Par Houcine Ben Achour
En 2016, lors de la tenue de la 34e Conférence annuelle des Chefs de missions diplomatiques et consulaires, On avait espéré que ce rendez-vous constituât un tournant pour la diplomatie tunisienne dont les missions se concentreront davantage sur le volet économique. L’Accord conclu alors entre le Cepex (Centre de promotion des exportations) et le ministère des Affaires étrangères d’introduire dans l’organisation de cet important événement, une composante exclusivement dédié à la coopération économique extérieure sous la forme d’une rencontre interactive entre les opérateurs et les Chefs de missions diplomatiques à l’étranger, a été largement salué. Deux ans plus tard, le changement espéré tarde encore à se matérialiser.
Le thème de la Conférence de cette année portant sur “La diplomatie, une action soutenue pour réussir les prochaines échéances: Sommet arabe et Sommet de la francophonie et l’entrée de la Tunisie au conseil de sécurité de l’ONU” traçait clairement les objectifs diplomatiques de la Tunisie pour les deux prochaines années. Soit.
Cependant, qu’en est-il déjà des objectifs assignés lors des précédentes rencontres. A-t-on « adapter les mécanismes diplomatiques et gagner les paris du développement » comme le proclamait le thème de la Conférence de 2015 ? A-t-on emprunté le bon chemin pour « La Tunisie à l’horizon 2020 : une diplomatie active au service de la sécurité et du développement », thème de la rencontre de 2016 ? A-t-on matérialisé les Accords conclus, lors de la conférence de 2017, avec le ministère du Tourisme et Culture, à l’instar de celui finalisé avec le Cepex ? La diplomatie, à l’image de tout autre dossier politique ou socioéconomique ou culturel, se doit également d’être évaluer à l’aune des objectifs qu’elle s’est fixée. Cela est d’autant plus vrai lorsqu’il s’agit de diplomatie économique.
Or, sur ce volet, le bilan est bien maigre, mettant à nu notre incapacité à adapter les mécanismes diplomatiques aux impératifs économiques du pays. Certes, on peut toujours se réjouir du fait que le pays est devenu membre du COMESA, le Marché commun de l’Afrique orientale et australe (Common market of eastern and southern Africa). Néanmoins, cela ne peut en aucun cas constituer une finalité. Bien au contraire, c’est maintenant que la diplomatie économique doit jouer pleinement son rôle dans la matérialisation d’un tel avantage. Notre diplomatie saura-t-elle y faire ? Au vu des expériences passées, c’est l’incrédulité qui prime. Il suffit pour ce faire de tenter d’établir une évaluation des retombées de la fameuse Conférence internationale Tunisia 2020. Il faut bien avouer que, pour l’heure, le bilan est squelettique par rapport aux promesses formulées lors de cette conférence dont le montant global était estimé à environ 35 milliards de dinars. Les investissements directs étrangers n’ont pas décollé demeurant encore à un niveau d’à peine 2% du PIB et les exportations du pays n’ont été boostées qu’à la faveur de la détérioration du taux de change de la monnaie nationale. A cela, il convient d’ajouter l’inscription du pays sur la liste noire des paradis fiscaux et celle des pays exposés aux risques de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme. Voila le résultat de notre diplomatie économique. Ce n’est là d’ailleurs que la conséquence d’une absence d’innovation et d’approche. La diplomatie économique exige une présence remarquée de nos représentants diplomatiques à l’étranger. Combien de nos diplomates à l’étranger ont sillonné le pays au sein duquel il représente la Tunisie comme le font la plupart des diplomates étrangers en Tunisie afin d’affiner leur vision du pays, loin des données statistiques et autres législatifs et réglementaires et plus près de la réalité.
Il faudrait que nos diplomates se comportent parfois en businessman pour éclairer idéalement les chefs d’entreprise et contribuer de la sorte à minimiser leurs risques d’exportations ou d’investissements sur les marchés extérieurs et particulièrement sur les marchés inconnus. Ont-ils tous cette aptitude ? Rien n’est moins sûr. Est-ce pour cette raison que le président de la République, Béji Caïd Essebsi, a laissé entendre lors de son discours clôturant la dernière Conférence annuelle des représentants diplomatiques et consulaires qu’il serait pas étonnant qu’il désigne dorénavant des ambassadeurs hors du sérail du ministère Affaires étrangères ? Peut-être.
Quoi qu’il en soit, s’il est vrai que le ministère des Affaires étrangères porte une responsabilité non négligeable dans la faiblesse de notre présence économique extérieure, le ministère du Développement, de l’Investissement et de la Coopération internationale y contribue pour une large part. Ce ministère donne le sentiment d’être plus apte à contracter des emprunts à tout va qu’à attirer les investisseurs étrangers, plus volontariste pour signer les conventions de prêts plus que de rappeler judicieusement aux acteurs de la Conférence Tunisia 2020 et autres à leurs engagements. Mais cela est une autre paire de manche sur laquelle on reviendra.
Commentaires (12)
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@Magon le Carthaginois
Il faut avouer aussi que tous les commentaires ci-dessous sont très intéressants!
Très Cordialement
Jamel
Non pas le jour la poule aura des dents
Alors va comprendre pour en parler H.B.A!
Nos actuels diplomates sont de vrais BUSINESSMEN mais pour leurs intérêts... 45 JOURS DE CONGE ANNUEL injustement!
Entre l'ALECA et la ROUTE DE SOIE... vaut mieux fermer ce ministère des affaires étrangères qui ne sert à rien sauf ...
a corps diplomatique squelettique
il ne faut pa chercher de midi à 14heures ! l'action à mener est colossale surtout depuis ces dernières années de "vaches maigres" (huit ans déjà soit une année de plus que les sept années fatidiques ! et soeur "Dhihia" qui ne voit rien venir !quel effort demander à nos pauvres diplomates (un mot qui ne convient plus d'ailleurs tellement à la fonction telle qu'elle devrait être conçue ....depuis bien avant la conférence citée par l'auteur)dramatiquement dépourvus de moyens de leurs propres aveux en forme de litanie !des ambassadeurs hors du sérail ?un sérail succéderait ainsi à un autre sérail....et puis cela s'est déjà produit sous les deux régimes précédents (avec un paroxysme sous l'ère Ben Ali et en vertu du même prétexte(frilosité sinon inefficacité du personnel des affaires étrangères) aboutissant finalement à la nomination d'affidés( pharmaciens -nnes profs de médecine ,avocats officiers policiers et j'en passe...)loin d'être familiarisés avec l'environnement économique....et il est à craindre que cette tradition clientéliste se perpétue à l'infini tant elle colle à nos moeurs! il es t vrai aussi qu'on décèle chez nombre" d 'agents du secteur" une fâcheuse tendance à se gargariser du terme désignant la fonction (je suis diplomaaate...) en oubliant les sacrifices et les obligations que cela implique(une véritable vocation) pour ne retenir que l'aspect "vain" attaché au " prestige" de la fonction.....sans oublier ceux qui ,dit-on sont surtout préoccupés par le souci d'améliorer leur train de vie une fois de retour au pays ....les "consommateurs" comme les qualifiait parait-il le président déchu...sur l'air de faites ce que je dis et pas ce que je fais?
En fin de compte j'en viens à me demander si la formation de ce qu'il faut bien encore nommer le futur diplomate sinon le diplomate tunisien du futur , ne devrai pas faire partie des programmes du "primaire"....toute une éducation....dans le cadre d'une remise à plat globale d'une opération de salubrité publique et citoyenne ! il est vrai que dans cette optique il conviendrait alors de prendre en compte la situation matérielle "d'instits" d'élite(style 3ème république(pas la nôtre) et améliorer leur formation !la quadrature du cercle !
Démarcher, faire du lobbying,
Balayons d'abord devant nos portes
Dr. Jamel Tazarki | 02-08-2018 21:17
Votre intervention ainsi que vos deux longs commentaires, celui du 31.07 adressé @Si Samir Majoul et celui du 01.08, intitulé « Agrandir plutôt les petites entreprises », décrivant les mécanismes à mettre en place pour «bouster» l'exportation des produits tunisiens, peuvent être considérés comme des séminaires dignes de ceux enseignés à la Harvard Business School ou à la MIT Sloan School of Management.
Mais je crains que vos conseils vont tomber dans les oreilles de sourds, vu l'incompétence des dirigeants et hommes politiques tunisiens.
M. Houcine Ben Achour a raison de dire que 'nos diplomates n'ont pas la mentalité de businessmen ». Rien d'étonnant de tout cela quand on nomme au Ministère des affaires étrangères des personnes non pas pour leur compétence, mais par calcul purement politique. C'est le cas par exemple de l'ancien député à l'ARP pour la circonscription d'Allemagne qui a été catapulté le 7 septembre 2017, du jour au lendemain (baina leilatin wa dhou7ha, comme on dit en arabe) Secrétaire d'Etat aux affaires étrangères chargé de la DIPLOMATIE ECONOMIQUE, et ceci à la suite d'une combine de Nida (avec le consentement de Nahdha) pour frayer un chemin à Hafidh Caid Sesbsi pour accéder à l'ARP d'abord comme député, puis comme président du parlement.
Cette combine est tombée à l'eau avec le résultat qu'on sait. Un nouveau député qui n'a jamais résidé en Allemagne et qui ne connait Wallou ni de la langue, ni de la législation allemandes.
Cordialement
Mais tout ça va changer avec notre nouveau consul : madame Mourou
Madame Mourou est surdiplômée et saura vendre la Tunisie au plus offrant, elle a une vraie mentalité de commerçante vendeuse de tapis.
Et notre guide spirituel le cheikh Ghannouchi est un très bon commeçant, il a trouvé un filon intarissable pour gagner de l'argents des hassanates : la religion.