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Quand on est élu, la justice n’est pas la même
Par Marouen Achouri
30/10/2024 | 15:58
4 min
Quand on est élu, la justice n’est pas la même

 

Hamdi Ben Salah est un élu qui aurait agressé un fonctionnaire public de la municipalité de Sousse. Ce dernier est allé porter plainte et a assuré que l’élu de la République l’avait agressé verbalement et physiquement, allant même jusqu’à le gifler. Le ministère public a ordonné de placer Hamdi Ben Salah en garde à vue et le 25 octobre un mandat de dépôt a été émis à son encontre pour violence aggravée contre un fonctionnaire public dans l'exercice de ses fonctions et pour outrage envers un fonctionnaire public. Il doit comparaitre aujourd’hui devant la chambre correctionnelle.

Voilà pour les faits. A cause d’un différend opposant un fonctionnaire et un élu, ce dernier aurait giflé le monsieur. A la justice de démêler le vrai du faux et de prendre les mesures qui s’imposent, théoriquement. Sauf que les collègues de l’élu ne l’entendent pas de cette oreille.

Hier, l’Assemblée des représentants du peuple a tenu sa plénière de rentrée après de longues vacances parlementaires. Cette plénière a été émaillée par les contestations des élus réclamant la libération de Hamdi Ben Salah qui serait, selon eux, victime d’une injustice, évidemment. Ils ont accroché des affiches devant leurs sièges au parlement arborant la photo de l’élu en question. Pire encore, les contestataires sont parvenus à faire passer un point à l’ordre du jour : l’organisation d’une séance plénière pour convoquer les ministres de la Justice et de l’Intérieur pour répondre de l’arrestation du député Hamdi Ben Salah !

Avouez quand même qu’il y a du toupet dans cette décision, et pas qu’un peu ! Un député serait donc intouchable et doit pouvoir faire ce qu’il veut tant qu’il prétend que cela entre dans le cadre de ses prérogatives. Un élu doit pouvoir gifler un fonctionnaire en toute impunité, apparemment, et ce serait aux ministres de venir s’expliquer devant l’Assemblée. Certains disent que Hamdi Ben Salah ce serait emporté en défendant les intérêts de ses électeurs, mais cela lui permet-il d’enfreindre la loi ?

C’est toute l’hypocrisie de ce système qui se révèle de temps à autres à travers des incidents de ce type. Plusieurs parmi ces élus ont fait la campagne de Kaïs Saïed et ont justifié les arrestations et les mises en garde à vue de journalistes et d’activistes mettant en avant un besoin d’ordre et de justice. Mais cela ne doit pas s’appliquer à eux, apparemment. D’ailleurs, en termes d’application de la loi et des règles, l’ARP elle-même a des choses à revoir. Il y a eu l’épisode mémorable d’une plénière suspendue au sujet de la criminalisation de la normalisation avec Israël mais également plusieurs propositions de lois qui sont restées dans les tiroirs du bureau de l’Assemblée. Ce dernier devait d’ailleurs être renouvelé à l’occasion de la troisième session du parlement, c’est-à-dire hier. Mais l’ARP a décidé que cela pouvait attendre le mois de décembre.

On nous avait dit que le temps des avantages et des injustices était fini, on nous a répétés sans cesse que désormais, plus personnes n’aurait de « plume au-dessus de la tête ». Mais le fait d’être député permet quand même certains avantages. D’ailleurs, les voix qui critiquaient le fait de défendre les Sonia Dahmani et Mourad Zeghidi et autres en disant que seuls les privilégiés avaient le droit à ce soutien, sont totalement absentes aujourd’hui. Ceux qui disaient que les pauvres et les malchanceux n’avaient pas de porte-voix comme les « célébrités » n’évoquent pas du tout le cas de ce député qui aurait giflé un fonctionnaire. Il est clair que tout le monde n’est pas logé à la même enseigne et cela émaille quelque peu le discours officiel qui évoque sans cesse ce besoin de justice et d’application de la loi. Par exemple, une avocate et chroniqueuse comme Sonia Dahmani écope de deux ans de prison ferme pour des déclarations faites à la radio et à la télévision. De l’autre côté, quand on s’appelle Nizar Dax et que l’on est un fervent défenseur de Kaïs Saïed et de son régime, on peut être impliqué dans l’agression d’un agent de la Garde nationale et s’en tirer. En tout cas, il a été relâché après quelques heures. Il y a quelques mois, une avocate avait fait l’objet de dizaines de plaintes tant elle avait diffamé et injurié des personnes et des organisations à travers ses lives Facebook. Mais comme elle défendait le régime, aucune de ces plaintes n’a donné lieu à des poursuites. Par contre, le candidat à la présidentielle Ayachi Zammel fait face à de multiples condamnations pour falsifications de parrainages et l’on parle de dizaines d’années de prison !

 

Il est clair que tout le monde n’a pas le luxe de faire convoquer les ministres de la Justice et de l’Intérieur à cause de l’arrestation d’un député. Les pauvres, les démunis et petits jeunes de quartier ne l’ont pas, c’est sûr. Ils n’ont pas d’hémicycle qui met entre parenthèses sa supposée « révolution législative » pour régler le différend d’un de leurs collègues avec la justice. Mais bon, qui s’en soucie vraiment ?

 

Par Marouen Achouri
30/10/2024 | 15:58
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Commentaires
AR
L'hypocrisie est l'hommage que la vérité paie à l'erreur.'?'
a posté le 31-10-2024 à 13:39
Bizarre , étonnant quand-même que certains se permettent de jouer ... Les avocats du diable , pour justifier l'injustifiable !
C'est que nos élus , de part leurs statuts , ne trouvent aucune gêne pour se permettre un comportement délinquant !
Oui, mais c'est pour défendre l'intérêt général !!!
Une exuse pire que l'acte .
Si chaque élu ose tabasser les fonctionnaires , " bonne cause" oblige , l'intérêt machin , c'est plus question de justice , c'est la jungle .
Tout le monde se rappelle du grave incident , de l'invasion de l'aéroport , commis par un gang de barbares , mené par le premier bandit du quartier , un élu et de surcroît , tiens , un avocat , pour défendre...
Beaucoup d'encre a coulé , pour dénoncer la sale affaire , pas la seule , violences , menaces....
Et après la boutique est mise sous scellés .
Une nouvelle équipe débarque , quel soulagement !
Croyant naïvement que cette époque est bien révolue.
Des élus habillés en bandits justiciers, c'est viscéral.
Et avec le luxueux culot de convoquer des ministres pour se justifier !
C'est peu , il fallait d'abord mettre la victime sous les verrous , après une bonne correction
Electeur
Non au karakouzes !
a posté le 31-10-2024 à 11:45
Au élus de respecter la justice , et la laisser faire ses enquêtes, et juger. Ce comportement est typiquement corporatiste est indigne,éradique la crédibilité et le sérieux des élus aupres du peuple.Que les élus se rappellent que le peuple tunisien ne supporte plus vivre de nouveau ,les karakouzes insupportables du parlement d antan, et que Kaies Saied sera obligé de dissoudre le parlement ,si les élus ne cessent pas de se comporte en une corporation politique qui défend et justifie des previleges absurdes ,,entravent la justice et se croient au dessus du peuple..
Ntc
Abject
a posté le 31-10-2024 à 09:44
C'est vraiment abject. Utilisé une cause juste pour attaquer le système est immoral. Le fautif quoi qu'il en soit doit répondre de ses actes et basta. Essayer de trouver autres choses pour attaquer KS
A4
Ils n'ont pas encore compris ...
a posté le 30-10-2024 à 19:07
que le slogan de la décennie rose est "prison pour tous" !!!
Et tout le monde est appelé à "jouir" de cette grande réalisation: journalistes, industriels, candidats aux élections présidentielles, avocats, hommes et femmes politiques, tiktokeurs, et pourquoi pas députés aussi !
Et que la fête continue !!!
Avocate
@Ya Marouen
a posté le 30-10-2024 à 18:35
Vous dites bien que la victime "a assuré" que l'élu l'a agressée. Donc, pas de témoins ni de flag.
J'ose espérer que vous connaissez, un minimum, vos fondamentaux en matière juridique !
Pour votre info, la loi dispose que seul le flag peut entrainer l'arrestation de l'élu sans attendre la levée de son immunité par le parlement; autrement, la procédure judiciaire est non règlementaire et les élus sont en droit de demander des comptes à la justice en cas de non respect de la loi par ses agents.

Alors, au lieu de casser du Saied, que vous mettez à toutes les sauces (Plusieurs parmi ces élus ont fait la campagne de Kaïs Saïed...blabla..), soyez honnête, pensez un peu à votre "idéal de justice" avec lequel vous avez longtemps bassiné vos lecteur, et laissez béton la démagogie.
A bon entendeur ;))
Ridha
Idéal de justice ?!!
a posté le à 23:57
BN avait un idéal de justice Ha ha ha !... C'est une blague !
LMT
Libération
a posté le 30-10-2024 à 17:34
Depuis un certain temps on nous rebat les oreilles avec des slogans comme "libération nationale", "nouvelle page de l'histoire de la Tunisie". De qui doit-on se libérer si ce n'est de cette clique d'incompétents qui gouvernent le pays, quant à la nouvelle page de l"histoire de la Tunisie" elle est bien noire à cause des mêmes incapables.