NOUIRA
27/08/2018 | 19:59
7 min
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Commentaires (24)

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Mongi
| 30-08-2018 14:32
Tunis Air est victime des Syndicats et des politiques qui continuent a embaucher leurs proches dans une société dificitaire depuis 2011.
Aprés les Trabelsi, voici les syndicats et les Nahdhaouis qui s'emparent.

aj34
| 30-08-2018 12:26
Encore du barratin pour sauver des postes et sauver le soldat Mnakkbi...
La seule et vraie raison est le manque de stratégie efficace tenant compte des moyens du pays et de la compagnie.
Nous avons au moins 3 aéroports de niveau int ernational....nous avons un nombre limité d'avion .. par conséquent on ne devrait pas proposer des lignes vers l'afrique car on a ouvert une nouvelle voie et on détruit une voie classique.....Tourisme. On veut se comparer avec la RAM,... nous n'avons pas les moyens pour le moment... on n'ouvre pas 3 vols par jour vers marseille (il y avait 1 seul vol par jour sur TU) pour 3h de retard par jour. Bien exploiter ses moyens fait partie d'une stratégie..... le PDG actuel et les autorités n'ont rien compris. Nos touristes sont écoeurés par le service proposé par TU (retard à l'aller et au retour avec des passager accompagnés par des enfants...) TU les a écoeurés et ça fait plus d'un an qu'on le répète. Le PDG a menti en précisant qu'il a pris des précautions en louant 5 ou 6 avions.afin d'anticiper les pbs liés aux pannes arrivées subitement . on s'aperçoit que c'est un mensonge .. c'était plus pour pallier à des avions en panne que pour constituer un renfort en cas de pbs.... Cette compagnie est une vraie catastrophe nationanle à tous les niveaux (sauf nos pilotes et quelque stewards)... elle est en train de donner un sale et grave coup à notre tourisme... elle dissuade nos immigrés à rentrer au pays.......celui qui ne voit pas ça est juste un hypocrite....

Open-Sky
| 30-08-2018 11:44
Je préfère de loin que des pays comme le Qatar ou la Turquie rachètent cette entreprise lourdement déficitaire aux services médiocres, ( sans oublier bien évidemment les prix de billets d'avion hallucinants ) que de se réveiller un jour sur l'annonce d'une catastrophe aérienne ( la kaddara allah) qui se prépare.
Quand à vous Hatem ( petit gauchos féminisé...:)) , votre haine de l'islam et tous ce qui se rapporte à cette foi, vous a complétement aveuglé.
Sans rentrer dans une discussion stérile avec les gauchos malades de votre espèce, je vous invite à faire un tour en Turquie et je vous laisse admirer par vous même l'infrastructure, et le développement fulgurent de ce beau pays

Mara
| 30-08-2018 02:11
I travelled with Tunis Air for many many years and was always very pleased with their service and special attention towards the passengers..ALL MY LIFE I TRAVELLED WITH MANY DIFFERENT ARLINE COMPANIES BUT I AGAIN WILL CONFIRM THAT TUNIS AIR HAS THE BEST AND MOST QUALIFIED PILOTS.. NEVER WAS I WORRIED ABOUT THEIR PROFESSIONALISM...THEY MAKE THE VERY BEST SMOTH LANDING. KEEP GOING TUNIS AIR WE NEED YOU..AND THANK YOU FOR MAKING THE BEST SOLUTION FOR THE TIME BEING. I WILL FLY IN OCT. AGAIN FROM SWITZERLAND GVE. TO TUNIS TO VISIT BEAUTIFUL TUNISIA .MARA switzerland

Sami BLIDI
| 29-08-2018 10:18
Assumant depuis 7 décennies un rôle important d'Agent Public, en contribuant au transport aérien des tunisiens et à l'essor du tourisme tunisien; Tunisair se bat dans un environnement fortement concurrentiel face à des compagnies aériennes performantes, le plus souvent à armes inégales : avec une flotte vieillissante et un matériel de servitude vétuste mais également en supportant des charges fixes importantes, la qualité de service offerte à sa clientèle est de plus en plus affectée ; ce qui nécessite l'accélération dans les meilleurs délais des mesures adéquates préconisées.
Tunisair est ainsi victime et coupable !! '

adel
| 29-08-2018 09:14
Tunisair est victime de sa propre mal gouvernance dont elle est coupable.
Tout comme d'autres sociétés tunisiennes, le gouvernement, les institutions associatives etc.
La schizophrénie est une situation confortable. Elle de crier à l'aide quand on essaie de se suicider.

Radwen
| 28-08-2018 18:17
Quelques vérités sont bonnes à rappeler:

1. Tunisair n'était pas une entreprise en difficulté avant la révolution. En fait c'était une 'cash cow' pour le gouvernement, contribuant activement aux besoins de financement de l'Etat. Ses déboires post-révolution sont liés à la baisse de ses revenus (crise du tourisme), dévaluation du TND (charges sont en devises étrangères), troubles sociaux (corporatisme et agitation syndicale), et mauvaise gestion (nominations partisanes à chaque remaniement). Plusieurs de ces facteurs ne sont pas exclusifs à Tunisair et ont impacté d'autres entreprises ou administrations publiques (CPG, Hôpitaux, '?ducation Nationale...) ou entreprises privées (Hotels, Petrofac, etc.).

2. La privatisation n'est pas une solution. Malgré les idées reçues sur le sujet, il n'y a aucune preuve que les compagnies aériennes privées performent mieux que les compagnies étatiques. British Airways, complétement privatisée a connu un crash informatique en 2017 qui a bloqué des dizaines de millers de passagers sur des vols, tarmac, portes d'embarquement, dans des aéroports, certains jusqu'à 3 jours!! Il ne s'agit pas d'un accident. Il s'agit de la conséquence d'une politique de sous-investissement menée par les actionnaires privés de British Airways. En fait, les gens confondent concurrence et privatisation. Mais basculer d'un monopole public à un monopole privé n'a aucun sens pour l'usager et le contribuable.

3. Bien au contraire, il est intéressant de noter que les meilleurs compagnies aériennes du monde sont étatiques. J'ai beaucoup voyagé ces dernières années, sur 5 continents. J'ai eu l'occasion de voyager sur:
Air France
Air Berlin
Alitalia
American Airlines
Cebu Pacific
Delta
EasyJet
Emirates
Ettihad
German Wings
Indian Airlines
Japan Airlines
jetBlue
Jetstar
KLM
Korean Air
Lufthansa
Philippine Airlines
Ryanair
Singapore Airlines
Tunisair
Turkish Airlines
United Airlines
US Airways (AA)
Vietnam Airlines
Virgin Airlines
Vueling

3 constats de mon expérience:
a. Tunis n'a pas le monopole des vols/perte/destruction de bagages.
b. Tunisair n'a pas le monopole des retards avec communication approximative.
c. Les meilleures compagnies sur cette liste, sont étatiques!
Turkish Airlines, Emirates et Singapore Airlines. Je pense que d'autres amis auraient aussi rajouté Qatar Airways à cette liste...

4. Ce qui distingue ces compagnies de Tunisair est avant tout l'environnement de compétition dans lequel elles opèrent. Turkish, Emirates et Singapore font face à une concurrence très forte de la part d'autres compagnies aériennes, publiques ou privées. Tunisair a été longtemps protégée... la politique de l'?tat étant de laisser Tunisair opérer sur des routes profitables telle que Tunis-Paris et en échange impliquer Tunisair dans des investissements moins rentables à court terme mais importants pour le développement économique du pays et le désenclavement de certaines régions (Tozeur, Tabarka, Gafsa, ou lancement de lignes vers certaines nouvelles destinations pour soutenir le développement de marchés touristiques ou d'exportations...).

Se débarasser de Tunisair serait une erreur stratégique sur plusieurs plans. Le redressement de la compagnie est possible. Ce redressement doit s'accompagner d'un accroissement graduel et sain de la concurrence sur l'espace aérien tunisien, et la suppression de toute ingérence politique dans la gestion de l'entreprise.

Dody
| 28-08-2018 15:10
Je suis un client régulier de Tunis air, je suis très mécontent de cet compagnie nnationale ,les rretards croniques, c'est devenu un cauchemar, on ne peut plus organiser son voyage, l'accueil du personnels que ce soit a l'aéroport est nulle pour ne pas employer un autre mot,lors des retards les employés et responsables se volatisent plus ppersonnes pour atténuer l'angoisse des passagers, le service à bord est bon que pour vendre les produits hors taxes,

pit
| 28-08-2018 14:43
Privatisation !!!
idem pour la STEG, la SONEDE ainsi que toutes les grosses structures étatiques qui servent de repaire à des "fonctionnaires" suceurs de pognon et inutiles !

Sofiene
| 28-08-2018 14:38
Ma fille âgée de 7 ans prenait Tunisair pour rentrer en France en UM (enfant non accompagné) TUNIS/NANTES. Départ initial à 21h05. L'avion a atterrit à 02h17 à Nantes ( heures franciaise). C'est honteux. Je précise que le billet m'a coûté 1780 tnd. C'est du vol caractérisé, c'est inacceptable qu'en 2018 on paye ce tarif.