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Tribunes
Hamadi Jebali connait la musique
06/12/2011 | 1
min
Hamadi Jebali connait la musique
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Par Walid BEL HADJ AMOR

Longuement interviewé sur Mosaïque FM hier, Hamadi Jebali, secrétaire général du mouvement Ennahdha et candidat au poste de chef du gouvernement, a brillamment démontré qu’il connaissait la musique. Il proclame que le mouvement du Bardo vise Ennahdha, qui n’a pas encore gouverné ni même encore formé de gouvernement. Il feint d’oublier que le rôle de l’Assemblée constituante n’est pas de gouverner mais principalement de rédiger la constitution et accessoirement de désigner et contrôler un gouvernement provisoire. Il avait bien compris que le mouvement du Bardo avait pour objectif principal de prévenir contre le risque évident de voir Ennahdha confisquer la Démocratie et instaurer une nouvelle dictature par les urnes.

Il feint d’oublier qu’Ennahdha n’est pas majoritaire dans le pays, ni même au sein de l’Assemblée. Il feint encore d’ignorer que les élus ont un mandat du peuple, mais que le peuple reste souverain et montre qu’il est vigilant.
Il feint d'ignorer que les partis qu'il accuse aujourd'hui de s'opposer au choix du peuple sont ceux-là mêmes qui ont défié la dictature de Ben Ali et du RCD pour défendre « l'Emir » d'Ennahdha et obtenir sa libération.
Il feint de présenter au peuple le projet d'un régime parlementaire, la Grande Bretagne en trompe l’œil, qui a les habits d'un régime de « majlis choura », en vue d'isoler le pouvoir entre les mains d'un parti en définitive minoritaire.
Il fustige les médias d'avoir montré les images des barbus en Kamis, de chercher à faire peur, comme si c'était des images fabriquées. Il regrette tant de ne pas avoir les médias à sa solde, pour leur dicter programmes et images.
Il crie au complot contre l'intérêt du pays et accuse les démocrates de contribuer à enliser le pays, oubliant qu’ils sont sous mandat de leurs électeurs, pour contribuer à obtenir un texte équilibré, qui consacre la démocratie.

Il parle de la politique de la terre brûlée mise en pratique par les partis d’opposition, alors qu’il sait pertinemment qu’après son passage il n’y aura guère plus rien à brûler. Il crie déjà au complot avant même d’avoir assumé le pouvoir. Demain il nous dira qu’Ennahdha n’a pas réussi à relancer l’économie à cause du complot mené par les investisseurs tunisiens et étrangers, qu’elle n’a pas pu régler les conflits sociaux à cause des complots menés par les syndicalistes, et que sais-je encore ? Peut être nous ressortira t-il un jour la préférée de Ben Ali, « le complot ourdi par des forces extérieures jalouses de la réussite de la Tunisie », patientez un peu, ça viendra.
Il fait semblant de croire qu’il y a une majorité au sein de l’Assemblée, alors même que les élus du CPR et d’Ettakatol ont voté contre le projet d’Ennahdha comme un seul homme. Alors même que ces deux partis répètent à l’envie que la coalition ne tient que pour le gouvernement et qu’elle n’a pas lieu d’être au sein de l’Assemblée.
Il feint d’oublier que dans son programme Ennahdha parlait de séparation des pouvoirs, lorsqu’aujourd’hui elle ne cherche que le meilleur moyen de les cumuler entre ses mains. Il feint encore d’oublier qu’en droit comme en logique, il y a un parallélisme des formes qui veut que le pouvoir qui nomme soit celui qui destitue, et qu’à ce titre si la confiance est votée à la majorité simple, alors il doit en être ainsi de la motion de censure.
Il feint d'oublier que le code du statut personnel est un acquis par trop exceptionnel, qui distingue la Tunisie parmi les autres pays arabes et musulmans, pour laisser en faire un texte ordinaire susceptible d'être modifié selon son bon vouloir.

Non, décidemment le futur chef du gouvernement, issu d'un parti représentant 20% des électeurs tunisiens, joue bien sa partition, fustige et accuse, mais ne trompe personne. En d’autres temps, Ben Ali n’aurait pas fait mieux. Il n'a d'autres objectifs que d'instrumentaliser le vote à ses antidémocratiques desseins, mais il l'apprendra tôt ou tard à ses dépens, le peuple veille.

*Walid BEL HADJ AMOR est ingénieur diplômé des grandes écoles françaises, Associé-Directeur Général Adjoint de Comete Engineering. Il est expert dans le domaine des infrastructures de transport et de l’aménagement du territoire et spécialiste du marché africain.
06/12/2011 | 1
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