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Chroniques
Chokri Belaïd est bel et bien mort
Par Marouen Achouri
06/02/2019 | 15:59
3 min
Chokri Belaïd est bel et bien mort

 

On aura beau se consoler en disant que Chokri Belaïd n’est pas mort, qu’il vit encore en chacun de nous, le tout dans un post sur les réseaux sociaux avec la petite chansonnette révolutionnaire qui va avec, cela ne changera pas la réalité. Chokri Belaïd est bel et bien mort et enterré.

 

Une telle affirmation heurtera peut-être les belles âmes qui vivent au pays des rêves démocratiques et les chantres du « je pleughe ma Tunisie ». Une telle affirmation contredira certainement les belles paroles de politiciens qui vivent loin, très loin de la réalité des choses. Une telle affirmation déclenchera peut-être la colère des petits « chefs d’agence » de la politique extrêmement courageux sur Facebook qui ne supportent pas qu’on les contredise et qui ne supportent la lumière crue des faits. Des petites racailles qui parlent de loyauté et de principes, mais qui ne sont bons qu’à distribuer des tracts et à placer les gens dans les meetings, et puis comme on le sait, pour les principes et la loyauté, plus on en parle…

 

On dit que le deuil n’est pas une bonne occasion pour régler les comptes, mais le deuil est dépassé depuis longtemps. Pendant que les assassins de Chokri Belaïd se pavanent en toute liberté, pendant que leurs frères de religion violent des gosses dans des écoles coraniques pour les préparer à devenir des terroristes et des tueurs, les autres se pavanent entre séance de dialogue et atelier de réflexion puis viennent nous éclairer, nous pauvres journalistes incompétents et nous, pauvre opinion publique bête et manipulée, de leurs lumières célestes.

 

Chokri Belaïd est mort et enterré et avec lui sa ferveur, son ouverture, sa profonde culture et son engagement sans faille. Personne, dans sa famille politique n’a été capable de reprendre le flambeau de la construction d’une gauche modérée, responsable, et qui pourrait, à terme, représenter une réelle alternative au pouvoir de la droite, qu’elle soit conservatrice ou religieuse. Sa famille politique a perdu beaucoup de sa consistance et est divisée entre l’immaturité du Front populaire et un Massar qui ne représente plus rien. Pire encore, certains font leur beurre politique sur le sang de Chokri Belaïd.

 

 Béji Caïd Essebsi également avait fait de l’arrestation des meurtriers de Chokri Belaïd une promesse électorale. Les historiens et les connaisseurs de la politique tunisienne savent quel genre de relations l’ancien ministre de l’Intérieur de Bourguiba entretenait avec les partis de gauche et leurs représentants. Toutefois, cette entourloupe a bien fonctionné et il y a encore des naïfs qui réclament la vérité au président de la République. De toutes manières, la vérité est un luxe que l’on ne peut pas s’offrir pour l’instant. Le parcours juridique chaotique de l’affaire Chokri Belaïd montre à lui seul que l’on est encore très éloignés de connaitre la vérité. Entre dissimulation de preuves, éclatement de l’affaire en plusieurs procédures et autres irrégularités, tout a été mis en œuvre pour entraver tout travail judiciaire rigoureux et efficace.

 

Tout cela pour dire que pendant que certains pleurnichent, d’autres travaillent et s’implantent. Pendant que certains sont occupés à insulter leur propre camp, d’autres envahissent le pays. Pendant que certains font les saintes nitouches et donnent des leçons, d’autres n’ont cessé d’écouter et d’apprendre depuis 2011. Je ne profiterai pas de ces colonnes pour appeler à la guerre ou à l’affrontement, mais je reste convaincu qu’il est temps que les camps soient clairement identifiés, que l’on sache qui est pour la Tunisie, qui est contre elle et surtout qui est « sur » elle.

 

Le meurtre de Chokri Belaïd a été un grand traumatisme pour ce pays. Il l’est toujours contrairement à ce qu’avait dit un président à peine quelque jours après l’assassinat. La Tunisie porte une blessure dont le nom est Chokri Belaïd. Il est temps de la soigner et de soigner ses complications. Définitivement.  

Par Marouen Achouri
06/02/2019 | 15:59
3 min
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Commentaires (3)

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mansour
| 06-02-2019 19:39
si fort, qu'on pourrait penser qu'ils sont sincères...

Zohra
| 06-02-2019 18:15
Malheureusement, c'est une grosse perte pour la patrie, cet Homme avec immense H mais inchallah Chokri Belaid ne mourra jamais, sa philosophie de la vie et son patriotisme resteront une leçon pour le monde entier.

Tout ce paye un jour ou l'autre tout se paye

A4
| 06-02-2019 16:52
LEVE-TOI !
Ecrit par A4 - Tunis, le 04 Février 2017

Lève-toi l'ami
Et fais comme moi
Je n'ai point dormi
Depuis bien des mois

Lève-toi, allez
Je te tends la main
J'ai les doigts gelés
J'ai le coeur chagrin

Allez, prends ma main
Tout seul je n'ai pu
Vaincre assassins
Et juges corrompus

Viens, ouvre tes yeux
Et serre fort ma main
Nous saurons à deux
Trouver l'assassin

L'assassin se cache
Derrière sa moustache
Ses lunettes de myope
Et son regard de taupe

L'assassin s'inquiète
En baissant la tête
Ni tranquille ni fier
Il vit un enfer

Il nous guette, le lâche
Mais il faut qu'il sache
Que tourne le vent
D'arrière au devant

Que même bien caché
Dans son vieux bûcher
Il n'évitera guère
La prise par derrière !