
L'expert économique et président du cercle des financiers tunisiens, Abdelkader Boudriga, a estimé, lundi 2 octobre 2023, qu’il est difficile de compter sur soi, dans la situation actuelle.
En effet, le chef de l’État avait rejeté à maintes reprises un financement via le Fonds monétaire international, à cause de conditions que ce dernier imposerait au pays, et en affirmant que le pays comptera sur lui-même.
L’économiste a rappelé, au micro d’Elyes Gharbi lors de son passage à l'émission Midi Show, que la situation des finances publiques ainsi que les entraves et contraintes qui limitent l’intervention de l’État, outre un manque manifeste de ressources, empêchent le financement des investissements et des politiques publiques, sans recours au FMI.
Il a indiqué que la croissance prévue pour 2023 serait de l’ordre de 1,8% : elle n’est pas suffisante pour fournir les ressources nécessaires pour que la loi de finances 2024 et le budget de l’État boostent l’investissement, sans l’appui d’autres ressources. Il a aussi noté, dans ce cadre, le manque de visibilité par rapport au modèle économique.
Pour lui, sans accord avec le FMI, il sera difficile de trouver en 2024 l’espace fiscal nécessaire, permettant d’opérer les investissements nécessaires pour le développement et pour les politiques d’incitation fiscale, de financement via des lignes de crédit, etc. La seule solution, selon lui, serait de faire une croissance de 6% ou 7%. Or, les estimations de croissance sont de l’ordre de 2,3% à 2,4% pour 2024.
S’agissant du financement direct du budget par la Banque centrale, M. Boudriga a affirmé que 64 pays interdisent le financement direct de leur pays par la banque centrale du pays.
« Un financement direct par la BCT dans une situation normale n’est pas possible, n’est pas efficace et peut entraîner de graves dérives, notamment inflationnistes. Dans des cas particuliers, il est possible que les banques centrales interviennent directement, c’est le cas de la Banque centrale européenne lors de la pandémie du Covid-19 ou la crise russo-ukrainienne », a-t-il soutenu.
Et d’estimer que « cette intervention doit être limitée par une loi, pour éviter les dérives ». À titre d’exemple, le Portugal a limité cette intervention à 5% du budget de l’État et selon certaines conditions bien particulières.
Pour lui, « l’indépendance de la BCT est une manière d’imposer une discipline au gouvernement ». Et de rappeler que le secteur bancaire est en train de soutenir et de financer le gouvernement : un soutien de l’ordre de 20%, précise-t-il.
Il pense qu’« il est plus opportun d’inscrire le financement direct auprès de la BCT dans la loi de finances que de changer les statuts de l’autorité financière ».
I.N.

