37 plaintes, individuelles nominatives, ont été déposées par le comité de défense des juges révoqués, au nom de la majorité d’entre eux, contre la ministre de la Justice Leila Jaffel. C’est ce qu’a annoncé, lundi 23 janvier 2023 devant le Tribunal de première instance de Tunis, le porte-parole du comité de défense des juges révoqués, Ayachi Hammami.
Mme Jaffel est poursuivie pour non-application de verdicts judiciaires, en vertu de l’article 315 du Code pénal et de l’article deux de la Loi organique relative au signalement des faits de corruption et à la protection des lanceurs d’alerte.
« Nous accusons la ministre de la Justice de corruption et on lui demande de cesser le crime de non-application des verdicts judicaires. 37 juges sur les 49 magistrats révoqués ont déposé officiellement, aujourd’hui lundi 23 janvier 2023, des plaintes auprès du bureau d’ordre du Tribunal de première instance de Tunis.
Nous demandons au ministère public, qui a été très réactif en déférant les avocats pour les crimes auxquels ils ont été accusés par le ministère de la Justice, d’être rapide et dans les délais normaux pour auditionner la ministre de la Justice en tant qu'accusée.
On demande à la justice de respecter l’indépendance de la justice, de convoquer l’accusée et de lui demander d’expliquer les raisons pour lesquelles elle a commis ce crime ! Nous avons déposé ces plaintes, en toute confiance en nous et en notre juste cause », a-t-il martelé.
Et de rappeler qu’il y a des verdicts émis par le Tribunal administratif en faveur de ces magistrats depuis le 9 août 2022.
En outre, Ayachi Hammami estime que la juge Kheira Benkhelifa, attaquée par le président de la République qui a porté atteinte à sa réputation en conseil des ministres et dans une vidéo diffusée sur la Télévision nationale et qui a été innocentée par la justice tunisienne, doit être aussi blanchie par le chef de l’État.
Le président doit lui présenter des excuses en conseil des ministres et son discours doit être retransmis au public, selon M. Hammami.
Notons que l’article 315 du Code Pénal dispose : « Sont punis de quinze jours d'emprisonnement et de quatre dinars huit cents millimes d'amende :
- ceux qui ne se conforment pas aux prescriptions des règlements et arrêtés pris par l'autorité compétente,
- ceux qui, légalement requis, refusent de décliner leur nom et adresse ou énoncent de faux noms ou de fausses adresses,
- ceux qui, sans commettre l'infraction prévue à l'article 126 du présent code, auront troublé l'exercice de la justice à l'audience ou ailleurs,
- ceux qui vendent des denrées ou aliments au-dessus des prix fixés par l'autorité,
- ceux qui refusent, l'entrée de leur domicile, à un agent de
- l'autorité agissant en exécution de la loi ».
Pour sa part, le paragraphe C de l’article deux de la Loi organique n° 2017-10 du 7 mars 2017, relative au signalement des faits de corruption et à la protection des lanceurs d’alerte dispose : « Tout agissement contraire à la loi et aux règlements en vigueur, préjudiciable ou susceptible de porter préjudice à l'intérêt général et la prise illégale d'intérêt. La corruption englobe les infractions de concussion sous toutes ses formes dans les secteurs public et privé, le détournement de fonds publics, leur mauvaise gestion ou leur dilapidation, le trafic d'influence, l'excès ou l'abus d'autorité, et tous les cas d'enrichissement illicite, l'abus de confiance, l'abus de biens sociaux, le blanchiment d'argent, le conflit d'intérêts, le délit d'initié, l'évasion fiscale, le fait de faire échec aux décisions du pouvoir juridictionnel, et tous les faits menaçant la santé publique, la sécurité ou l'environnement. »
Rappelons aussi dans ce cadre que Ayachi Hammami est actuellement traduit devant la justice en vertu du décret 54 car il s’est attaqué au ministère de la Justice accusant le département de Leila Jaffel d’avoir commis un « second carnage » à l’encontre des juges révoqués par le président de la République Kaïs Saïed.
I.N