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« Plan économique pour la Tunisie » : Un Prix Nobel contre-attaque !
26/05/2011 | 1
min
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Dans une tribune publiée jeudi 26 mai 2011 par le quotidien français Le Monde, Edmund Phelps, Prix Nobel d'économie 2006, et directeur du Centre d'étude sur le capitalisme et la société à l'université Columbia (New York), critique ouvertement le « plan économique pour la Tunisie ».

Ce plan présenté par le groupe d’économistes afin de soutenir la transition démocratique de la Tunisie devrait être proposé aux responsables du G8 (27 et 28 mai à Deauville). Sur les réseaux sociaux, les critiques fusent : des voix s’élèvent contre ce plan qui devrait « hypothéquer l’avenir de la Tunisie », d’autres l’apparenter à une forme moderne de colonialisme ! Certains vont même jusqu’à considérer le gouvernement de transition (ou temporaire) comme inéligible à prendre pareilles décisions.

Pour Edmund Phelps, le diagnostic sur lequel le plan a été élaboré considère que « la Tunisie souffre d'une économie "fermée", d'une gouvernance "autoritaire" et d'"infrastructures médiocres"», ce qui explique que ce plan propose une « aide immédiate pour les subventions alimentaires et énergétiques" et un plan quinquennal d'investissements dans les transports intérieurs, le secteur des technologies et quelques zones industrielles ».

Or, « ce diagnostic est erroné », affirme Edmund Phelps !
Et d’ajouter : « les mesures préconisées sont vaines, et pourraient même se révéler nocives » car, explique-t-il, « il est important que l'aide étrangère à la région soit de nature technique et qu'elle vise à éliminer les obstacles entravant l'accès aux emplois et aux carrières gratifiantes ».

Pour le Prix Nobel d'économie 2006, « le mal commis par le régime Ben Ali ne provenait pas du fait qu'il tolérait des prix libres dans le secteur de l'alimentation et de l'énergie, ni de ce qu'il n'investissait pas dans les infrastructures. Le mal fut de priver la masse des citoyens de la possibilité de se développer en empêchant les moins favorisés d'accéder aux emplois, de lancer leur entreprise et d'occuper des postes qui leur auraient permis de rivaliser avec les privilégiés ».

Il propose deux mesures sur lesquelles sera établie la restructuration dont la Tunisie et l'Egypte auront besoin.

Il s’agit, en premier lieu, de « mettre un terme au contrôle politique du secteur des affaires par une caste privilégiée- en Tunisie, celle-ci est composée des amis et parents de Leila Trabelsi, l'épouse de l'ex-président Ben Ali ; en Egypte, ce sont les officiers supérieurs de l'armée nommés par Hosni Moubarak », analyse t-il.
Ensuite, il s’agit de « supprimer le contrôle bureaucratique de l'auto-entrepreneuriat au travers des licences et autres obstacles. Ce n'est qu'ensuite que la modernisation du système économique pourra s'amorcer ».

Car le danger qui pourrait guetter la Tunisie post-révolution est celui de « prescrire des subventions sans abattre les obstacles à l'inclusion. Ce serait, alors, une démarche dangereuse qui pourrait porter tort à l'éthique du travail des Tunisiens, si précieuse en cette période cruciale ».

A cet égard, « en offrant des perspectives à l'élite tunisienne, ajoute-t-il, l'ambitieux programme d'investissements pourrait aboutir à élargir encore le fossé séparant les privilégiés des citoyens ordinaires - et aggraver l'oppression ».

Passant en revue les orientations économiques qu’il préconise pour la Tunisie et l’Egypte, il propose « le capitalisme de base - capitalisme 1.0 - tel que l'ont développé la Grande-Bretagne et les Etats-Unis au cours de la première moitié du XIXe siècle dans leur marche vers des économies performantes : droits contre l'Etat, droits de propriété, droit de contracter, Etat de droit, banques locales en relation avec des entrepreneurs locaux, établissements financiers procurant du capital-risque, libre entrée de nouvelles entreprises dans le secteur industriel, etc »

Car, si le « le système économique en vigueur en Tunisie et en Egypte est défini comme un corporatisme, et plus exactement un corporatisme de droite. (…), un de ces dangers serait que ces forces bien intentionnées contribuent à l'émergence d'un corporatisme de gauche dans lequel syndicats et copains bien placés remplaceraient les familles dirigeantes, mais dans lequel subsisterait ou renaîtrait la nécessité d'avoir des relations et de solliciter des licences. ». Et d’avertir que « ce danger ne doit pas être négligé par les réformateurs ».

Pour lui, « la réussite dépendra du respect des droits individuels et de l'instauration de l'Etat de droit. Le succès dépendra aussi de la volonté populaire de tolérer les différences et d'accepter la compétition ».
26/05/2011 | 1
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