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Chroniques
La réconciliation de la discorde
01/11/2015 | 15:59
4 min

La loi de la réconciliation, quel nom ironique. Cette loi, pourtant encore au stade de projet, ne cesse de susciter la controverse. Entre partisans et détracteurs, chacun y va de ses arguments. C’est que la justice transitionnelle intéresse et attise les foules. Alors que deux camps s’affrontent, avec des opinions et des orientations bien tranchées, on fait appel à la commission de Venise pour décider lequel des deux a raison.

Mais le rapport qu’elle fournit est loin d’arranger les choses. On fait dire à la même conclusion une chose et son contraire et le citoyen lambda, intéressé par la chose politique a vite fait de s’y perdre. C’est que les médias « mal intentionnés », « dépourvus de conscience » et (bien sûr) « servant de sombres agendas politiques », pervertissent encore une fois la réalité.

 

S’il est on ne peut plus naturel pour un média d’opinion d’afficher clairement ses opinions (cela va de soi), avec une dose de mauvaise foi et un scepticisme évident, on peut appliquer ces accusations aux deux camps.

Mais pourquoi un tel rapport censé rendre les choses limpides comme de l’eau de roche divise-t-il encore de plus belle ? La raison est simple. Ce rapport est loin d’être aussi tranché qu’on le voudrait. Business News titrait dans son article de « Une » du 28 octobre « La claque de la Commission de Venise à Sihem Ben Sedrine and co ». Pourquoi est-ce une claque ? Ce titre, visiblement présomptueux, tire une conclusion on ne peut plus évidente. La commission de Venise, saisie par la présidente de l’IVD pour préparer un avis sur la loi de la réconciliation, ne lui assène pas le coup de grâce escompté. Ben Sedrine perd donc ce recours et se retrouve, invraisemblablement, au point de départ. C’est que les conclusions principales tirées de ce rapport ont déjà été énoncées par des experts tunisiens. En gros, le rapport est équivoque. Il ne désavoue pas une partie au détriment d’une autre. Il pose un constat pourtant clair : « le fonctionnement de tout système de justice transitionnelle présuppose un large consentement ». Ce consentement est-il garanti aujourd’hui entre les deux organes de l’IVD et du projet de loi de la réconciliation ? Evidemment que non.

 

Dans son rapport officiel, la commission de Venise ne donne raison à aucun des deux camps mais pose des constats qui gagneraient à être pris en compte.

Pour faire simple, la Constitution tunisienne n’impose pas de forme ni d’organe particuliers pour la réalisation de la justice transitionnelle. La loi organique n° 2013-53, portant création de l’IVD, n’interdit pas non plus l’adoption d’une législation spéciale relative aux domaines économique et financier. Le droit portant sur la justice transitionnelle peut donc être modifié, conformément à la Constitution et aux principes de l’Etat de droit, par une autre loi organique. En l’occurrence celle de la réconciliation proposée par la présidence. La création d'un autre organe chargé de la justice transitionnelle, autre que l'Instance Vérité et Dignité, n'est donc pas interdite par la Constitution.

L’IVD, qui est surchargée, pourrait alors se concentrer sur les atteintes graves aux droits de l’Homme et laisser, donc, la partie relative aux crimes financiers à la commission de la réconciliation. Dans ce sens, la commission affirme que le mandat de l’IVD est extrêmement étendu et ses prérogatives presque uniques dans un Etat de droit. La création d’une commission spécialisée chargée de s’acquitter des dossiers financiers serait en soi positive. Ainsi, on se dit préoccupé de voir que l’exercice de certaines des fonctions que le projet attribue à l’instance, par exemple l’administration des réparations et l’examen des affaires de corruption, risque fort de la surcharger et, partant, de l’empêcher de s’acquitter des fonctions propres à une commission de vérité.

 

Cependant, l'instauration de la commission de réconciliation devra répondre aux dispositions de l'article 148 alinéa 9 de la Constitution tunisienne, selon lequel l’Etat s’engage à appliquer le système de la justice transitionnelle dans tous ses domaines et dans les délais prescrits par la législation qui s’y rapporte. La commission de Venise note également que la procédure prévue par le projet de loi sur la réconciliation ne présente pas des garanties suffisantes à la considérer comme équivalente à celle se déroulant devant l’IVD et qu’elle ne permet pas de réaliser les mêmes buts des procédures prévues par la loi organique sur la justice transitionnelle n° 2013-53.

Voilà qui est clair. En gros, cette loi est considérée comme insuffisante pour atteindre ses objectifs, notamment dans les domaines économique et financier. Une révision s’avère donc nécessaire. Pour ce, il devient urgent d’apporter des changements au projet de loi déposé devant le Parlement, et ce dans le but d’apporter les améliorations et amendements nécessaires en collaboration avec la Commission de Venise.

Ainsi, la commission et les autorités tunisiennes se disent, toutes les deux, prêtes à collaborer pour pallier ces lacunes et obtenir, enfin, un système de justice transitionnelle ou les deux voies seraient équivalentes et qui pourrait ainsi résoudre les lacunes de l’instance Vérité et Dignité.

 

En définitive, le rapport de la commission de Venise est loin de trancher mais il est cependant clair. Le lecteur lambda pourra facilement se faire une idée à partir des analyses et conclusions posées par la commission de Venise. L’instance Vérité et Dignité gagnerait à déléguer la partie liée aux crimes économiques mais la commission de la réconciliation devrait, de son côté, subir quelques modifications afin de garantir son indépendance et neutralité, et ce, afin que les deux puissent (enfin !) réaliser les mêmes buts.

 

Ceux qui crient à la manipulation et à la désinformation pourront donc aller se rhabiller…

01/11/2015 | 15:59
4 min
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Commentaires (8)

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dadilesage
| 02-11-2015 03:09
From what I can see from here,which is America,it looks and it feels like everyone and everything in Tunisia nowadays is just ***. I will be there for the réveillon of New Year's, to see what is going on, for myself.

Amin
| 01-11-2015 22:59
Vos opinions ou votre ligne éditoriale ne vous octroie pas le droit de tromper sciemment vos lecteurs. Ce serait là un manquement à votre devoir d'information en tant que journaliste, censé restituer la réalité des faits.


Vous affirmez dans votre papier :
"Voilà qui est clair. En gros, cette loi est considérée comme insuffisante pour atteindre ses objectifs, notamment dans les domaines économique et financier. Une révision s'avère donc nécessaire."

Où diable avez vous vu que cette loi est considérée comme insuffisante ?!
La Commission de Venise dit :
"61. Si la loi organique n° 2013-53 est considérée comme insuffisante pour atteindre ses objectifs, notamment dans les domaines économique et financier, une révision s'avère donc nécessaire, ce qui relève de la compétence du législateur, en respectant le cadre du droit supérieur. Il va de soi qu'un tel projet de loi ne pourrait être élaboré qu'en collaboration avec la société civile et les institutions compétentes en la matière, notamment l'IVD."

Ils disent "Si la loi est considéré insuffisante". En aucun cas, ils ont affirmé que cette loi est insuffisante.

Sinon aux 5 questions posées par la Commission de Venise, il n'y en a qu'une pour laquelle la réponse est en faveur du projet de loi présidentiel, la première à savoir qu'effectivement rien n'empêche de créer une deuxième instance mais sous certaines conditions.
Parce qu'à côté de cela, la Commission de Venise dit qu'au vu du projet de loi actuel, cette commission de réconciliation économique n'offre pas assez de garanties d'indépendance, ni de garanties d'établissement de la vérité et de sa publicité, ne permet pas de réaliser la réforme des institutions et risque de provoquer des conflits de compétence insurmontables avec l'IVD.

Et au vu de tout ça, vous continuez à interpréter l'avis de la Commission de Venise comme une claque pour l'IVD (ou plutôt pour Sihem Ben Sedrine puisque vous tenez tant à personnifier le débat)....
Tous vos articles sur le sujet vont dans le même sens. OK au sein de BN vous détestez tout ce qui a une relation de près ou de loin avec la Troïka.... c'est votre droit, mais tout de même un minimum d'honnêteté intellectuelle, dans le traitement du sujet.
Surtout venant d'une jeune journaliste qui a participé à une formation de Mediapart sur le journalisme d'investigation, la transparence et le droit d'accès à l'information.

JOHN WAYNE
| 01-11-2015 22:02
Je déplore ce matin la mort de 220 citoyens Russes, hommes, femmes, et enfants.
Je suis un homme qui tout au long de ma vie à admiré et respecté les peuples qui ont fait preuve dans l'histoire de courage, de dignité, d'intelligence, et d'intégrité.
Il y a dans ma vie les Vietnamiens qui ont combattu leurs occupants impérialistes avec un courage inédit.
Mais il y a aussi les Russes sans qui l'Europe toute entière aujourd'hui aurait comme drapeau National celui du Troisième Reich.
Les Russes hier ont accueilli la mort de leurs compatriotes avec une dignité remarquable.
Le Président Poutine, l'homme qui sauvera le monde du complot colonialo-sioniste et ses larbins de l'Islam, a répondu dignement et calmement a cette tragédie.
Je tiens à faire savoir aux Tunisiens, et surtout à la faction laïque et islamiste qui se partage le pouvoir en obéissant à Washington, à Doha, et a Ryadh, qu'à partir d'aujourd'hui la détermination des Russes à purger le monde du fléau islamiste sera inébranlable, renforcée, et illimitée dans le temps et en moyens militaires.
Souvenez-vous de ce que je vais écrire en ce jour :
La Tunisie deviendra un jour une base Russe ou sa souveraineté et son intégrité territoriale seront a jamais protégés de toute influence sioniste occidentale ou islamiste.
La Tunisie ne sera jamais un pays satellite de Washington ou des pays du Golfe et d'Arabie, même si ces pays disposent de moyens énormes financiers et technologiques.
Même si la Tunisie est aujourd'hui entre les mains de traitres Tunisiens sans dignité qui ont placé leurs intérêts personnels avant ceux de la Nation Tunisienne, il existe en Tunisie un noyau Nationaliste tenace, légendaire, et historique.
Aujourd'hui et après la mort de 220 civils Russes innocents et quant au même moment les sionistes de Washington effectuent un pont aérien en conseillers militaires et en armes de guérilla en faveur des islamistes Syriens, je dis aux Tunisiens que la balance de l'histoire penche du côté des hommes qui comme moi-même et comme les Russes, ont fait preuve d'intégrité face au complot machiavélique des révolutions Arabes.
Et je dis aux Nationalistes Tunisiens qui attendent leur jour de gloire :

Patience, notre victoire est proche !

F.M. Alias JOHN WAYNE
Diplômé d'Histoire et de Sciences Politiques de l'Université Paris-Sorbonne.
Ancien Fonctionnaire aux Ministères des Affaires Etrangères et de l'Intérieur Tunisiens des gouvernements d'Habib Bourguiba et de Zine El Abidine Ben Ali.
Diplomate de carrière et spécialiste de la sécurité et du renseignement.

Exit
| 01-11-2015 20:41
justifié par une bonne synthèse.

bizertin
| 01-11-2015 19:07
tu es hors-sujet
pour cette commission de venise,elle a donné raison à BCE de présenter une loi.C'est n'est pas contraire à la constitution.et on passant je dis BCE a trompé son peuple.

Sensei
| 01-11-2015 18:24
On ne peut etre toujours de votre avis, mais tenant compte de la rigeur de vos analyses et le professionalisme de vous écrits, ainsi que du serieux de votre production, on finit par se demander " Mais Diable faites vous chez BN qui trop suivant fait du militantisme politique plutot tendancieux que du journalisme serieux honnete et professionnel ?

abouali
| 01-11-2015 17:24
La confusion sur l'avis de la commission de Venise semble s'étendre jusqu'à la rédaction de BN. Mme Tajine, comme de coutume, veut prendre tout le monde à contre-pied, nonobstant la position des autres chroniqueurs dont notamment N. Bahloul. Et toujours en multipliant les fautes de français, par exemple, la commission n'est pas dépêchée par la présidente, mais saisie par elle, et des lourdeurs dans le style et la construction des phrases, comme celle qui commence par "la Commission de Venise note" et qui se termine laborieusement par "la loi organique".

JOHN WAYNE
| 01-11-2015 17:08
De ma modeste demeure anticoloniale et anti traitres Tunisiens du Bardo, j'accuse réception d'informations gravissimes.
DAECH par ses complices à l'aéroport de Charm Echeikh aurait placé une bombe dans la soute de l'avion Russe qui a fait 227 victimes !
Les représailles du Kremlin devraient être impitoyables.
Des mesures militaires sont en ce moment même planifiées au Kremlin.
Elles incluent l'utilisation de la bombe atomique sur une ville de Syrie ou de Libye qui serait le quartier général de DAECH.
Raqqa et Derna seraient visées par une attaque nucléaire Russe.

F.M. Alias JOHN WAYNE
Diplômé d'Histoire et de Sciences Politiques de l'Université Paris-Sorbonne.
Ancien Fonctionnaire aux Ministères des Affaires Etrangères et de l'Intérieur Tunisiens des gouvernements d'Habib Bourguiba et de Zine El Abidine Ben Ali.
Diplomate de carrière et spécialiste de la sécurité et du renseignement.