Par Sofiene Ben Hamida
Que faut-il retenir du vote de renouvellement de confiance au gouvernement ce samedi 30 juillet ? Presque rien sauf un vote connu d’avance, sans surprise, un non événement en somme. Au mieux, on retiendra que le chef du gouvernement Habib Essid a confirmé, jusqu’à la dernière seconde de son mandat, qu’il manque de poigne, qu’il est fébrile et qu’il devait partir parce qu’il n’était pas à sa place. On retiendra aussi le délabrement honteux de notre classe politique représentée par les élus de l’ARP, son opportunisme et son incapacité à se hisser au niveau des exigences du moment et des attentes de la population. On retiendra, enfin, l’inadéquation de notre système politique hybride avec les impératifs de la stabilité nécessaire pour tout développement économique et social.
Sur la forme, en s’entêtant à demander le vote de confiance au parlement, Habib Essid s’est mis tout seul dans la gueule du loup et est passé très près de l’humiliation. Il savait pourtant depuis longtemps que les dés sont jetés et que ses alliés se sont retournés contre lui. Au final, seuls trois députés ont voté en faveur du renouvellement de confiance au gouvernement. Y-a-t-il un échec plus cuisant ? Comment le chef du gouvernement sortant a-t-il échoué à ce point, à nouer des rapports de confiance et d’amitié, ne seraient-ce que personnels, avec les députés ?
Sur le fond, le discours du chef du gouvernement sortant n’a rien apporté de nouveau. Le bilan présenté est mitigé de son propre aveu, et les difficultés sont connues par tous. Franchement, on s’attendait à beaucoup plus comme dénoncer certaines pratiques politiques, certains comportements mafieux, régler ses comptes une dernière fois avec ses détracteurs, égratigner certains de ses collaborateurs et alliés, y compris le président de la République, pour leur manque de soutien. Il n’en fut rien et le discours d’adieu d’Essid a été redondant, monotone, ennuyeux et sans relief. L’attachement à la Constitution aurait pu être assuré autrement et l’objectif d’une sortie honorable a été complètement raté.
En face, quelques députés ont sauvé la mise en nous gratifiant d’interventions à la hauteur de l’événement. Peu importe la teneur et les arguments utilisés dans ces interventions, elles étaient structurées et d’un niveau politique honorable. Mais la majorité des intervenants ont développé hélas, un discours plat, médiocre sans envergure et sans aucune perspective politique. Certains se sont même embourbés dans un discours de rue, emportés par leurs élans populistes masquant mal un opportunisme exacerbé ou une haine incontrôlée.
Pire encore, soixante dix députés se sont dérobés face à leurs responsabilités. Vingt sept se sont abstenus et quarante trois ont décidé à la dernière minute de ne pas participer au vote sur le renouvellement de confiance au gouvernement. Aucun alibi, aucun argument ne pourra nous convaincre du bien fondé de ce comportement plus proche de la lâcheté politique que toute autre chose. Rappelons à ces messieurs qu’ils coutent cher à la communauté nationale et qu’ils ont été élus pour prendre part aux décisions et non pour s’abstenir ou faire la politique de l’autruche.
Bref, la séance de vote sur le renouvellement de confiance au gouvernement que certains ont qualifié hypocritement d’historique n’a servi qu’à dévoiler nos tares et nous donner en spectacle. Un spectacle peu reluisant puisqu’il a mis à nu la piètre qualité de notre classe politique. Il nous a donné la preuve d’un autre côté des faiblesses de notre système politique hybride qui en se voulant être un garde-fou contre l’autoritarisme et le despotisme est devenu la source d’une instabilité politique qui handicape la progression et le développement du pays.


Commentaires (42)
CommenterPourquoi ?
@ tounsia2
Tout l'honneur est pour moi, de côtoyer (même si sur un site virtuel) une grande dame comme vous, authentique, toujours dans la courtoisie et la pondération mais sans jamais perdre une once de bon sens, de clairvoyance ou de patriotisme !
Merci pour tout ce que vous êtes !
Avec toute mon amitié
UN ECUREUIL ET DES NON PATRIOTES
en plus donne des explications d'un ecolier devant son maitre et balbutant.
LE PLUS GRAVE LES 27 ELUS ABSENTS IL EST
IMPERATIF DE LES RENVOYER DE LES HUMILIER ET LES SANCTIONNER.
manquement au droit et negligeance
de l'avenir de la tunisie,fuite de la
responsabilité et vol du fric des
tunisiens.
@Tunisienne
Je voudrais vous remercier pour tous vos commentaires que je partage sans modération et qui me réconfortent particulièrement en ces moments difficiles de l'histoire de notre pays; Je vous remercie pour votre disponibilité, pour votre lucidité et votre sincérité, mais aussi pour tout le plaisir que me procure la lecture de vos brillantes contributions; je suis heureuse et fière de vous compter parmi mes compatriotes.. .
Bonne fin de soirée et à bientôt
@Kairouan 01-08-2016 09:51
Merci pour votre message qui me conforte dans mon point de vue et me fais plaisir.
Salutations
une piètre réalité si bien décrite
c'est triste mais c'est pure vérité. Comme nous ne pouvons compter sur nos députés pour guérir les maux du pays, espérons que d ici la fin de leur mandat, il n y mettrons pas le feux.
Si seulement Sofiène Ben Hamida connaissait les règles et les pratiques de la démocratie !!!
Le monde entier en a parlé et a tenu son souffle jusqu'à la dernière minute du vote en séance plénière extraordinaire de l'ARP, en respect à cette démarche démocratique inédite de par l'ensemble du tiers-monde. Mais nos «intellectuels» trouvent cela ennuyeux, qui provoque leur contrariété. Pour eux, c'est du «temps perdu». Ils ont tendance à regarder «Ouled Moufida» que de regarder «Ouled Tunisia».
Seule la réclame dont notre pays a joui dans les informations de par le monde entier, suite à cette pratique démocratique monopolisée par les pays les plus avancés de notre globe terrestre, vaut son poids en or pur. Un prix qu'on ne pourra jamais payer par notre aplatissement et par la méthode des béni-oui-oui héritée des deux dictateurs déchus Bourguiba et Ben Ali.
Que Sofiène Ben Hamida modernise un peu son esprit journalistique. Le monde avance à grands pas. Celui qui n'avance pas recule.
Est ce une première ?
Mais ce n'était pas pour rien,à mon humble avis.Vos deux dernières phrases le montrent.