Tribunes
Concours de circonstances

Par Noomen Toumi
Cet article m’a été inspiré par les dernières prouesses technologiques tunisiennes consistant à créer un environnement collaboratif mettant en œuvre les réseaux de télécommunications modernes, les smartphones, les réseaux sociaux, la malhonnêteté intellectuelle, les billets de banque, quelques ordinateurs et beaucoup de mauvaise foi pour tricher lors des épreuves des concours nationaux et surtout le fameux baccalauréat.
Et oui, comme si les honteux 25% ne suffisaient que peu pour créer des conditions propices à favoriser une forme de triche basée sur une hyperbole de moyennes, au cours de l’année, nous ramenant à des écarts énormes entre les moyennes obtenues en trois trimestres et celle obtenue lors du concours national, il fallait en rajouter une couche et pousser le concept jusqu’au passage des épreuves.
Bientôt et avec des parents de plus en plus complices de ce « crime », nous irons jusqu’au hacking des serveurs du ministère pour fausser les notes saisies.
Tempérons notre colère et essayons ensemble de comprendre ce pourquoi nous nous retrouvons dans une telle situation, aujourd’hui.
Je m’y suis penché pour en arriver au constat suivant :
- L’enseignement, en Tunisie, a perdu sa vocation d’apprentissage pour se détourner en mémorisation du savoir. Le système des examens, toutes matières confondues, ne cherche pas à évaluer la capacité de l’élève à retenir une information, à l’analyser et la ré-exploiter, mais, à juger son aptitude à réciter de tête le cours. Même les matières dites « scientifiques » ont droit à des tests qui nous rappellent l’auto-dictée (sciences naturelles, chimie, informatique et parfois même mathématiques).
Personnellement, j’ai eu la chance de faire mes études d’ingénieur à l’Ecole Nationale d’Ingénieurs de Sfax (ENIS) où le corps enseignant, que je salue vivement au passage, était conscient de sa mission et a autorisé les documents de cours pour la majorité des matières et a opté pour des épreuves faisant appel à la faculté d’analyse et appropriation du savoir acquis.
- La « démocratisation » des cours particuliers (le secteur informel du savoir) : Aujourd’hui, les élèves qui suivent des cours particuliers (communément appelés « études ») ne sont plus les élèves en difficulté de retenir totalement ce qui leur a été enseigné en classe. Désormais, tout le monde y passe ; génies, fainéants, bosseurs, cancres, …etc. et les parents, se croyant investir dans le savoir et l’éducation de leurs enfants, ont fini par corrompre une partie des enseignants qui trouvent plus « rentable » d’inciter leurs élèves à payer des « explications HD » que d’avoir un simple cours (je me demande si « cours » ne devrait pas être orthographié « court » dorénavant) magistral à l’école. Canal et Aljazeera l’ont fait, les enseignants l’ont révolutionné et bientôt ce sera vendu en kit au ministère de l’enseignement EBase, ESscience, ESmath, ESlettres, … avec des options au choix (info, allemand, italien, musique, …). Nous sommes devenus des Topaziens (coucou Marcel Pagnol) et pour nous, tout s’achète, même un diplôme.
- La non-adaptation à l’évolution technologique : La technologie a évolué au point que le matériel dédié à l’espionnage se vend comme des petits gâteaux, dans les rangs des élèves, à travers des pages Facebook « sponsorisées et publiques » et surtout « IMPUNIES ». Tu peux demander aux élèves de déposer leurs téléphones sur le bureau des surveillants durant le passage des épreuves, tu ne pourras jamais savoir s’ils en cachent d’autres avec des kits Bluetooth bien dissimulés sous les cheveux ou les « Hijabs » adopté in extrémis la veille du concours du bac (ça ne veut pas dire que toutes les filles portant le hijab sont des tricheuses ou qu’elles ne l’ont adopté que pour des raisons malhonnêtes, loin de moi de porter un tel jugement sur une liberté vestimentaire).
Nous devons mener une lutte toute aussi acharnée que contre le terrorisme, sur les antisèches technologiques (lois, moyens techniques, …) et les sanctions contre ces « criminels » doivent se durcir au point de la dissuasion. Autrement, le diplôme tunisien perdra de sa crédibilité et, dans quelques années, il nous sera impossible de concevoir une quelconque coopération technique avec n’importe quel pays dans le monde.
- Un système d’orientation universitaire trop sélectif et concurrentiel : L’actuel système basé sur les scores, le classement, le nombre de places disponibles et le nombre de postulants a de fortes chances pour réussir une Star-Ac qu’un système éducatif et universitaire. Pour certaines branches, les étudiants seront condamnés à l’avenir compromettant de diplômé supérieur au chômage.
Une refonte totale du système avec des branches plus adaptées au marché du travail et une adaptation de l’offre (en matière de branches) à la demande (le nombre de postulants) réduira l’avidité des élèves, tout comme les parents, d’avoir les plus grands scores quel que le prix à payer.
En quelques mots, la solution que j’entrevois, pour couper court à ces pratiques sales, se résume en :
Enseignement moderne orienté vers la réflexion, lutte contre le marché de la conscience, mise à niveau technologique des centres d’examens et des surveillants et une nouvelle stratégie pour l’enseignement supérieur.
En attendant de voir de telles solutions se concrétiser, j’aimerais souhaiter tout le courage du monde à tous les élèves honnêtes qui passent leurs concours et examens et saluer les efforts du brave corps pédagogique dont je n’aimerais point mettre en doute son honnêteté et son implication dans le projet : « Tunisie société du savoir »
Cet article m’a été inspiré par les dernières prouesses technologiques tunisiennes consistant à créer un environnement collaboratif mettant en œuvre les réseaux de télécommunications modernes, les smartphones, les réseaux sociaux, la malhonnêteté intellectuelle, les billets de banque, quelques ordinateurs et beaucoup de mauvaise foi pour tricher lors des épreuves des concours nationaux et surtout le fameux baccalauréat.
Et oui, comme si les honteux 25% ne suffisaient que peu pour créer des conditions propices à favoriser une forme de triche basée sur une hyperbole de moyennes, au cours de l’année, nous ramenant à des écarts énormes entre les moyennes obtenues en trois trimestres et celle obtenue lors du concours national, il fallait en rajouter une couche et pousser le concept jusqu’au passage des épreuves.
Bientôt et avec des parents de plus en plus complices de ce « crime », nous irons jusqu’au hacking des serveurs du ministère pour fausser les notes saisies.
Tempérons notre colère et essayons ensemble de comprendre ce pourquoi nous nous retrouvons dans une telle situation, aujourd’hui.
Je m’y suis penché pour en arriver au constat suivant :
- L’enseignement, en Tunisie, a perdu sa vocation d’apprentissage pour se détourner en mémorisation du savoir. Le système des examens, toutes matières confondues, ne cherche pas à évaluer la capacité de l’élève à retenir une information, à l’analyser et la ré-exploiter, mais, à juger son aptitude à réciter de tête le cours. Même les matières dites « scientifiques » ont droit à des tests qui nous rappellent l’auto-dictée (sciences naturelles, chimie, informatique et parfois même mathématiques).
Personnellement, j’ai eu la chance de faire mes études d’ingénieur à l’Ecole Nationale d’Ingénieurs de Sfax (ENIS) où le corps enseignant, que je salue vivement au passage, était conscient de sa mission et a autorisé les documents de cours pour la majorité des matières et a opté pour des épreuves faisant appel à la faculté d’analyse et appropriation du savoir acquis.
- La « démocratisation » des cours particuliers (le secteur informel du savoir) : Aujourd’hui, les élèves qui suivent des cours particuliers (communément appelés « études ») ne sont plus les élèves en difficulté de retenir totalement ce qui leur a été enseigné en classe. Désormais, tout le monde y passe ; génies, fainéants, bosseurs, cancres, …etc. et les parents, se croyant investir dans le savoir et l’éducation de leurs enfants, ont fini par corrompre une partie des enseignants qui trouvent plus « rentable » d’inciter leurs élèves à payer des « explications HD » que d’avoir un simple cours (je me demande si « cours » ne devrait pas être orthographié « court » dorénavant) magistral à l’école. Canal et Aljazeera l’ont fait, les enseignants l’ont révolutionné et bientôt ce sera vendu en kit au ministère de l’enseignement EBase, ESscience, ESmath, ESlettres, … avec des options au choix (info, allemand, italien, musique, …). Nous sommes devenus des Topaziens (coucou Marcel Pagnol) et pour nous, tout s’achète, même un diplôme.
- La non-adaptation à l’évolution technologique : La technologie a évolué au point que le matériel dédié à l’espionnage se vend comme des petits gâteaux, dans les rangs des élèves, à travers des pages Facebook « sponsorisées et publiques » et surtout « IMPUNIES ». Tu peux demander aux élèves de déposer leurs téléphones sur le bureau des surveillants durant le passage des épreuves, tu ne pourras jamais savoir s’ils en cachent d’autres avec des kits Bluetooth bien dissimulés sous les cheveux ou les « Hijabs » adopté in extrémis la veille du concours du bac (ça ne veut pas dire que toutes les filles portant le hijab sont des tricheuses ou qu’elles ne l’ont adopté que pour des raisons malhonnêtes, loin de moi de porter un tel jugement sur une liberté vestimentaire).
Nous devons mener une lutte toute aussi acharnée que contre le terrorisme, sur les antisèches technologiques (lois, moyens techniques, …) et les sanctions contre ces « criminels » doivent se durcir au point de la dissuasion. Autrement, le diplôme tunisien perdra de sa crédibilité et, dans quelques années, il nous sera impossible de concevoir une quelconque coopération technique avec n’importe quel pays dans le monde.
- Un système d’orientation universitaire trop sélectif et concurrentiel : L’actuel système basé sur les scores, le classement, le nombre de places disponibles et le nombre de postulants a de fortes chances pour réussir une Star-Ac qu’un système éducatif et universitaire. Pour certaines branches, les étudiants seront condamnés à l’avenir compromettant de diplômé supérieur au chômage.
Une refonte totale du système avec des branches plus adaptées au marché du travail et une adaptation de l’offre (en matière de branches) à la demande (le nombre de postulants) réduira l’avidité des élèves, tout comme les parents, d’avoir les plus grands scores quel que le prix à payer.
En quelques mots, la solution que j’entrevois, pour couper court à ces pratiques sales, se résume en :
Enseignement moderne orienté vers la réflexion, lutte contre le marché de la conscience, mise à niveau technologique des centres d’examens et des surveillants et une nouvelle stratégie pour l’enseignement supérieur.
En attendant de voir de telles solutions se concrétiser, j’aimerais souhaiter tout le courage du monde à tous les élèves honnêtes qui passent leurs concours et examens et saluer les efforts du brave corps pédagogique dont je n’aimerais point mettre en doute son honnêteté et son implication dans le projet : « Tunisie société du savoir »
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