Le chef du gouvernement Elyes Fakhfakh a tenu ce vendredi 13 mars 2020 une conférence de presse très attendue par les Tunisiens. Prévue pour 19h la conférence est arrivée après que les Tunisiens ont passé toute une journée à faire le tri entre rumeurs et informations avérées. On attendait des mesures fermes, alors que la Tunisie connait aujourd’hui l’enregistrement de trois nouveaux cas d’infection par le Covid-19, elles étaient là mais pas assez drastiques pour certains observateurs…

Le chef du gouvernement, Elyes Fakhfakh a annoncé ce soir que la Tunisie prendra désormais les mesures de prévention de l’épidémie de Covid-19 de niveau 3, bien qu’à l’heure actuelle nous en sommes à la phase 2. Le chef du gouvernement a annoncé à ce propos les mesures suivantes : la suspension totale des lignes maritimes, la suspension totale des vols à destination de l’Italie, la réduction de nombre de vols à destination de la France à un vol par jour, la réduction des vols à destination de l’Egypte, de l’Espagne, de la Grande Bretagne et de l’Allemagne à un vol hebdomadaire. Il a souligné que les voyageurs en provenance de ces pays devront respecter l’isolement systématique de 14 jours à partir de leur date d’arrivée.

Elyes Fakhfakh a annoncé l’annulation de tous les évènements culturels, scientifiques, des rassemblements et des foires. Il a annoncé la fermeture des cafés, des restaurants bars et boites de nuit à partir de 16h, ajoutant que les prières collectives dont la prière du vendredi seront suspendues et que les championnats sportifs qui se déroulent en salle fermée ou en plein air se tiendront sans public.

Le chef du gouvernement a souligné que ces mesures seront appliquées à partir de ce soir et jusqu’au 4 avril. Il a annoncé, en outre, la fermeture des jardins d’enfants et garderies scolaires ainsi que les écoles privées nationales et étrangères jusqu’au 28 mars avec possibilité de prolonger le délai.

Il a, par ailleurs, insisté sur le caractère préventif de ces décisions appelant à la responsabilité des citoyens et à leur sens des responsabilités. Elyes Fakhfakh a affirmé que la Tunisie pourrait contrôler la propagation du Covid-19 si les Tunisiens respectent scrupuleusement les consignes de sécurité énoncées par le ministère de la Santé. Il a toutefois rapporté les réserves du personnel de la santé publique qui constate avec circonspection le non-respect des mesures d’isolement. « Nous avons constaté que certaines personnes ne se conforment pas aux mesures de l’auto-isolement, c’est pour cela que nous allons prendre des sanctions strictes contre tous ceux qui ne se conforment pas à ces mesures et elles seront punies par la loi », a souligné le chef du gouvernement.

Le discours d’Elyes Fakhfakh, bien que concis et clair a eu droit à un accueil mitigé des Tunisiens. Si sur le fond, les mesures annoncées étaient satisfaisantes et attendues depuis déjà quelques jours, elles demeurent insuffisantes au vu des premiers commentaires recueillis. Sur la forme, les observateurs ont exprimé leur déception, trouvant le chef du gouvernement beaucoup trop « conciliant » et manquant de la fermeté qu’impose le contexte. Fermer les cafés à partir de 16h a été vivement critiqué dans le discours d'Elyes Fakhfakh. 

Notons que le directeur général de santé de base au sein du ministère de la Santé, Chokri Hammouda avait annoncé plus tôt dans l’après-midi, trois nouveaux cas d’infection au Coronavirus Covid-19 faisant grimper le bilan total en Tunisie à 16 personnes contaminées.

Les nouveaux cas ont été enregistrés dans les gouvernorats de Bizerte, Ariana et Tunis. Il a tenu à préciser que la moitié des cas enregistrés en Tunisie sont des cas importés, néanmoins la contagion locale augmente.

« Nous avons effectués 43 analyses dans un nombre de gouvernorat en Tunisie qui ont confirmés trois cas positifs. Le premier venant d’Egypte et les deux autres ont été contaminés en Tunisie », a assuré Chokri Hammouda.

Bien que toujours en niveau 2 dans l’échelle mondiale de la situation épidémiologique, la Tunisie risque fort de monter au niveau 3 si les consignes de sécurité ne sont pas drastiquement appliquées. Si elle est inéluctable, la contagion locale devrait être freinée et disséminée sur le temps comme l’ont précisé de nombreux médecins et spécialistes.

A l’heure actuelle, les contagions enregistrées touchent des personnes qui ont été en contact direct avec des patients infectés ayant importé le virus de l’étranger. Si les contagions locales se propagent en dehors de ce cercle, il est à craindre que la Tunisie passe au niveau 3. Avec le manque de moyens dans les hôpitaux publics et l’éventuel engorgement des structures sanitaires adaptées à accueillir les patients nécessitant une prise en charge dans les services de réanimation, la Tunisie doit se préparer au pire. Le sens de la responsabilité et les efforts individuels de chacun sont le seul rempart efficace contre un tel scénario et les médecins ne cessent de le rappeler….

Myriam Ben Zineb