alexametrics
samedi 27 avril 2024
Heure de Tunis : 08:00
Chroniques
Budget en manque de financement
Par Houcine Ben Achour
25/10/2018 | 18:00
3 min
Budget en manque de financement

Par Houcine Ben Achour 

 

S’est-on réjouit un peu vite après que le ministère des Finances ait annoncé que les principaux objectifs budgétaires fixés pour 2018 ont été atteints? Le pouvait-on moins quand on nous dit que, cette année, les ressources propres du budget de l’Etat ont dépassé les objectifs fixés par la loi de finances ? Le pouvait-on moins dès lors qu’on nous annonce que les dépenses d’investissement du budget ont dépassé les estimations établies initialement et que le déficit budgétaire sera conforme aux prévisions de la loi de finances 2018 : 4,9% du PIB?

 

Malheureusement, il faudra déchanter quelque peu. Et il ne serait pas surprenant que le ministère des Finances soit amené à revoir sa copie du projet de loi de finances complémentaire. A moins qu’il ne révise le projet de loi de finances pour l’exercice 2019. Car, compte tenu des dernières évolutions, il est improbable que l’on puisse tenir pour acquis l’objectif de 4,9% de déficit budgétaire. Dans son dernier rapport bouclant la 3e revue-programme avec la Tunisie, le Fonds monétaire international estime, pour sa part, que le déficit budgétaire afficherait 5,1% en 2018. La différence représente plus de 300 MD. Mais ce n’est pas tant cela qui importe le plus, mais les scénarios envisagés pour afficher un tel résultat de déficit.

 

On aurait espéré que les gains dégagés au niveau des ressources propres, dépassant 1.500 MD, soient affectés à d’alléger les besoins d’emprunt du budget. Que nenni ! Cette manne a servi à répondre à l’explosion du budget de subvention qui affiche un imprévu de dépenses supplémentaires de 1.380 MD dont 1.200 MD pour la seule subvention à l’énergie. Quel gâchis !

Et ce n’est pas tout. Nos besoins d’emprunts extérieurs risquent de ne pas être satisfaits. Initialement fixées à environ 6.600 MD en excluant les prêts déjà affectés à des projets de l’Etat, le gouvernement aura toujours besoin de cette enveloppe pour boucler son budget. Il aura besoin de l’équivalent en devises d’environ  4.550 MD d’appui budgétaire. Ce qui est loin d’être évident à obtenir. L’accord conclu entre le gouvernement et l’UGTT sur des augmentations de salaires dans le secteur public va probablement faire cabrer le FMI dans la mesure où le gouvernement s’est engagé avec l’institution de Bretton Woods à geler les salaires dans la fonction publique durant les années 2018 et 2019. Il serait à craindre que la Tunisie ne puisse décaisser la 5e tranche d’un montant d’environ 750 MD de son crédit auprès du Fonds. Si une telle situation venait à se produire, elle serait inédite dans la mesure où pour la première la balance décaissement/remboursement avec le FMI serait négative en notre défaveur. Autrement dit, cette année, on risque de donner au FMI plus que ce qu’il nous aura donné. Quel gâchis !

 

S’agissant des emprunts que le gouvernement envisage de lever sur le marché international des capitaux, on est, là aussi, loin du compte. En la matière, les besoins budgétaires sont évalués à près de 2.050 MD. Or, pour l’heure, ce ne sont que 500 M€ que le gouvernement a réussi à obtenir, à un taux et une maturité qui traduit le degré de confiance des milieux financiers internationaux dans le pays. Oui, nous sommes bel et bien dans le radar des investisseurs extérieurs. Mais pas tout à fait dans le bon sens.

D’ailleurs, les statistiques des finances publiques n’encouragent guère. Sur un total d’emprunts extérieurs prévus par le budget en année pleine de plus de 7.300 MD, on n’a pu recueillir que 3.230 MD à la fin août 2018. En y ajoutant le montant de l’emprunt Eurobond récolté récemment, Il faudrait mobiliser plus de 1.700 MD supplémentaire d’ici la fin de l’année pour satisfaire l’exigence budgétaire en ressources extérieures.

 

Tout cela n’augure pas d’une arrivée à bonne fin du projet de loi de finances complémentaire. Et, implicitement du projet de loi de finances 2019. Devrait-on prévoir de vifs débats autour de ces deux projets au sein de la commission de Finances de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) puis en séance plénière ? Voire.  

Par Houcine Ben Achour
25/10/2018 | 18:00
3 min
Suivez-nous

Commentaires (4)

Commenter

Larios
| 26-10-2018 16:32
Tous ces chiffres, tous ces résultats, le citoyen n'est pas demandé ni de les connaitre, ni d'y s'intéresser, son seul souci est de sentir et de constater concrétement, sensiblement, et "palpablement"qu'il est capable à ce'tte période de satisfaire, au moins,ses besoins primaires et de sa famille, qu'il est capable d'avoir la possibilité de manger de la viande au moins une fois par semaine, que ses enfants seront à l'aise de poursuivre leurs études, qu'i leur trouve un embauche pour vivre leur dignité, que l'accés à l'hopital lui est facile, et trouve ses besoins en médicaments , voilà l'essentiel que toute nation est obligée de l'assurer à ses citoyens. Tout cela est à sa portée et elle est capable de le réaliser , seulement nos décideurs politiques doivent avoir le culot et le courage de faire face aux bandits qui fuient de payer leurs dettes, aux barrons de la contrebande du commerce, aux magouilleurs des fiscs, et aux corrupteurs et corrompus lors de la gestion des deniers publics

DHEJ
| 26-10-2018 14:41
Tu avais écrit que le gouvernement du GAMIN n'a pas besoin de présenter un PLFC...

manixsv
| 26-10-2018 09:20
si 2 ou 4% d'augmentation des salaires dans la fonction publique, en incluant l'augmentation de productivité. il suffit de compenser par 4 a 6% d'augmentation de la masse monétaire.

Bon, je ne vais pas faire de stock de tnd....

Dr. Jamel Tazarki
| 25-10-2018 22:07
certes et comme d'habitudes vos textes font utilisation de bonnes données empiriques ==> c'est la raison pour laquelle que j'aime beaucoup vous lire!

vous écrivez: "L'accord conclu entre le gouvernement et l'UGTT sur des augmentations de salaires dans le secteur public va probablement faire cabrer le FMI dans la mesure où le gouvernement s'est engagé avec l'institution de Bretton Woods à geler les salaires dans la fonction publique durant les années 2018 et 2019. Il serait à craindre que la Tunisie ne puisse décaisser la 5e tranche d'un montant d'environ 750 MD de son crédit auprès du Fonds. Si une telle situation venait à se produire, elle serait inédite dans la mesure où pour la première la balance décaissement/remboursement avec le FMI serait négative en notre défaveur."

==> Je suis convaincu que Monsieur Youssef Chehed a eu le consentement (le feu vert) du FMI pour les augmentations salariales dans le secteur public. en effet, Youssef Chehed est très intelligent afin de courir le risque "que la Tunisie ne puisse décaisser la 5e tranche d'un montant d'environ 750MD de son crédit auprès du Fonds."


Puis entre nous, Si Houcine, les augmentations salariales dans le secteur public ne dépasseront pas les 200MD, une somme que le budget de l'état pourrait facilement récupérer par de nouveaux impôts sur certains produits/services de luxe!

Très cordialement

Jamel Tazarki