Le Mea-culpa d'Ennahdha
*Par Karim Baklouti Barketallah
Ennahdha est en train de tenter de nous montrer qu'il a changé et qu'il passe d'un parti réputé violent, à un parti politique dont le but est de participer à la gouvernance du pays.
Soit.
Ennahdha n'est certes pas responsable de tous les maux de la Tunisie mais en 2 ans de gouvernance, il a commis d'énormes désastres. Et pourtant, on doit avancer.
Nous ne pouvons toutefois avancer, sans faire de bilan et le bilan d’Ennahdha est celui-ci:
- Il a empêché la justice transitionnelle de se faire, lui préférant la justice transactionnelle, privant ainsi le pays de milliers de fonctionnaires et des centaines de chefs d'entreprises, qu'il maniait à sa guise en dehors des circuits officiels.
- A mis à genoux une administration déjà fragile, par des embauches massives sans lien aucun avec les compétences par rapport aux postes.
- A démantelé le ministère de l'Intérieur, lui ôtant ses principaux cadres et en y installant des gens qui lui sont fidèles allant jusqu'à mettre en place une police parallèle.
- A permis aux salafistes de vivre tranquillement dans le pays, de faire leurs messes en pleines rues et d'y installer leurs tentes pour recruter les jeunes qui sont allés combattre en Syrie et ailleurs.
- A permis aux terroristes de s'entraîner sur les hauteurs du pays (cholestérol) allant jusqu'à ordonner aux agents de l'ordre de ne pas tirer sans en avoir reçu l'ordre.
- A permis a Abou Iyadh de quitter tranquillement le territoire.
- A permis à ses associations de ramener les prédicateurs les plus extrémistes qui ont propagé la culture de la haine dans les mosquées.
- A été permissif avec les allées et venues avec la Libye favorisant ainsi les caches d'armes que nous découvrons ici et là.
- A fait en sorte que les mosquées deviennent des lieux de propagande en dehors du contrôle de l'Etat.
- N'a pas permis à la justice d'avancer correctement dans les procès de Chokri Belaid et de Mohamed Brahmi.
- A favorisé le départ de milliers de jeunes vers les zones de conflit. Souvenez-vous de la déclaration de Laârayedh quand on lui a demandé pourquoi il n'empêchait pas ces jeunes de partir : "chacun est libre de circuler"disait-il.
- A mis à genoux l'économie du pays par l'incompétence de ses ministres et ceux de ses partenaires de l'époque (CPR et Ettakatol) et par des "compensations" et des "régularisations de situations administratives de ses bases" par milliers...
Quand ils ont perdu les élections, celui qui prenait le pouvoir avait deux choix:
- Leur faire leurs procès
- Les associer a la vie du pays afin qu'ils comprennent que ce pays peut contenir tout le monde et qu'ils se devaient de cesser de continuer à vivre dans la terreur. N'ayant pas en tous les cas d'autres choix que d'essayer de les changer et éviter la confrontation qui aurait été bien nuisible au pays eu égard a leurs "avancées" sur le terrain.
A partir de là et étant donné que les choix sont faits et étant donné qu'Ennahdha veut devenir ce parti qui dissocie (hypocritement) le religieux, du politique, et afin d'essayer de se réconcilier avec une bonne partie de la population tunisienne, le parti doit avouer certaines de ses erreurs même en les imputant sur l'inexpérience.
On ne peut nier que Rached Ghanouchi a su avec BCE éviter au pays de s'ensanglanter, comme on ne peut nier sa capacité d'adaptation aux situations nouvelles.
Mais comme pour les crimes commis par les régimes qui ont précédé le 14-Janvier, on ne peut avancer sans faire une évaluation de ce qui s'est passé, en tirer les meilleures conclusions et ainsi avancer sur des bases autrement saines et surtout claires.