L’une des premières marques de l’irresponsabilité est le déni. Or depuis le déclenchement de la prise d’otage des deux confrères tunisiens, Sofiène Chourabi et Nadhir Guetari il y a maintenant plus de huit mois, nous nous sommes tous voilés la face pour ne pas voir, ne rien voir, ne pas affronter une réalité, une vérité, hideuse, macabre qui a fini par nous exploser en pleine figure.
On présageait, on pressentait, on prédisait dès les premiers instants que le sort des deux jeunes journalistes allait être compliqué mais avons-nous cherché à les sauver de leur sort ? Avons-nous cherché réellement à faire toute la lumière sur les circonstances du kidnapping, sur les parties impliquées dans cette prise d’otage, sur les lieux de séquestrations de Sofiène Chourabi et Nadhir Guetari ? Assurément non. Excepté la famille des deux journalistes, le syndicat des journalistes et quelques rares militants de la société civile qui agissaient à titre individuel. Mais esseulée et démunie de tous moyens, cette petite poignée de personnes ne pouvait affronter l’anarchie de la situation libyenne.
Les autres, tous les autres, c'est-à-dire nous tous, nous avons fait semblant de ne rien voir, de ne rien savoir à commencer par les gouvernements successifs, les hommes politiques et les médias.
Pourtant dès les premiers instants, nous étions tous convaincus que la situation de nos deux confrères était grave. Nous savions qu’en Libye, aucune partie, aucune structure n’avait les moyens humains, techniques et logistiques de garder des otages en vie suffisamment longtemps pour entamer des négociations en vue de leur libération. Les responsables sécuritaires tunisiens, les diplomates en place à Tripoli et leurs patrons au ministère des Affaires étrangères à Tunis ainsi que le gouvernement tunisien disposaient de tous les éléments pour faire une analyse rationnelle, donc pessimiste, de la situation. Ils ne l’ont pas fait ou du moins ils ne l’ont pas annoncé. Au contraire, ils ont développé un discours faussement sécurisant incitant des médias puérils à souhait à relayer un message anesthésiant. Par manque de lucidité et par un acharnement, plus émotionnel et affectif que professionnel, à sauver nos deux confrères, les médias ont oublié de chercher la vérité et sont devenus les complices de la désinformation orchestrée par des gouvernements qui avaient un intérêt, considérations géostratégiques obligent, à masquer la douloureuse vérité et la reporter sans cesse.
Le gouvernement actuel n’est peut-être pas responsable de la liquidation physique de Sofiène Chourabi et Nadhir Guetari, ils avaient été assassinés des mois avant son installation. Mais il est responsable d’un manque de fermeté, d’une lâcheté dans la gestion du dossier libyen. Aujourd’hui encore, rares sont ceux qui sont convaincus de la justesse de la décision annoncée de rouvrir nos deux consulats à Tripoli et Benghazi alors qu’il aurait été préférable d’annoncer la fermeture de nos frontières avec la Libye. Peu sont convaincus des rapports binaires qu’entretient le gouvernement tunisien avec les parties belligérantes en Libye. On ne s’explique pas comment le président de la République reçoit officiellement le représentant du gouvernement illégitime. Par ces maladresses et tergiversations, le gouvernement actuel n’a pas transmis aux Libyens un message de fermeté ce qui ne manquera pas de précariser la situation des Tunisiens vivant encore en Libye.
Déjà, du temps de la troika, en acceptant d’échanger nos diplomates à Tripoli par des terroristes libyens, l’ancien président Marzouki et ses amis islamistes ont fait circuler le message que les Tunisiens pourraient constituer une bonne monnaie d’échange. Ce message s’avérera dangereux et Sofiène et Nadhir allaient en pâtir.
Quant au gouvernement Mehdi Jomâa, soucieux d’astiquer son image, d’être copain avec tout le monde, ce dossier était trop brûlant pour qu’il s’y implique sérieusement. Après tout, il n’était qu’un gouvernement provisoire de transition. Le gouvernement qui lui succèdera n’a qu’à assumer le poids de la vérité dans un dossier qui a été géré de bout en bout dans le mensonge le plus total.
Maintenant, comment faire pour qu’il n’y ait plus d’otages tunisiens en Libye ? Comment faire pour ne plus donner l’impression d’être surpris par des drames annoncés ? Parce qu’il est évident que chaque Tunisien séquestré en Libye sera exécuté ou échangé avec un terroriste emprisonné dans les prisons tunisiennes qui reviendra dans quelques temps tuer d’autres Tunisiens.



si par miracle ils sont vivants ce dont je doute fort;qu 'on nous presente une video
le gouvernement et la societe civile doivent se mobilise et accompagner leurs familles
Apres avoir festoyé apres votre mariage ;vous avez pensé à eux
Bonne continuation
P.S. Pour vous, une belle voix pour la route: https://www.youtube.com/watch?v=tmkQx9QdmWE
Bonsoir cher ami,
Je respecte votre point de vue et je le comprends, de plus, lorsqu'une divergence d'opinions est exprimée avant autant d'élégance, je ne peux que que l'apprécier. . .
Par ailleurs, je vous remercie pour les précisions enrichissantes concernant le concept de société civile et qui pourraient expliquer mon sentiment d'être responsable de ce qui peut arriver dans notre société, sans pour autant être une adepte de l'autoflagellation et encore moins xèlote ; En effet, j'ai choisi d'être membre d'une ONG locale qui représente bien la société civile et j'ai la conviction qu'au moins dans le cadre de cette structure, on aurait pu mieux faire, ne serait ce que maintenir une pression permanente pour que le dossier de ces deux journalistes soit traité dans les plus brefs délais. Je reste convaincue que Nadhir et Sofiène Chourabi auraient eu davantage de chances de survie si leur libération avait été négociée dans les jours ou les semaines qui ont suivi leur séquestration, d'où la responsabilité particulière du gouvernement de M jomaa, et à un degré moindre, celle de H ESSID. . .
Amitiés
La question qui se pose d'elle-même : Pourquoi des journalistes tunisiens,chevronnés et expérimentés,n'ont pas emprunté le même chemin que Sofiène Chourabi et Nadhir Guetari?
Élémentaire mon cher Watson, la réponse se trouve dans la question;c'est par ce qu'ils sont chevronnés et expérimentés,et connaissent pratiquement toutes les ficelles du métier !