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Chroniques
La mort des nouveau-nés : Un crime avec préméditation
Par Sofiene Ben Hamida
10/03/2019 | 17:30
3 min
La mort des nouveau-nés :
Un crime avec préméditation
 
Pour un nouveau-né, la mort n’est pas la règle. Elle n’est pas une fatalité. La mort, quand il s’agit d’un nouveau-né, est un accident terrible de la vie. Mais comme pour tout accident, s’il est prémédité, il devient un crime.
 
Tout le pays a été secoué ce week-end par le décès de onze nouveaux-nés dans le centre de maternité et de néonatalogie de Tunis. Ce traumatisme collectif causé par cette catastrophe nationale s’explique par le nombre de victimes trop élevé ainsi que par le comportement peu respectueux envers leurs familles et leur prise en charge catastrophique par les structures du ministère de la Santé.
 
Cette catastrophe, il n’y a pas d’autres mots pour la qualifier, a mis à nu, dans toute sa laideur, la réalité de notre système de santé, délabré, sclérosé et définitivement inapte à assumer sa mission envers les 87% de Tunisiens qui ne peuvent pas se soigner, eux ou les membres de leurs familles, faute de moyens, dans le secteur privé.
 
 
Bien entendu, les politiques n’ont pas raté l’occasion pour nous faire leur cirque. Les partis politiques ont publié des communiqués pour exprimer leur indignation, un ministre a démissionné, un conseil des ministres s’est tenu en urgence et cette question sera l’un des points de la réunion du Conseil de la sûreté qui se tiendra lundi sous la houlette du président de la République. Tous semblent effarés, surpris et impatients de désigner un responsable sur qui on pourra se décharger et qui sera le fusible qui sautera pour permettre à tout le système défectueux de la santé publique de donner l’impression de résister, jusqu’à la prochaine catastrophe.
 
 
Tous, sauf les plus avertis, surtout parmi les professionnels de la santé, qui voyaient le drame venir et pour qui la mort des onze nouveau-nés à la Rabta était une catastrophe attendue, prévisible et annoncée.
Sans essayer de se voiler la face, la société tunisienne de pédiatrie a annoncé dans un communiqué publié samedi, que le décès des onze nouveau-nés est dû à des infections nosocomiales dont le point de départ serait un produit d’alimentation parentérale. Elle a appelé les autorités à faire la lumière sur les circonstances de la contamination des produits et à prendre les mesures nécessaires pour mettre en conformité les services de soins avec les normes réglementaires. Elle a enfin rappelé la précarité des conditions de travail des professionnels de la santé et l’urgence de sauver l’hôpital public.
 
 
En vérité, ce communiqué n’est que le dernier cri d’alarme lancé par le les professionnels de la santé. Il y a neuf mois, en juillet dernier, l’un d’eux, le docteur Mohamed Douagi, avait alerté sur la situation catastrophique de ce même service de réanimation néonatale de la Rabta, condamné de gérer quinze mille naissances chaque année, en plus des transferts, avec seulement un médecin chef du service et deux de ses assistantes.
 
L’année dernière, cinq autres enfants ont trouvé la mort dans un service de néonatologie d’un autre hôpital de la capitale. Au cours des dernières années, des dizaines de dossiers de corruption, de malversations, de crimes organisés dans le secteur de la santé ont été mis à jour. Les affaires du sang contaminé, des stents périmés ou de la contrebande des médicaments ne sont que des exemples parmi des dizaines d’autres.
 
Dans son rapport pour l’année 2016, l’Instance nationale pour la lutte contre la corruption a présenté 46 recommandations touchant le secteur de la santé parmi les cent recommandations contenues dans son rapport. 
 
 
Alors de grâce, ne cherchons pas de bouc émissaire à la mort des onze nouveau-nés. Cherchons plutôt un remède à notre système agonisant de santé publique. Ce remède existe si nos politiques veuillent bien rompre leurs rapports de vassalité avec les instances internationales et mettre l’intérêt de leurs concitoyens au dessus de leurs intérêts égoïstes.         
Par Sofiene Ben Hamida
10/03/2019 | 17:30
3 min
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Commentaires (14)

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Bob
| 11-03-2019 12:27
On a dit différemment la même chose, tant mieux. On finira peut-être par convaincre? Et comme j'ai fait fait au moins une faute (je me relis rarement) , je me presse de la rectifier celle qui écorche vos oreilles de puriste (une qualité qui se perd): il faut lire 'en termes sibyllins'.

suarios
| 11-03-2019 11:34
hui ans passés, aprés une révolution dont le seul but est d'améliorer et de chambarder tout un systéme politique qui a soufflé sa dernniére bougie . Toute une génération DE jeunes qui en a marre de son déficit qui s'aggrave d'une année à une autre, se sont soulevés mais malheureusement leur réve s'est trouvé de plus en plus éloigné et flou , mais ce qui est apparu clair et réel , les gouvernants qui ont pris durant toute cette période à gérer la destinée de ce peuple et le guider vers la dignité et le bien étre continuent jusqu'à ce jour de tatonner et d'expérimener les voies à prendre et à chercher la juste et réelle sortie de ses blessures et de ses défaillances, et enfin de compte, ils ont choisi la pire solution qui est de se débarrasser par étapes et en douceur de tout ce qui est lié aux secteurs publics et en l'occurence les services attachés à la santé et à l'éducation, et ils ont commencé à encourager et à inciter par tous les moyens les privés à les accaparer et les dominer et subitement on a constaté des cliniques et des écoles qui surgissent comme des champignons dans toute la république, dirigés par des bailleurs de fonds et des corporations qui imposent leurs lois et leurs exigences, et voilà où en est maintenant, cette sorte de privatisation sauvage cause à toute la nation chaque année des grabuges, des manifestations, des soulévements , des catastrophes et des pertes colossales qu'on ne sache pas où elles vont nous amener tot ou tard

Bob
| 11-03-2019 11:28
Ce qui m'épate chez les tunisiens c'est qu'ils arrivent toujours à la conclusion de chaque affaire avant même d'ouvrir le dossier. On trouve vite le coupable : infection nosocomiale (notion fourre-tout mystérieuse qui a l'avantage d'écarter ou atténuer toute responsabilité humaine) avant toute enquête bactériologique qui demande logiquement plusieurs jours . On ne connait pas la prudence, on se passionne, on conclue, on monte tout en flèche, on condamne, on s'invective, et puis tout disparaît et on passe à autre chose. La passion n'est pas faite pour durer. Qui se souvient des enfants du Regueb? c'était il y a une éternité! On a parlé de viol avant la conclusion judiciaire, même une ancienne juge disait que les médecins ont démontré le viol alors qu'aucun médecin ne peut conclure de cette manière, car le viol ne peut être démontré que par l'enquête judiciaire, le viol étant une notion seulement judiciaire et non médicale. Quelle légèreté! Pour enterrer une affaire, il suffit de la mettre sur la place publique et laisser la foule la désosser. Quant à la conclusion de l'article, comme d'habitude on parle de choses sérieuses en termes sibyllines, avec des sous-entendus (le contraire d'un travail journalistique) et comprenne qui pourra. Que veut dire '...rapports de vassalité avec les instances internationales'? Quelles instances? Quel rapport avec des enfants morts pour avoir eu la malchance de naître chez les pauvres dans un pays qui ne respecte pas les pauvres, qui ne respecte pas la vie?

Maxula
| 10-03-2019 22:42
Le crime (contre la décence et la mesure) était presque parfait !

Et on a beau s'indigner facilement contre "les politiques [qui] n'ont pas raté l'occasion pour nous faire leur cirque", on ne fait pas mieux, en montant dans les octaves, pour crier haro sur le baudet administratif et/ou politique !

Pour un peu, on dressera l'échafaud en Place de Grève-Bab B'har, on attellera les charrettes et fouette cocher !
Reste seulement à trouver le bourreau !
M'est avis que cette "indignation générale" n'est pas plus née et n'a pas été plus alimentée par le décès des 11 bébés que par le fait qu'ils aient été "rendus" à leurs parents dans des boites en carton !
"La décence et la mesure" ne seraient-elles pas plutôt de mise, au moins jusqu'à la fin de l'enquête et l'établissement de la vérité ?

Dernière remarque :
"condamné de gérer quinze mille naissances"
Ou : condamné "à" gérer ?
Maxula.

A4
| 10-03-2019 21:24
S'attendre à du bon travail dans la fonction publique est une UTOPIE !!!

selim
| 10-03-2019 21:16
ce qui est incontestable est que le système de santé est en severe difficulté et infiltré par des profiteurs qui cherchent la fonction publique mismar fihit.
Deux choses à retenir : il faut rendre honneur à abderraouf cherif qui a démissionné de son propre chef (comme dans les démocraties nordiques) et il faut abolir la notion de pérennité du fonctionnaire de la fonction publique: le poste est soumis à évaluation constante avec validation de critères indépendamment des syndicats (vraie cancer de la fonction publique avec les nahdhaouis).

mansour
| 10-03-2019 21:10
parce que nous avons refusé d'admettre que remplacer les compétences de nos professionnels et auxiliaires de de notre système médicale par des nominations sans compétences réelles mais par servitude aux corrompus islamistes freres musulmans salafistes pour obtenir leur soutien à l'Assemblée depuis la troika islamiste d'Ennahdha+Marzouki et Mustapha Ben Jaafer jusqu'à aujourd'hui avec le gouvernement Ennahdha-Youssef Chahed

Gg
| 10-03-2019 20:33
..."Ce remède existe si nos politiques veuillent bien rompre leurs rapports de vassalité avec les instances internationales".
Ce sont les instances internationales qui préconisent le manque d'hygiène généralisé, le vandalisme et le laisser aller dans les hôpitaux?

bahr
| 10-03-2019 20:22
nous sommes tous responsables de ce crime. nous l avons tous vu venir et nous nous sommes tous tu ! et sommes tous encore immobile derrière nos écrans !

Citoyen 1956
| 10-03-2019 20:18
Pourquoi vous n'en parlez pas ?