' Il ne s'agit nullement d'un cas de censure. La Presse, depuis le 14 janvier 2011, est un journal libre et indépendant. Il n'accepte aucune instruction et ne tolère aucune directive. De ce fait, le dessin objet de controverse a été soumis au comité de rédaction restreint qui a jugé que le sujet ne cadrait pas d'abord avec l'esprit du magazine et qu'il n'était pas publiable et a mandaté le rédacteur en chef Nation de demander à Lotfi Ben Sassi de revoir le dessin en prenant en compte le contexte sécuritaire national et le respect du martyre de ses soldats. Monsieur Ben Sassi, qui ne refuse jamais de remanier ses dessins, et nous en avons la preuve, a contesté la manière et non le fond. Il a refusé de retoucher son dessin. Le comité a alors décidé de différer la publication de ce dessin qui devait paraître dimanche.
' Trois jours avant la date supposée de la publication du dessin, Lotfi Ben Sassi, qui a refusé de venir à la rédaction discuter du problème et présenter son point de vue, annonce publiquement qu'il est victime de censure!
' Il demande un congé de dix jours pour simuler une campagne de censure auprès des lecteurs et pour amplifier une campagne contre La Presse.
' Face à l'indifférence totale de ses collègues journalistes à La Presse, il demande la médiation de Sofiane Ben Farhat et est venu le lundi 14 mars présenter ses excuses au directeur de la rédaction. Une méthode de travail a été convenue pour éviter à l'avenir tout malentendu. C'est pourquoi la rédaction s'étonne du rebondissement de cette affaire après son dénouement et tient à apporter les précisions suivantes :
' La rédaction refuse de subir les sautes d'humeur de Lotfi Ben Sassi qui refuse d'assister à la conférence de la rédaction qui se tient quotidiennement à 15 heures et se contente de balancer son sujet à sa guise et par mail, étant donné qu'il travaille à plein temps dans une agence de com et une chaîne TV, alors qu'il est titulaire à La Presse, qui est une entreprise publique.
' Contrairement aux propos mensongers du président du Snjt, aucune mesure disciplinaire, ni poursuites administratives n'ont été engagées contre Lotfi Ben Sassi.
' Aucune directive n'a été donnée au rédacteur en chef de La Presse News pour retirer les dessins de Lotfi Ben Sassi, contrairement à ce que laisse entendre le communiqué du Snjt.
' Le Snjt n'a pas à s'immiscer dans la ligne éditoriale du journal tout autant que les pouvoirs législatif et exécutif. La Presse dénonce toute tentative d'intimidation, fût-elle de la part du syndicat, et rappelle que le directeur de la rédaction est un journaliste élu par ses collègues et non nommé par quelque autorité que ce soit.
Notre journal, qui tire sa force morale du dévouement de ses professionnels, a pu se maintenir en dehors de tous les clivages, de toutes les tentations et de tous les courants politiques depuis le 14 janvier 2011, grâce à sa ligne éditoriale cohérente qui fédère un lectorat et lui offre un ancrage, une assise au moment où ce lectorat ne supporte plus d'être baladé au gré des modes et des vents, soumis à la dictature du doigt mouillé.
La Presse est un journal qui privilégie le propos. Il ne s'agit pas de couvrir pour couvrir, de dire pour dire. Mais par rapport à la cohérence évoquée plus haut, de savoir exactement ce qu'on dit, pourquoi on le dit, comment on le dit, en quoi il est nécessaire de le dire; en clair, pas de couverture passivement généraliste, mais priorité est donnée à nos apports spécifiques.
Si on intervient sur un sujet, c'est parce que nos informations, nos angles, nos explications ou nos prises de position apportent quelque chose de particulier et de nécessaire. C'est donc un journal qui dénonce, mais qui approuve, critique, mais aussi propose; qui ne dore pas la pilule, mais accorde toute sa place à l'espérance. Qui ne confond pas la contestation avec la méchanceté et qui peut promouvoir sans flagornerie.
Un journal qui, parce qu'il saura être souvent tendre, positif et même indulgent (et quelquefois seul), pourra aussi être terrible et féroce. Un journal qui, dans un monde qui apparaît de plus en plus opaque, redonne du sens, offre des repères, tisse des fils conducteurs, ouvre des perspectives. En somme, un journal qui respecte ses lecteurs.
La Presse saisit cette occasion pour appeler à la nécessité d'instaurer une instance de régulation de la presse écrite, seule habilitée à trancher dans ce genre de différend.